Près de quatre entrepreneurs d’âge mûr sur 10 se heurtent à des lacunes dans le soutien dont ils ont besoin pour lancer ou faire croître leur entreprise, révèle une nouvelle étude financée par le CERIC sur l’état de l’entrepreneuriat des personnes âgées au Canada. Selon les résultats contenus dans le rapport de recherche publié par le Sheridan Centre for Elder Research, 37 % des répondants de 50 ans ou plus ont de la difficulté à avoir accès à un soutien financier ou gouvernemental et à des mentors.

L’étude, qui s’est étendue sur huit mois, a eu recours à des sondages en ligne, des entrevues approfondies et des groupes témoins pour examiner les expériences, les besoins et les intérêts de 180 entrepreneurs séniors à l’égard de l’orientation professionnelle et du soutien. Elle est publiée au moment où, selon les données de 2017, les Canadiens âgés de 50 ans et plus représentent 37,8 % de la population canadienne et que cette proportion continue d’augmenter. De même, une étude de la CIBC menée en 2012 fait état que les personnes de 50 ans ou plus forment le groupe d’âge affichant la croissance la plus rapide parmi les fondateurs d’entreprises en démarrage au Canada, soit environ 30 % du nombre total. Malgré ce nombre, peu d’études ont porté sur cette tendance des « entrepreneurs séniors ».

La recherche de Sheridan explore les voies distinctes empruntées par les entrepreneurs séniors. Les trois raisons les plus fréquemment invoquées par les participants à l’étude pour démarrer une entreprise après l’âge de 50 ans sont les suivantes :

  1. Vouloir continuer à utiliser leurs aptitudes;
  2. Un besoin ou une volonté de générer une nouvelle source de revenus;
  3. Vouloir mieux contrôler leur travail et leur mode de vie.

Le rapport mentionne que lorsqu’on a demandé aux répondants d’indiquer l’importance de l’affirmation « J’ai dû quitter mon emploi précédent/arrêter ma carrière (quelque soit la raison) », 48 % ont déclaré que cette affirmation ne s’appliquait pas à eux, ce qui laisse penser que ce ne sont pas les conditions de travail de leur occupation précédente qui, pour plus de la moitié des participants, motivent leur passage à l’entrepreneuriat, mais plutôt l’attirance pour une nouvelle occasion.

Les répondants représentaient en outre une large gamme de secteurs et de types d’entreprises. Un quart des répondants ont affirmé être des « consultants ». D’autres participants se sont investis dans la technologie, dans l’entrepreneuriat social, les communications, les arts/design, les soins de santé, l’éducation, les services communautaires/sociaux, la finance/les banques, la fabrication, les loisirs, le commerce électronique, l’alimentation, l’énergie/l’environnement, l’agriculture, l’immobilier, le domaine juridique, le marketing/marquage, les services liés aux animaux domestiques, le tourisme, les transports, la culture physique et la vente au détail. Ces entreprises mènent leurs affaires tant en ligne qu’en personne. En outre, plus de la moitié des répondants (58 %) ont déclaré avoir exploité ou exploré l’idée d’exploiter une autre entreprise avant de gérer l’entreprise qu’ils ont actuellement, ce qui laisse croire que la transition vers l’entrepreneuriat est le fruit d’un réel cheminement.

Les prestataires de service auxquels les entrepreneurs âgés ont eu le plus recours pour les aider sont les bureaux d’aide aux petites entreprises, les banques, les chambres de commerce et les bureaux de développement économique. L’étude souligne que la plupart des participants ont déclaré avoir eu recours à plusieurs prestataires de service pour obtenir du soutien. Les chercheurs attirent également l’attention sur les répondants qui ont indiqué n’avoir eu accès à aucun service ou avoir agi entièrement seuls, témoignant du caractère unique des besoins des entrepreneurs séniors en ce qui concerne la localisation ou le repérage des meilleurs services d’aide.

