Mot de l’éditrice
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14 juin, 2022Quel que soit le programme offert ou la matière enseignée, les apprenants cherchent des solutions afin que leurs expériences se traduisent en un avenir meilleur
Mark Franklin, Rich Feller and Lisa Bauman
On dit souvent que l’expérience est le meilleur professeur. Cependant, comme le philosophe John Dewey l’a fait observer de manière plus juste : « Nous n’apprenons pas de notre expérience, mais de la réflexion suscitée par notre expérience. »
Des intervenants de partout au Canada ont confirmé cette conviction dans le cadre du projet financé par le CERIC intitulé La valeur du développement de carrière dans un cadre d’apprentissage par l’expérience, dirigé par OneLifeTools. À tous les niveaux, les concepteurs d’apprentissage par l’expérience recherchent des pratiques et des outils de réflexion pour relier l’apprentissage par l’expérience et les résultats de développement de carrière.
Quel que soit le programme offert ou la matière enseignée, les apprenants cherchent des solutions afin que leurs expériences se traduisent en un avenir meilleur. Les récits qui présentent des atouts essentiels à la réussite professionnelle et personnelle sont un résultat important de l’apprentissage intégré au travail.
Heureusement, nos intervenants ont mis en commun leurs meilleures pratiques en complément d’une recherche documentaire, d’une analyse contextuelle, d’entrevues avec des informateurs clés et d’un sondage, afin de créer un centre de ressources que nous avons appelé Wayfinder. Cet outil numérique permet aux intervenants – et à d’autres « créateurs » de la pratique réflexive tels que les superviseurs en milieu de travail – de trouver des ressources pertinentes en matière de pratique réflexive, afin d’exploiter la valeur du développement de carrière dans leurs programmes d’apprentissage par l’expérience. Bien que l’outil soit en anglais, il contient également des ressources en français.
Réflexions : Avant, pendant et après
Les apprenants évaluent intérieurement leurs expériences avant, pendant et après celles-ci. Ils rassemblent des images d’eux-mêmes, donnent un sens aux rétroactions verbales et non verbales, et se lancent dans des discours intérieurs sur les possibilités et les obstacles sur leur chemin. Ces monologues intérieurs contiennent des informations importantes qui doivent être clarifiées par la pratique réflexive. Si elles sont prises en considération, ces informations peuvent venir éclairer la prise de décision de l’apprenant et l’orienter dans la bonne direction.
« La pratique réflexive est un examen volontaire, actif et critique de ses expériences, tant positives que négatives, et de soi-même. »
Nos informateurs clés, composés de dix-neuf intervenants et leaders d’opinion de partout au Canada, nous ont apporté des réponses pour nous aider à décrire la façon dont la réflexion peut être comprise.
Il n’existe actuellement aucune définition convenue de la pratique réflexive. Cependant, les éléments communs qui sont ressortis de nos discussions nous mènent à proposer la définition suivante :
La pratique réflexive est un examen volontaire, actif et critique de ses expériences, tant positives que négatives, et de soi-même (Thejll-Madsen, 2018). C’est un outil qui permet à la théorie et à la pratique ou à l’expérience de se renforcer mutuellement en permanence (Thompson et Thompson, 2008).
Le point de vue d’étudiants révèle les possibilités de croissance liées à cette pratique
Des étudiants de notre groupe de discussion affirment avoir vécu leur meilleure expérience de réflexion dans le cadre de conversations individuelles avec des superviseurs en milieu de travail et des membres du personnel du secteur postsecondaire. Ces conversations leur ont permis de se poser des questions plus approfondies et plus nuancées qui ont soutenu « l’apprentissage transformateur » que promet une pratique réflexive de qualité.
La pratique réflexive leur a également apporté une plus grande liberté et un sentiment de sécurité accru leur permettant de faire preuve de sincérité dans leurs commentaires. Certains étudiants, qui n’avaient pas recours à des outils de réflexion significatifs et bien structurés, ont fait part de leur scepticisme à l’égard de certaines activités :
- Ils ne veulent entendre parler que d’expériences positives, mais la mienne n’a pas été entièrement positive. J’ai laissé de côté les aspects négatifs.
- Comment puis-je être honnête lorsque l’école transmet mes réflexions à l’employeur? Je dois mentir pour ne pas nuire à mes chances qu’il m’embauche ultérieurement.
- La tâche consistait à écrire 1 000 mots sur l’expérience, sans aucune autre consigne. Je ne connaissais pas leurs attentes.
Ces commentaires qui donnent à réfléchir soulignent la nécessité pour les intervenants de communiquer à leurs étudiants des outils qui fonctionnent et qui peuvent leur être utiles. En effet, les intervenants peuvent offrir à leurs étudiants une feuille de route qui les mènera à des résultats plus riches en les aidant à prendre conscience du pouvoir de la pratique réflexive, à acquérir les compétences requises pour l’utiliser et à découvrir des notions menant à un apprentissage plus approfondi.
