Orientation professionnelle pour les étudiants étrangers au secondaire
Par Julie Doucette
Guider les étudiants vers des études postsecondaires et le marché du travail au Canada
Déménager au Canada peut s’avérer un énorme changement pour un élève de 16 ans. Sans ses parents, ses amis ou des proches, et souvent plongé dans un milieu où la langue et la culture lui sont étrangères, il peut trouver l’expérience redoutable. Or, chaque année, de nombreux étudiants étrangers quittent leur pays d’origine pour venir étudier au secondaire au Canada. Après avoir surmonté la barrière de la langue, et s’être adaptés au changement de climat et à la diversité culturelle, bon nombre d’entre eux tombent amoureux du Canada. Quels sont ensuite leurs objectifs? Certains d’entre eux veulent s’inscrire dans un établissement postsecondaire au Canada. D’autres souhaitent retourner dans leur pays d’origine pour achever leurs études, puis revenir au Canada. En tant que conseillers scolaires, comment pouvons-nous être les meilleurs guides pour eux et les aider à réaliser leurs objectifs?
Rester au Canada
Lorsque des étudiants me disent qu’ils souhaitent terminer leurs études secondaires au Canada et s’inscrire dans un établissement postsecondaire ici, je vérifie d’abord les exigences pour l’obtention du diplôme d’études secondaires. Nous devons examiner les crédits qu’ils ont acquis en 11e et 12e année pour s’assurer qu’ils respectent les exigences du Nouveau-Brunswick pour l’obtention du diplôme et qu’ils ont réussi les cours avec crédit obligatoires pour être admis dans l’établissement postsecondaire de leur choix.
Après la vérification des principales exigences, nous commençons à chercher le meilleur établissement postsecondaire. La recherche doit porter sur certains critères essentiels. Que veulent-ils étudier? Souhaitent-ils vivre en ville ou en région rurale? Quelles sont les exigences particulières requises pour les étudiants étrangers? Quels examens d’anglais doivent-ils réussir? S’ils doivent passer un examen d’anglais, c’est habituellement au début de la 12e année, pour que les conseillers à l’admission puissent consulter les résultats.
Bien que la langue ne pose pas de problème sur les sites Web canadiens, l’une de mes tâches consiste à aider les étudiants à s’y retrouver parmi les différences culturelles. La plupart des étudiants qui viennent me voir souhaitent déménager à Toronto ou à Vancouver, deux villes très cosmopolites. Je leur suggère habituellement de visiter les universités et les collèges à proximité afin de rencontrer les recruteurs d’étudiants étrangers et de mieux comprendre les volets académique, social et culturel de l’établissement. La réussite à long terme dépend d’une décision éclairée, qui est beaucoup plus importante que des décisions rapides fondées sur des premières impressions ou des idées préconçues.
Dans le cadre de mon travail, j’ai aussi l’occasion de travailler avec des étudiants qui ont déménagé avec leur famille. Lorsque des étudiants nouvellement arrivés au Canada viennent se renseigner sur les établissements postsecondaires, la question de la citoyenneté est toujours abordée. Même s’ils vivent au Nouveau-Brunswick depuis trois ans, s’ils ne sont pas résidents permanents ou citoyens canadiens, ils doivent payer des droits de scolarité pour étudiants étrangers. Cette mesure peut encourager certains étudiants à amorcer plus rapidement le processus de demande de citoyenneté. Je suggère habituellement aux étudiants de commencer à y penser en 10e année. Les exigences en matière de citoyenneté sont strictes : il faut entre autres un statut de résident permanent pendant au moins quatre ans, une évaluation des connaissances linguistiques en français ou en anglais, un test de connaissances sur le Canada ainsi qu’une vérification des antécédents criminels. Les renseignements sur la citoyenneté se trouvent sur le site cic.gc.ca/francais/citoyennete/devenir.asp. La période d’attente est également un point important à prendre en considération. Bien qu’elle puisse varier, elle est actuellement de douze mois.
Notons que bon nombre de ces éléments ne dépendent pas de nous. Il incombe à la famille de faire les démarches de demande de citoyenneté. Je pourrais avoir affaire à une famille dont les parents ne possèdent pas les compétences linguistiques nécessaires. Mais comme les étudiants doivent faire leur demande en même temps que leurs parents, la démarche pourrait s’avérer impossible. Certaines universités poussent les étudiants à obtenir leur citoyenneté afin que leurs droits de scolarité soient moins élevés. Je fais d’ailleurs porter mes efforts là-dessus pour que les étudiants puissent être admissibles aux bourses d’études. À la lecture des critères d’admissibilité de la plupart des bourses d’études, les étudiants constatent qu’ils doivent avoir la citoyenneté canadienne pour pouvoir faire une demande. Ils sont quand même admissibles aux prêts aux étudiants, mais peu d’entre eux peuvent payer un supplément de 8 500 $ par année pendant quatre ans. La plupart opteront alors pour un cours de niveau collégial, alors qu’ils rêvent d’aller à l’université. Je m’occupe de les conseiller au fil de ces étapes et face à de nombreuses autres situations stressantes.