Quand on demande aux participants quels sont les facteurs qui ont le plus contribué à leur succès, les réponses sont les suivantes :

  1. Leur expérience professionnelle et expertise accumulées;
  2. Leur connaissance des besoins de leurs clients;
  3. Leur persévérance et leur détermination.

À égalité en quatrième position, on trouve leur volonté de prendre des risques, leur réputation et leurs réseaux de connaissances. Il en ressort que les entrepreneurs plus âgés attribuent leur réussite à un mélange de caractéristiques personnelles et d’accumulation de ressources ou de savoir-faire.

Bon nombre de participants (40 %) déclarent ne pas être victimes de discrimination en raison de leur âge dans leur parcours vers l’entrepreneuriat. Mieux, ils ont l’impression d’être recherchés précisément en raison de leur expérience. Parmi ceux qui ont fait l’objet de discrimination, les deux raisons les plus souvent avancées sont que les services dont ils auraient voulu profiter n’étaient offerts qu’aux jeunes entrepreneurs et que le processus pour s’y retrouver dans le « système » était moins bien défini pour un entrepreneur plus âgé que pour un entrepreneur plus jeune. À la question de savoir comment les entrepreneurs séniors peuvent s’appuyer mutuellement, la réponse la plus fréquente est que l’assistance mutuelle n’est pas la seule affaire des entrepreneurs plus âgés, mais que ce mentorat doit s’inscrire dans une perspective qui transcende les générations.

Pour améliorer l’état de l’entrepreneuriat chez les personnes d’âge mûr au Canada, le rapport fait les recommandations suivantes :

  • Standardiser les programmes et les services qui existent pour appuyer ces entrepreneurs et la façon dont ils sont annoncés d’un bout à l’autre du pays.
  • Concevoir, mettre en application et évaluer des modèles innovants et des services de soutien qui favorisent le mentorat intergénérationnel.
  • Envisager d’abandonner la désignation « entrepreneurs séniors » et assurer plutôt des services d’appuis à tous les entrepreneurs, sans égard à leur âge.
  • Améliorer la communication entre les diverses parties prenantes qui ont un intérêt à appuyer ces groupes (p. ex., les décideurs, les professionnels de développement des carrières, les bailleurs de fonds) pour que le message soit cohérent et que les aiguillages entre groupes soient facilités.
  • Promouvoir un financement et d’autres formes d’aide dont l’octroi ne tient pas compte de l’âge des demandeurs.
  • Assurer des services de reclassement professionnel aux travailleurs plus âgés qui quittent leurs emplois traditionnels et envisagent de monter une entreprise comme solution viable.
  • Mettre au point du matériel de formation et des ressources à l’intention des professionnels de développement des carrières et d’autres prestataires de services qui pourraient les aider à mieux aider leurs clients d’un certain âge.
  • Mettre en valeur les aptitudes, la sagesse et l’expérience des personnes plus âgées et des entrepreneurs séniors auprès de la société en général et s’efforcer, par une campagne de sensibilisation, de modifier les perceptions négatives qui entourent le vieillissement.

La recherche a pour objectif immédiat de fournir aux conseillers d’orientation professionnelle, aux conseillers financiers, aux conseillers de vie, aux leaders économiques régionaux et à d’autres acteurs les renseignements nécessaires pour mieux aider les entrepreneurs d’âge mûr. Les chercheurs espèrent que les répercussions plus vastes de cette étude sur le vieillissement et l’entrepreneuriat contribueront à améliorer les services actuels et le soutien fournis aux entrepreneurs plus âgés et encourager la création de nouveaux outils qui favoriseront la réussite de ces entrepreneurs, au bénéfice de l’économie canadienne dans son ensemble.

CERIC et le Sheridan Centre for Elder Research présenteront un webinaire gratuit d’une heure le mardi 18 septembre pour examiner plus en détail les résultats de la recherche et leurs conséquences. D’autres renseignements seront affichés sur le site ceric.ca/webinars.