Le point de vue d’intervenants sur la pratique réflexive
Nous avons mené un sondage auprès d’intervenants (n=72) sur l’intégration des objectifs de développement de carrière ou des résultats escomptés de celui-ci dans la pratique réflexive. Les deux tiers des intervenants ont répondu que les apprenants étaient invités à déterminer leurs propres objectifs, et la moitié d’entre eux que leurs programmes s’accompagnaient d’objectifs de développement de carrière explicites. Certains répondants ont affirmé qu’ils demandaient aux apprenants de déterminer leurs compétences à partir de listes ou de cadres, comme les compétences qui favorisent la préparation à la carrière de la National Association of Colleges and Employers (NACE).
Lorsque nous leur avons demandé de décrire la pratique réflexive intégrée plus largement dans leurs programmes, 76 % des répondants ont indiqué qu’ils utilisaient une approche autonome structurée par des questions et des incitations à la réflexion, telles que les suivantes : « Quelles compétences avez-vous acquises? Comment celles-ci ont-elles influencé vos objectifs de carrière? Que pensez-vous de ce que vous avez appris? »
D’autres intervenants utilisaient diverses approches, notamment des rencontres individuelles avec les employés, les membres du corps professoral, les superviseurs ou les employeurs pour pratiquer la réflexion, des ateliers de groupe, des discussions en classe et des réflexions autonomes, ouvertes et non structurées.
Lorsque nous leur avons demandé quels étaient les obstacles à la pratique réflexive, 68 % ont répondu le manque de temps du personnel ou du corps professoral, 47 % la capacité, la volonté ou la motivation limitées des apprenants à utiliser la pratique réflexive et 35 % un budget comprimé.
Quant aux raisons de ces obstacles, les réponses ont été les suivantes : Le manque d’accès à une gamme de questions et d’amorces pertinentes à la pratique réflexive qui peuvent être adaptées à des scénarios d’apprentissage par l’expérience ; l’adhésion restreinte des membres du corps professoral et de l’administration de l’établissement ; et le manque de formation sur la pratique réflexive donnée aux intervenants.
Pour surmonter certains de ces obstacles, les intervenants ont cherché à perfectionner leurs compétences et leurs connaissances afin de savoir comment :
- Mieux motiver et inciter les apprenants à utiliser la pratique réflexive ;
- Déterminer si les ressources de pratique réflexive sont utilisées efficacement ;
- Créer une gamme de questions et d’amorces à la pratique réflexive qui peuvent être adaptées à de multiples scénarios d’apprentissage par l’expérience.
En route vers des solutions et de meilleurs résultats
Nous avons demandé aux répondants si un outil permettant de faciliter la recherche de ressources pertinentes leur serait utile en tant qu’intervenants : 90 % ont répondu par l’affirmative.
En réponse à ce que nous avons appris, nous avons rédigé l’énoncé d’une solution, dont voici un extrait : « Diriger les intervenants (créateurs) vers des ressources qui soutiennent leurs programmes ou leurs cours afin de créer ou d’améliorer la pratique réflexive sur l’apprentissage par l’expérience, et d’élargir la portée du développement de carrière. » (Pour obtenir l’énoncé complet de la solution et les résultats du sondage, consultez le rapport de projet.)
Ensuite, nous avons créé une base de données en ligne, facilement consultable, que nous avons appelée Wayfinder. Elle comprend plus de 300 ressources de pratique réflexive (dont plus de 50 en français) liées au développement de carrière. Nous avons également créé un guide pour les intervenants intitulé Maker’s Audit & Guide (Outil de vérification et guide du créateur), offert en version anglaise sur le site, pour aider à clarifier les lacunes de la pratique réflexive et les besoins liés au développement de carrière, et pour optimiser l’utilisation de l’outil Wayfinder.
Vous aimeriez en savoir plus? Consultez l’enregistrement du webinaire gratuit du CERIC et de OneLifeTools intitulé « How Experiential Learning Supports Career Development Through Reflective Practice » (Comment l’apprentissage par l’expérience soutient le développement de carrière par la pratique réflexive).
Mark Franklin est cofondateur de OneLifeTools, chef des services professionnels à CareerCycles, coauteur du jeu primé Who You Are Matters! et enseignant à l’Université de Toronto. Il est également conseiller en matière d’intégration de la pratique réflexive, de la ludification et de l’apprentissage fondé sur la technologie dans les programmes d’études et la programmation.
Rich Feller est professeur en orientation et en développement de carrière à l’Université d’État du Colorado, ancien président de la National Career Development Association, cofondateur de OneLifeTools, conseiller pour YouScience et formateur principal pour la certification JCTC destinée aux accompagnateurs en gestion et transition de carrière.
Lisa Bauman est directrice de programme et professeur à temps partiel en développement de carrière au Conestoga College Institute of Technology and Advanced Learning. Depuis plus de 10 ans au Conestoga College, Mme Bauman a occupé de nombreux postes, notamment directrice de programme, membre du corps professoral, accompagnatrice en gestion et transition de carrière, et conseillère en orientation par les pairs et en programmes d’études. En 2015, elle a obtenu sa maîtrise en éducation de l’Université de Calgary.