Retourner dans leur pays d’origine
Lorsque des étudiants me disent vouloir retourner dans leur pays d’origine, pour ensuite revenir au Canada après leurs études postsecondaires, nous essayons ensemble de trouver un collège ou une université qui possède les mêmes standards que les établissements postsecondaires au Canada. Tout dépend du pays et du programme choisi. Je leur signale les programmes qui imposent un test de niveau national (comme la médecine ou le droit, par exemple), car nos comités d’accréditation canadiens pourraient ne pas accepter les autres diplômes. Même s’ils étaient infirmiers ou encore pompiers dans leur pays, on pourrait leur demander de passer l’évaluation finale ou de suivre quelques cours de niveau postsecondaire.
Dans mon travail de conseillère scolaire, la barrière de la langue constitue souvent un obstacle. Par exemple, si un étudiant veut retourner en Chine, il m’est difficile de faire moi-même des recherches, puisque la plupart des sites Web sont en chinois. Je n’ai également pas accès à l’historique des établissements. Sont-ils reconnus pour certains programmes? Sont-ils situés dans un endroit sûr et pratique? À combien s’élèvent les droits de scolarité? Combien en coûtera-t-il pour y vivre (logement, nourriture, déplacements)? En quoi les établissements répondent-ils le mieux aux besoins de l’étudiant? C’est là que l’étudiant doit agir. Bien que nous demandions aux étudiants de voir à tout le processus, certains ont besoin qu’on leur assigne des tâches pour y participer davantage. Ils doivent « faire leurs devoirs » et trouver des réponses aux questions susmentionnées, puis me communiquer les résultats de leurs recherches afin que nous puissions discuter de leurs options. À ce stade, je suggère toujours que les parents prennent part à la discussion, par mon entremise ou par l’étudiant. À 18 ans, il est difficile de prendre une décision qui paraît si définitive à propos des études postsecondaires.
Trouver du travail au Canada
Les perspectives d’emploi sont aussi à considérer. J’encourage les étudiants étrangers à rester au Nouveau-Brunswick et à consulter les profils des professions sur le site Éducation postsecondaire, formation et travail du gouvernement du Nouveau-Brunswick (www1.gnb.ca/0105/op-pp/Default.aspx). Je les mets également en relation avec des organismes internationaux locaux, comme l’Association multiculturelle du Grand Moncton (AMGM) ou d’autres organismes de sensibilisation de la collectivité. Les occasions de réseautage comme des formations en alternance au secondaire sont d’excellentes façons pour les étudiants de tisser des liens, d’acquérir de l’expérience et de développer une passion. Ainsi, comme ils n’ont peut-être pas encore leur statut de résident permanent pour décrocher un emploi à temps partiel, ils peuvent faire une première incursion dans le milieu du travail. De nombreux programmes de recherche dans les universités permettraient de présenter les étudiants étrangers aux organismes et de faire connaître les occasions d’emploi dans leur propre ville. C’est par un réseau de soutien solide que les étudiants peuvent obtenir le plus d’aide pour trouver un emploi. Avec des adultes qui peuvent les guider vers les bons organismes et les associations pertinentes, je suis convaincue qu’ils peuvent prendre une décision éclairée.
Au cours de mes années de service à titre de conseillère dans de grandes écoles secondaires, j’ai rencontré de nombreux étudiants étrangers. Certains venaient s’enrichir d’une expérience d’échange culturel unique en vivant au Canada dans une famille d’accueil pendant un semestre. D’autres venaient voir si le Canada pouvait être un endroit où ils aimeraient s’établir dans l’avenir. Et certains autres venaient avec l’intention de ne jamais retourner dans leur pays d’origine. Quelle que soit leur motivation, mon rôle consiste à aider tous ces étudiants à atteindre leurs objectifs de carrière et à réaliser leurs ambitions. Je suis honnête avec eux dès le départ. Je ne prétends pas tout connaître, mais en collaborant avec les étudiants, je m’engage à transmettre mes connaissances, à offrir des possibilités de réseautage et à veiller le mieux possible à ce que leurs parcours académique et culturel soient une réussite.
Julie Doucette est conseillère scolaire à Riverview, NB. Elle a été enseignante et occupe le poste de conseillère depuis 2005. Elle a principalement travaillé comme conseillère personnelle et d’orientation professionnelle au postsecondaire depuis 2012. Elle travaille actuellement dans une grande école secondaire