Choisir une carrière en relation d’aide lorsqu’on a un trouble de santé mentale
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25 juin, 2013par Valerie Pringle
Ma fille Catherine et moi soutenons toutes les deux la cause de la santé mentale, la lutte pour l’obtention de meilleurs soins et l’avancement de la recherche sur la santé mentale et contre les préjugés.
Notre intérêt a été stimulé il y a quelques années lorsque nous avons participé à la campagne de sensibilisation « Transformer des vies » du Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) à Toronto. Inspirés par Michael Wilson, mon mari et moi avions fait un don au CAMH et je m’étais jointe au cabinet de la campagne et au conseil d’administration de la Fondation, car nous croyions tous les deux qu’il s’agissait d’une question de justice sociale. Lorsque la Fondation m’a demandé si j’accepterais de figurer sur des affiches publicitaires qui seraient distribuées partout à Toronto, je n’ai pas hésité. J’ai alors décidé de raconter l’histoire de Catherine, avec sa permission bien entendu.
Souffrant d’un trouble panique et anxieux, Catherine était prête à en parler ouvertement. Au début, nous avons un peu hésité à participer à cette campagne publicitaire, car nous pensions que Catherine n’était pas assez malade et que son cas n’était pas aussi grave ou dramatique que ceux des autres annonces qui relataient des expériences de suicide et de schizophrénie. Néanmoins, une fois l’annonce publiée, notre histoire a suscité des réactions; plusieurs personnes nous ont remerciées pour notre franchise et voulaient nous parler de leur propre expérience. Ayant constaté de première main les besoins criants de sensibilisation en matière de santé mentale, nous nous sommes dit que la chose la plus importante pour nous était de consacrer du temps à cette cause pour attirer l’attention sur cette question. Depuis, nous avons présenté à de nombreuses conférences.
Selon moi, notre annonce a touché les gens en partie parce qu’il s’agissait d’un parent qui s’inquiétait pour son enfant malade et qui cherchait des réponses. À bien des égards, la maladie mentale est une maladie affectant les jeunes, car 70 % des troubles psychiatriques émergent à l’adolescence. C’est le type de maladie qui se manifeste le plus fréquemment dans ce groupe d’âge.
J’ai appris beaucoup de choses sur la condition de Catherine en l’écoutant raconter l’expérience d’une personne vivant avec un trouble panique et anxieux. Avec le recul, elle indique que ses troubles se sont d’abord manifestés à l’enfance et ont empiré tout au long de ses études secondaires et universitaires, jusqu’à atteindre leur apogée lorsqu’elle a commencé son premier emploi. Elle travaillait dans le domaine des communications dans le cadre d’une campagne politique. Se sentant complètement dépassée par les événements et anxieuse, elle a commencé à subir de plus en plus fréquemment des effets physiques tels que des crises de larmes et des attaques de panique. En raison du poste qu’elle occupait au sein de la campagne, on lui avait remis un BlackBerry; lorsqu’elle recevait des courriels le soir, elle paniquait. Lorsqu’elle entrait dans un tel état de panique et d’anxiété, il était impossible de la calmer en lui disant de ne pas s’en faire ou que personne ne s’attendait à ce qu’elle ait toutes les réponses. Les attaques de panique se sont aggravées jusqu’à un dimanche après-midi où elle s’est retrouvée roulée en boule sur son lit, tendue et incapable d’arrêter de pleurer. Je crois bien qu’avant ce point crucial, je n’étais pas consciente qu’elle était malade, qu’elle souffrait et qu’elle avait besoin d’aide.
Contrairement à bien des jeunes, elle a été capable d’obtenir de l’aide. Elle a un médecin de famille fantastique qui lui a prescrit des médicaments contre l’anxiété et qui l’a accompagnée dans sa réflexion menant à la décision difficile de commencer à prendre des antidépresseurs (ce qu’elle ne voulait pas faire au départ); elle a aussi trouvé un excellent spécialiste en thérapie cognitivo-comportementale qui l’a beaucoup aidée en lui expliquant la maladie dont elle souffre et les effets physiques qui en découlent.
