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Hélène Brisebois
Le processus de prise de décision de carrière est complexe. Après tout, il s’agit pour une personne de choisir une carrière qui va occuper une importante partie de sa vie. Si certains individus se fient surtout à leur rationalité, d’autres se laissent d’abord inspirer par leur intuition, tandis que d’autres encore se basent d’abord sur leurs émotions.
De nombreux chercheurs s’entendent en effet pour dire qu’il est important de tenir compte de la dimension rationnelle et consciente, de la dimension intuitive et inconsciente, ainsi que des émotions lors de la prise de décision de carrière (Baumgardner, 1977 ; Cournoyer et Lachance, 2018 ; Falardeau, 2007 ; Gelatt, 1989 ; Krieshok, 1998 ; Krieshok et al., 2009 ; Krieshok et al., 2011 ; Lecomte et Savard, 2008, 2009 ; Motl et al., 2018).
Le présent article concerne donc la combinaison de ces trois dimensions dans la prise de décision de carrière.
La dimension rationnelle et consciente
Lorsqu’il est question d’effectuer une prise de décision, plusieurs personnes se reconnaîtront dans l’emploi d’une méthode rationnelle et analytique. De nombreux aspects sont d’ailleurs à prendre en considération lorsque l’on se projette à long terme : « Est-ce que les revenus qui découleront de mon choix de carrière seront suffisants pour la vie à laquelle j’aspire? Qu’en est-il de la stabilité d’emploi? Quels sont les prérequis me permettant de m’engager dans cette direction? Combien de temps d’études cela requiert-il? Quels en seront les coûts? Quels sont les risques d’abandon de parcours étant donné ma réalité? ».
Une méthode rationnelle, logique et concrète de prise de décision de carrière amène ainsi la personne à dresser une correspondance entre ses caractéristiques personnelles et celles de la carrière. Cela peut se faire à l’aide de la communication verbale, du travail d’analyse rationnelle et des tests psychométriques (Krieshok, 1998 ; Krieshok et al., 2009 ; Krieshok et al., 2011 ; Motl et al., 2018). Toutefois, cette méthode ne tient pas compte des émotions et de la dimension intuitive.
Dimension intuitive et inconsciente
L’intuition et l’inconscient échappent à la conscience et au rationnel. Une prise de décision basée sur la dimension intuitive et inconsciente invite la personne à choisir une carrière significative qui mène à la réalisation de soi. Par ailleurs, le concept de flow (Collin et al., 2022) peut s’intégrer à cette dimension. Bref, l’intuition faciliterait la prise de décision, ce que soulignent plusieurs auteurs (Cournoyer et Lachance, 2018 ; Krieshok, 1998 ; Krieshok et al., 2009 ; Krieshok et al., 2011 ; Motl et al., 2018).
« Une prise de décision basée sur la dimension intuitive et inconsciente invite la personne à choisir une carrière significative qui mène à la réalisation de soi. »
Dans ce contexte, on peut se demander comment entrer en contact avec l’intuition et l’inconscient. Pour ce faire, Motl et al. (2018) suggèrent « l’écriture dans un journal personnel, l’imagerie guidée et le counseling » (p. 618).
Les émotions
Il est à noter que les émotions, qui contribuent également à la prise de décision, font partie de la dimension intuitive et inconsciente pour plusieurs auteurs. Selon Falardeau (2007), Prévost (2021) et Young et al. (2015), le contact avec les émotions faciliterait le processus de prise de décision.
Par exemple, plus l’émotion est intense, plus l’objet de cette émotion aurait de l’importance pour la personne, ce qui mettrait en lumière les éléments dont il faut tenir compte dans la prise de décision (Prévost, 2021). Les émotions positives favoriseraient la mobilisation et la compréhension des émotions faciliterait le processus de choix de carrière (Prévost, 2021).
Comment faciliter le contact avec les émotions dans ce cadre? Prévost (2021) suggère, entre autres, un travail d’exploration et de compréhension des émotions.
Interventions combinant les trois dimensions
En somme, la rationalité, l’intuition et les émotions sont trois dimensions pouvant de concert servir à faciliter la prise de décision de carrière. Toutefois, la question que ceci soulève est la suivante : comment intervenir afin de favoriser la combinaison de ces trois dimensions dans ce contexte? Selon mon étude, l’acte de création artistique et l’art-thérapie pourraient ouvrir une voie permettant de mettre ces trois dimensions en jeu (Brisebois, 2021). Il est cependant important de souligner que l’art-thérapie est une pratique particulière aux art-thérapeutes.
En ce qui concerne les approches permettant d’inclure ces trois dimensions dans le processus de prise de décision de carrière, j’aimerais aussi mentionner le modèle PIC (Prescreening, In-depth exploration et Choice) de Gati et Asher (2001), car celui-ci tient compte des méthodes rationnelles et intuitives de prise de décision (Gati et Kulcsar, 2021).
Une autre façon d’utiliser ces trois dimensions pour faciliter la prise de décision est de recourir à des activités qui permettent l’exploration de carrière et l’expérience de la prise de décision de carrière. C’est ce que suggèrent Krieshok et al. (2009) dans leur modèle trilatéral de prise de décision de carrière combinant le conscient, l’inconscient et l’engagement. Dans ce modèle, le système inconscient comprend l’intuition et les émotions, alors que l’engagement, qui relève de l’expérience de la prise de décision de carrière, comprend l’exploration de carrière et l’enrichissement.
Le bénévolat, le mentorat, les rencontres d’information et les expériences de travail sont aussi des expériences qui faciliteraient l’accès à l’engagement et, ainsi, à la prise de décision de carrière.
Conclusion
Bref, le rationnel permettrait de dresser une correspondance entre ses caractéristiques personnelles et celles de la carrière tout en tenant compte de sa réalité, l’intuition donnerait une direction vers la réalisation de soi et les émotions permettraient, entre autres, de mettre en lumière ce qui est important pour soi. En somme, les meilleures décisions sont prises lorsque l’on prend en considération ces trois parties de soi : le rationnel, l’intuition et les émotions.
Hélène Brisebois est conseillère d’orientation. Elle est titulaire d’une maîtrise en orientation de l’Université de Sherbrooke et d’un baccalauréat en psychologie de l’Université Concordia. Elle a plusieurs années d’expérience en tant qu’aide pédagogique au collégial et conseillère en emploi. De plus, elle a rédigé plusieurs articles professionnels en orientation et un mémoire qui traite de l’art-thérapie en orientation.
Sources supplémentaires
Lecomte, C. et Savard, R. (2008). Counseling de carrière : enjeu d’orientation et d’insertion professionnelle. [Recueil inédit]. Université de Sherbrooke, Faculté d’éducation.
Lecomte, C. et Savard, R. (2009). Counseling de carrière avec ses enjeux d’orientation, de réorientation, d’insertion, de réinsertion, d’adaptation et de réadaptation. [Recueil inédit]. Université de Sherbrooke, Faculté d’éducation.