par Michel F. Ouellet, c.o. & Camille Thériault, c.o.

La profession de conseiller d’orientation (c.o.) au Nouveau-Brunswick, un titre acquis ou à protéger? Un sujet qui a soulevé bien des discussions au sein de la collectivité francophone du domaine, mais qui semble demeurer une question en veilleuse.

Depuis la fin des années 60, la formation des conseillers d’orientation s’est concentrée à l’Université de Moncton. Ainsi, l’accès à la profession exigeait le diplôme de maîtrise. En fait, la profession devenait reconnue avant même d’avoir une histoire de pratique comme telle. Il semblait déjà que la population avait une certaine connaissance du rôle du conseiller d’orientation. Même les futurs conseillers à la maîtrise ne se questionnaient pas sur la reconnaissance de leur statut, sauf une fois sur le marché du travail.

Vers le milieu des années 80, l’Association francophone des conseillères et des conseillers d’orientation du Nouveau-Brunswick (AFCONB) vint renforcer cette perception. Au début, les membres provenaient presque essentiellement du milieu scolaire. D’ailleurs, la formation à l’Université de Moncton privilégiait presque uniquement ce milieu de pratique. Mais à partir du début des années 90, les membres de l’AFCONB, ainsi que les non-membres, exerçaient dorénavant leur profession dans des secteurs de pratique aussi diversifiés que les différents ministères provinciaux desservant la population, les collèges, les centres universitaires, les hôpitaux (ressources humaines), les centres de détention, les organismes du secteur privé, les agences non gouvernementales et communautaires de même que la pratique privée.

L’Association a réussi au fil des ans à établir et à maintenir un réseau d’échanges et de perfectionnement ainsi qu’à prendre position face à différentes problématiques du domaine. Cette situation a sans doute contribué à renforcir l’identité professionnelle du c.o. francophone au Nouveau-Brunswick. Néanmoins, il appert que cette identité n’est pas nécessairement partagée avec nos confrères de la communauté anglophone. Chez eux, l’appartenance à un regroupement n’exigerait pas une formation spécialisée. Le membership serait beaucoup plus large. Dès que quelqu’un est un praticien ou œuvre dans le domaine, il peut en faire partie. Chez les francophones, on favorise avant tout la formation spécifique dans le domaine de l’orientation (diplôme de maîtrise). Cette formation est un mariage entre le counseling et le développement de carrière. Ceci s’apparente davantage à ce qui se fait au Québec. Toutefois dans cette province, le titre est protégé contrairement au Nouveau-Brunswick.

S’il y a une volonté de vouloir protéger notre titre, ainsi que de réglementer la profession, il faudrait effectuer un rapprochement avec nos collègues anglophones. Sans quoi, il est peu probable qu’un gouvernement statue en faveur d’une telle législation dans une province officiellement bilingue. Certaines démarches ont déjà été entreprises en ce sens, mais nos philosophies semblent peu conciliables pour l’instant. Par exemple en milieu scolaire, l’approche anglophone reflète un peu plus le « Teaching Guidance », alors que chez les francophones, on adopte une approche à tendance « Counseling individuel et d’animation ou de travail de groupe », pour ne pas mentionner ici l’influence de l’approche A.D.V.P. (activation du développement vocationnel et professionnel).

Par ailleurs, la tendance actuelle veut qu’il y ait moins de démarcation entre les différents professionnels dans le domaine du développement de carrière. Si l’on veut régir la profession, il sera nécessaire de s’assurer que les champs de pratique de chacun soient mieux délimités. C’est d’ailleurs ce que tente d’établir, dans une certaine mesure, l’initiative canadienne sur le « Guide des compétences pour les professionnels en développement de carrière ».

Voici donc quelques questions importantes :

  • Comment concilier les buts de l’AFCONB avec cette vision pancanadienne?
  • Devrait-on d’abord partir d’une consultation auprès des conseillers d’orientation représentant tout les secteurs d’emploi où ils oeuvrent?
  • Pour régir notre pratique de conseiller d’orientation, ne faudrait-il pas souhaiter un rapprochement entre les professionnels des deux communautés linguistiques du Nouveau-Brunswick?
  • Les conseillers d’orientation devraient-ils être titulaires d’un titre protégé, comme les travailleurs sociaux, les psychologues et autres?
  • Si l’AFCONB n’existait pas, y aurait-il une identification à la profession de c.o. au Nouveau-Brunswick?

Nous espérons que ces quelques points de réflexion susciteront de vives discussions au sein de la collectivité.

 

Michel Francis Ouellet, originaire d’Edmundston, titulaire d’une maîtrise en éducation (mention orientation) de l’Université de Moncton. Conseiller d’orientation depuis plus de dix-sept ans, il possède une expérience variée en intervention et en formation auprès de différentes clientèles. En plus d’avoir déjà été président, il est membre actif de l’Association francophone des conseillers d’orientation du Nouveau-Brunswick (AFCONB). Il a participé à différentes activités ou comités touchant le développement de carrière sur les plans provincial et national. Il est également membre du comité consultatif pour le site OrientAction. Il est présentement conseiller d’orientation pour le ministère des Services familiaux et communautaires de la région d’Edmundston. Courriel : michel.ouellet@gnb.ca

Camille Thériault, originaire de Grande-Anse, titulaire d’une maîtrise en éducation (mention orientation) de l’Université de Moncton. Conseiller d’orientation dans les écoles secondaires depuis 1977, il a fait partie de comités provinciaux sur la création de programmes d’orientation en milieu scolaire pour le ministère de l’Éducation du Nouveau-Brunswick. Il a été membre fondateur de l’AFCONB, pour ensuite devenir président, vice-président et responsable de région. Il est aussi éditeur de l’Orient-Express, la publication de l’ Association. Il a déjà participé au comité consultatif pour le Guide canadien des compétences pour les professionnels en développement de carrière. Il travaille présentement à la Polyvalente Louis-Mailloux de Caraquet.