La suite de l’histoire intéressera particulièrement les personnes qui travaillent dans le secteur du développement de carrière. Au début de son traitement, Catherine s’est absentée du travail pendant plusieurs semaines et était restée vague quant à sa maladie. La veille de son retour au travail, elle a demandé à son père ce qu’elle devait dire aux gens qui lui demanderaient où elle était, et il lui a répondu : « Dis la vérité. »
Le jour de son retour au travail, elle était encore assez fragile et sa grande amie l’a énormément aidée (c’était trop difficile pour moi) en l’appelant pour lui dire « Lève-toi, prends une douche, puis appelle-moi », « Habille-toi, puis appelle-moi », « Monte dans ta voiture et je vais t’attendre à l’entrée ». À son arrivée au travail ce matin-là, elle est d’abord allée rencontrer son patron. Il lui a demandé comment elle allait et ce qui s’était passé, et Catherine lui a dit qu’elle souffrait d’un trouble panique et anxieux et qu’elle était allée chercher de l’aide.
Sa réponse a fait toute la différence.
« Ma femme a la même chose », lui a-t-il dit, et il a immédiatement été d’un grand soutien. Comme l’a indiqué Catherine, « À partir de ce moment, j’ai senti que je n’avais jamais à cacher la vérité et que c’était bien mieux que tout le monde sache ce qui en était. De toute évidence, n’importe qui peut en souffrir, alors pourquoi ne pas en parler ouvertement? » Le patron de Catherine n’a pas dit à cette jeune femme dans la vingtaine en début de carrière de réviser ses objectifs à la baisse, qu’il pouvait être beaucoup trop stressant pour elle de s’occuper des communications en pleine campagne électorale. Il ne lui a pas suggéré de modifier ses espoirs et ses rêves.
Catherine a franchi une étape importante en divulguant sa condition à ses collègues de travail et cela illustre bien comment les jeunes souffrant de nombreuses maladies mentales peuvent faire leur chemin dans la vie, pourvu qu’ils bénéficient des soins, des traitements et d’un soutien appropriés.
Par la suite, Catherine a obtenu un MBA, s’est mariée et travaille maintenant en communications dans le secteur des soins de santé. Nous sommes très fiers d’elle et de tout ce qu’elle accomplit.
On fait souvent des blagues à propos des « congés de santé mentale », mais chaque jour, un demi-million de Canadiens s’absentent du travail en raison de troubles mentaux. Cela représente des frais de 51 milliards de dollars par année. Les employeurs pourraient et devraient aborder les questions de santé mentale de façon plus proactive, à la fois parce qu’il s’agit d’une bonne pratique commerciale et parce qu’ils peuvent ainsi contribuer à créer une société plus empathique et plus saine. Je crois que par sa réaction, le patron de Catherine l’a vraiment aidée à se sentir à l’aise et à faire preuve de franchise.
Certaines entreprises, Bell étant un exemple digne de mention, jouent un rôle de premier plan pour soutenir cette cause, en développant des pratiques d’excellence en matière de santé mentale au travail.
Catherine et moi aimerions mettre quatre points en évidence:
Premièrement, il n’y a pas de honte à y avoir. Débarrassez-vous du sentiment de honte. Je n’ai pas honte de Catherine et elle n’a pas honte de sa maladie mentale.
Deuxièmement, si vous avez besoin d’aide, faites le nécessaire : demandez de l’aide, cherchez quels sont les services offerts. Il peut être encore difficile d’obtenir des soins, mais la situation s’améliore et il faut continuer à faire des demandes, car c’est le seul moyen de s’assurer que toutes les personnes qui en ont besoin obtiennent l’aide requise.
Troisièmement, il y a de l’espoir. Les traitements fonctionnent. Il y a tellement de recherches prometteuses sur le cerveau et sur les maladies mentales que les bonnes nouvelles ne manquent pas.
Quatrièmement, vous n’êtes pas seul. La maladie mentale touche pratiquement tout le monde dans ce pays et nous devons faire front commun pour faire tomber les préjugés et assurer que tous les Canadiens obtiennent les soins dont ils ont besoin.
Valerie Pringle soutient la cause de la santé mentale. Elle est membre des conseils d’administration de la Fondation du Centre de toxicomanie et de santé mentale et de l’Ontario Brain Institute, et participe aux activités d’autres organismes sans but lucratif. Elle a été nommée membre de l’Ordre du Canada en 2006 pour sa contribution au domaine des communications et son travail de bénévole.
Vous voulez en savoir plus? Valerie Pringle sera conférencière d’honneur au congrès national en développement de carrière Cannexus, du 20 au 22 janvier 2014 à Ottawa. Elle parlera de son propre cheminement professionnel en télécommunications et de son expérience comme militante en faveur de meilleurs traitements pour les gens aux prises avec des problèmes de santé mentale et contre les préjugés qui les empêchent de demander de l’aide.