L’intégration d’une c.o. québécoise à Vancouver (contenu Web exclusif)
par Catherine Bergeron
Les conseillers d’orientation sont dans leur élément quand ils aident leurs clients à vivre des transitions professionnelles importantes. Mais quand vient le temps de s’aider soi-même, le défi est différent. Catherine Bergeron nous fait part de sa propre histoire de transition.
Voilà et enfin! Je suis maintenant intégrée à la vie de Vancouver, et dans deux semaines, je débuterai en tant que Peer Counsellor bénévole à l’Université de la Colombie-Britannique (UBC). Je viens de terminer ma formation de 30 heures sur les techniques d’interventions pour être bénévole au département des programmes de vie et de carrière. Je me retrouve ainsi à la fin de ma transition, dans la saison du printemps (commencement), dernière étape du processus de transition selon Michèle Roberge (conseillère d’orientation et travailleuse sociale). Après un an et demi de réflexion et d’expériences, j’ai finalement franchi cette dernière étape, puisque j’avais le désir profond de réaliser un projet dans mon domaine tout en perfectionnant ma langue seconde. Aujourd’hui, je suis fière d’être partie prenante de cette ville magnifique, je comprends sa culture et j’ai l’impression de pouvoir y être utile malgré la barrière linguistique. J’irais même jusqu’à dire que le brouillard, le vent de la mer et la pluie m’inspirent. Je vous assure que je suis choyée ici!
J’ai choisi d’écrire sous forme de témoignage, puisque les faits vécus me touchent profondément et me passionnent. Originaire de Québec, j’ai vécu quatre ans à Montréal, puis, en septembre 2011, mon conjoint a reçu une opportunité de travail extraordinaire dans l’Ouest canadien. Cela nécessita malheureusement de quitter mon poste de conseillère d’orientation auprès de la clientèle artistique, un emploi que j’appréciais beaucoup.
Au départ, ce fut l’exaltation pour cette ville magnifique entourée par la mer et les montagnes. J’en ai profité pour prendre soin de moi : randonnées en vélo, cafés avec mes nouveaux amis, dîner de sushis, etc. Je vivais la saison de l’automne (l’achèvement), selon Roberge. Cette étape marqua la fin d’une relation quotidienne avec le Québec, mais aussi un recommencement, la découverte d’une autre ville, d’une autre culture. Je me suis désengagée et j’ai cessé de regarder la télévision québécoise (fini les recettes de Ricardo!). J’ai intégré les valeurs de l’Ouest canadien, tel le dévouement communautaire, la santé et l’environnement.
Quatre mois après mon arrivée, j’étais prête à passer en mode action. C’était la période du flou de l’hiver, durant laquelle j’ai eu besoin de projets pour m’intégrer à Vancouver. Je me suis impliquée comme bénévole à l’école francophone de mes enfants, mais ce n’était pas assez : je me sentais différente et éloignée de cette population anglophone. Il me fallait améliorer ma langue seconde, alors je me suis inscrite à un cours d’anglais. Malgré tout, je me sentais improductive (état normal de ce cycle selon Roberge), même quand mes journées étaient remplies. Dans cette essentielle errance, je cherchais à m’exprimer et à retrouver l’aidant naturel en moi. J’ai découvert de nouvelles valeurs lors d’un exercice élaboré par UBC : la croissance, l’appartenance, la créativité et l’équilibre, quatre valeurs que je n’avais pas identifiées auparavant.
J’avais du temps pour moi, alors j’ai réfléchi à ma carrière de conseillère. J’ai identifié mes priorités, qui sont de rester à jour dans mon domaine, de perfectionner mon anglais et de préserver l’équilibre travail-famille. Peut-être pourrais-je créer mes propres outils d’orientation afin de travailler à mon compte, ou encore devenir professeur de français pour les parents anglophones? J’étais tiraillée entre le désir de m’améliorer professionnellement et celui de vouloir être présente pour mes enfants. J’ai exploré différentes ressources reliées à mon domaine d’expertise et découvert un programme de bénévolat fabuleux où je pourrais faire du counseling.
J’ai trouvé, c’est parfait pour moi! La route ne sera pas facile, mais je vis la saison du printemps, qui représente le commencement. Je me suis inscrite, j’ai décroché une entrevue et obtenu une formation de 30 heures en counseling. Je vais enfin réaliser un projet qui s’inscrira dans ma carrière, quelle merveille et quel sentiment de fierté! En parallèle, j’ai continué à découvrir les aspects positifs de cette ville. J’apprécie, entre autres, l’anonymat que procure le parapluie, ainsi que la proximité du plein air. J’aime aller à la plage avec mes garçons et aller au marché de Granville Island. Finalement, lors de cette saison, je retrouve mon équilibre, tel qu’exprimé par Michèle Roberge : « Dans les saisons de la transition, on arrive au commencement à la fin du cycle. C’est après la longue traversée dans le brouillard, quand celui-ci se lève, que les révélations se font et que la direction se dessine. C’est de l’absence de forme de l’essentielle errance que la nouvelle forme émerge. Comme les bourgeons, cette émergence se fait progressivement et imperceptiblement, jusqu’à ce qu’un jour l’éclosion du commencement se fasse sentir au grand jour » (Michèle Roberge, Tant d’hiver au cœur du changement, Septembre éditeur, p.97).
En conclusion, je crois que tout individu a la capacité de s’adapter aux changements, mais qu’il est préférable de se laisser du temps pour établir ses priorités afin de ne pas faire de mauvais choix. Mon rôle, je crois, sera d’aider mes futurs clients à traverser ces saisons et de les amener à découvrir les petites merveilles qu’ils ont en eux!
Catherine Bergeron est conseillère d’orientation depuis près de 10 ans. Elle a travaillé dans les secteurs public et communautaire, notamment à titre d’agent d‘aide à l’emploi chez Emploi-Québec. Elle a également œuvré auprès de la clientèle artistique en réorientation de carrière au sein de Cible Retour à l’Emploi, un organisme communautaire de Montréal.