par Marcelle Gingras et Carol St-Laurent

Au Québec comme à l’étranger, les difficultés d’orientation des clientèles jeunes constituent une problématique majeure pour les acteurs du monde de l’éducation et de la société en général (Conseil supérieur de l’Éducation, 2002; Ministère de l’Éducation du Québec, 2001, 2002a, 2003a; site Internet OCDE, Secrétariat du Sommet du Québec et de la jeunesse, 2000). En effet, depuis plusieurs années, les élèves du secondaire sont confrontés à divers problèmes tels que des taux élevés d’échecs et d’abandons scolaires, un manque de motivation et de persévérance aux études, de nombreux changements de programme d’études, un faible nombre d’inscriptions en formation professionnelle, une absence de projets d’avenir et de l’indécision vocationnelle.

Afin de contrer ces phénomènes complexes qui ont un impact certain sur le cheminement d’orientation des élèves et de pallier du même coup la disparition prochaine du programme d’études Éducation au choix de carrière, le ministère de l’Éducation du Québec (2002a) a mis en place le concept d’approche orientante qui se définit comme suit : « … une démarche concertée entre une équipe école et ses partenaires, dans le cadre de laquelle on fixe des objectifs et met en place des services (individuels et collectifs), des outils et des activités pédagogiques visant à accompagner l’élève dans le développement de son identité et dans son cheminement vocationnel » (p. 18); ces activités et services devant être nécessairement intégrés au plan de réussite et au projet éducatif d’un établissement scolaire.

D’ailleurs, le MEQ (2002a, p. 22) précise ainsi les principales lignes d’action contribuant à la mise en oeuvre d’une approche orientante à l’école :

  1. Intégration par le personnel enseignant d’éléments d’information et d’orientation dans les programmes disciplinaires à l’aide de mises en situation ou de références tirées du monde du travail, ou encore d’approches pédagogiques favorisant le développement de l’identité (par projets, coopération, etc.); collaboration entre les professionnels de l’information et de l’orientation et les enseignants pour ce qui est du développement des contenus;
  2. Planification d’activités de vie scolaire encadrées par des enseignants et des professionnels de l’information et de l’orientation et permettant aux élèves d’explorer le monde du travail et d’exercer des responsabilités (comité d’élèves, caisse scolaire, radio étudiante, coop jeunesse de services, visite de milieux de travail et d’établissements de formation, etc.); mise à contribution des parents et des entreprises de la communauté dans l’organisation de certaines de ces activités;
  3. Mise à la disposition des élèves des outils pertinents d’information (REPÈRES, Jobboom, etc.) et d’orientation; formation des élèves, offerte par du personnel professionnel ou du personnel de soutien en information scolaire et professionnelle, sur l’utilisation de ces outils;
  4. Aide (counselling) individuelle assurée par des professionnels de l’orientation (relation d’aide à l’exploration et au processus de décision; analyse du potentiel de l’élève au regard de ses valeurs, de ses intérêts; personnalisation de l’information scolaire et professionnelle).

L’approche orientante est donc une démarche novatrice qui, en amenant les élèves à développer des buts professionnels, vise à les aider à mieux se connaître, à être davantage motivés sur le plan scolaire et à établir des liens entre leur vécu à l’école et leurs rêves professionnels, ceci grâce à l’intégration de notions liées au développement de carrière dans les contenus disciplinaires et les autres activités de vie scolaire ainsi que par la collaboration de tous les partenaires impliqués dans leur environnement éducatif. De ce fait, l’approche orientante se base sur les théories du développement de carrière ainsi que sur les théories de l’apprentissage et de la motivation (Bujold et Gingras, 2000; Tardif, 1999; Viau, 1994). De même, elle s’intègre parfaitement bien au nouveau Programme de formation de l’école québécoise (MEQ, 2003a) parce qu’elle est directement associée à la triple mission de l’école (instruire, socialiser, qualifier) et aux différentes composantes de ce programme comme les domaines d’apprentissage, les compétences transversales et le domaine général de formation Orientation et entrepreneuriat dont l’intention éducative est justement « d’amener l’élève à entreprendre et à mener à terme des projets orientés vers la réalisation de soi et l’insertion dans la société adulte » (voir le schéma : Un modèle pour l’approche orientante).

L’approche orientante fait également partie du récent Programme des services éducatifs complémentaires (MEQ, 2002b) et, plus particulièrement, du programme offrant des services d’aide à l’élève permettant de l’accompagner dans son cheminement scolaire et dans sa démarche d’orientation scolaire et professionnelle, ainsi que dans la recherche de solutions aux difficultés qu’il rencontre. Aussi, dans le nouveau cadre de référence pour guider l’intervention auprès des élèves en difficulté d’apprentissage, le MEQ (2003b) mentionne particulièrement que l’approche orientante est l’un des moyens pour assurer le succès du plus grand nombre d’élèves possible.

Ajoutons à cela que l’approche orientante est un concept en pleine évolution qui s’adresse non seulement aux jeunes mais également aux adultes et que, par son développement et son implantation dans divers milieux [ http://gpsao.educ.usherbrooke.ca ] (Pelletier et collaborateurs, 2001, 2004), elle tente de répondre aux nombreux besoins de ces clientèles en matière d’orientation. En terminant, soulignons que dans une publication de l’OCDE traitant de nouvelles pistes de réflexion en lien avec l’orientation professionnelle, on affirme clairement qu’il s’agit là d’une approche prometteuse, notamment parce que de nos jours, il est de plus en plus question d’orientation tout au long de la vie.

 

Marcelle Gingras, c.o., Ph.D., est professeure à l’Université de Sherbrooke. Carol St-Laurent est enseignant à la polyvalente de Disraeli. Tous les deux sont membres du Groupe provincial de soutien pour une approche orientante à l’école (GPSAO). Site Internet : http://gpsao.recherche.usherbrooke.ca/

BIBLIOGRAPHIE

Bujold, C. et Gingras, M. (2000). Choix professionnel et développement de carrière : théories et recherches. Montréal : Gaétan Morin.

Conseil supérieur de l’Éducation (2002). Au collégial, l’orientation au cœur de la réussite. Québec : Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation du Québec (2001). L’exploration professionnelle au primaire : un outil pour la réussite. Le petit magazine des services complémentaires. Édition spéciale. Québec : Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation du Québec (2002a). À chacun son rêve. Pour favoriser la réussite, l’approche orientante. Québec : Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation du Québec (2002b). Les services éducatifs complémentaires : essentiels à la réussite. Québec : Direction de l’adaptation scolaire et des services complémentaires, Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation du Québec (2003a). Programme de formation de l’école québécoise. Version approuvée. Enseignement secondaire, premier cycle. Québec : Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation du Québec (2003b). Les difficultés d’apprentissage à l’école. Cadre de référence pour guider l’intervention. Québec : Gouvernement du Québec.

Pelletier, D. (sous la direction de) (2001). Pour une approche orientante de l’école québécoise. Sainte-Foy, Québec : Septembre éditeur.

Pelletier, D. et collaborateurs (2004). L’approche orientante : la clé de la réussite scolaire et professionnelle. Sainte-Foy, Québec : Septembre éditeur.

Secrétariat du Sommet du Québec et de la Jeunesse (2000). Déclaration commune faisant état des consensus dégagés par les participants et participantes associés au Sommet du Québec et de la jeunesse. Québec : Gouvernement du Québec.

Tardif, J. (1999). Le transfert des apprentissages. Montréal : Les Éditions Logiques.

Viau, R. (1994). La motivation en contexte scolaire. Saint-Laurent, Québec : Les Éditions du renouveau pédagogique.