Un rapport préliminaire rédigé par la Société de recherche sociale appliquée (SRSA) dans le cadre d’un projet de recherche financé par le CERIC – et dont l’objectif est de fournir des éclaircissements sur le moment, l’endroit et la démarche que choisissent les jeunes pour élaborer leurs objectifs professionnels – est désormais disponible. Ce rapport intitulé The role of career education on students’ education choices and postsecondary outcomes: Theoretical and evidence base preparation (en anglais) présente une revue approfondie de la documentation tirée principalement d’un rapport non publié financé par Emploi et Développement social Canada. La SRSA a mis à jour les travaux faits antérieurement afin de documenter l’analyse réalisée dans le cadre du projet de recherche du CERIC, soit une exploration empirique des effets à long terme des interventions en éducation au choix de carrière sur 7 000 jeunes Canadiens provenant de trois provinces.

Pour assurer l’élaboration des modèles analytiques les plus appropriés et qui reflètent les dernières données probantes concernant les stratégies de développement de carrière efficaces pour les jeunes, la SRSA a étudié la documentation existante. Son but était d’examiner (a) les étapes de la prise de décisions chez les jeunes et les principaux facteurs d’influence à chaque étape, (b) le rôle de l’éducation au choix de carrière pour soutenir les décisions concernant les études postsecondaires et (c) les types de ressources en éducation au choix de carrière disponibles, tout en tenant compte des forces et des faiblesses de ces sources.

Ce rapport comporte quatre parties :

  • Premièrement, le contexte qui soutient les décisions relatives au développement de carrière au 21esiècle y est abordé : quels sont les facteurs qui influencent les demandes de renseignements et d’aide concernant des choix professionnels chez les jeunes Canadiens et, plus particulièrement, quelle est la réalité des jeunes qui sont ni en emploi, ni aux études, ni en formation, et des débutants en mal d’insertion;
  • Deuxièmement, le rapport fournit un examen des théories et des modèles traditionnels que l’on trouve dans la documentation sur le développement de carrière et la prise de décisions en matière d’éducation – notamment les enseignements tirés de l’économie comportementale – chez les jeunes. Cette section porte sur la mesure dans laquelle il existe un consensus dans la documentation concernant les âges et les étapes du processus de prise de décisions relatives à la carrière chez les jeunes au Canada;
  • Troisièmement, le rapport met l’accent sur les connaissances acquises concernant l’insertion de l’éducation au choix de carrière et des ressources dans le processus décisionnel global en matière de carrière chez les jeunes dans les systèmes scolaires de la maternelle à la 5eannée du secondaire et au niveau postsecondaire, et notamment sur le rôle de l’information sur le marché du travail et le rôle des intermédiaires;
  • Finalement, le rapport pave la voie pour la formulation de recommandations qui reposent sur des données probantes pour la prochaine analyse empirique qui soutient les jeunes et les personnes qui les influencent (parents, conseillers et pairs) alors qu’ils prennent des décisions concernant leur éducation postsecondaire et leurs choix de carrière.

Le catalyseur du projet est le suivant : bien que le Canada soit un chef de file mondial en éducation, selon de nombreux indicateurs du rendement scolaire, de la maternelle à la 5e secondaire (OCDE, 2019), et qu’il affiche l’un des plus hauts taux de réussite au niveau postsecondaire de tous les pays de l’OCDE, il y a encore une proportion importante de jeunes qui quittent le système d’éducation formel avant d’être suffisamment préparés pour la transition vers le monde du travail. Cet échec de la transition peut prendre de nombreuses formes, de l’étudiant qui quitte l’école secondaire avant d’avoir obtenu son diplôme, au diplômé de niveau postsecondaire qui peine à démontrer les capacités exigées par les employeurs.

Le projet a pour objectif d’explorer la principale raison de ce qui précède : soit que les étudiants canadiens quittent habituellement le système d’éducation avec un bagage en matière de choix de carrière déficient et une expérience personnelle insuffisante sur le marché du travail. Si un étudiant quitte l’école secondaire sans avoir une idée de base de la personne qu’il souhaite devenir et qu’il ne possède pas l’information nécessaire concernant les possibilités pertinentes qui lui sont offertes – ou qu’il possède de l’information erronée –, il ne lui sera pas possible de bien planifier son avenir et il fera de mauvais choix. Le risque qu’il doive se contenter d’un emploi précaire ou qu’il aboutisse au chômage peut augmenter. La situation peut devenir chronique s’il passe de périodes d’emploi en périodes de recyclage mal ciblé et en périodes de chômage.

Pour résoudre de tels problèmes, les éducateurs et les décideurs en matière de politiques et de programmes voudront probablement élaborer des mesures qui ciblent les jeunes à différentes étapes de leur éducation et à leurs débuts sur le marché du travail. Des outils bien conçus pour soutenir les choix professionnels seraient idéalement fournis de façon à aider les jeunes à devenir des consommateurs avertis en matière d’éducation, qui savent quand et comment investir dans leur avenir pour générer des répercussions optimales dans leur vie future. Une telle optimisation et une telle adaptation de l’éducation au choix de carrière devraient être fondées sur les meilleures données probantes concernant la manière dont de telles interventions peuvent s’inscrire dans le processus décisionnel chez les jeunes, et c’est à cet égard que le projet dont il est question ici entend faire une contribution.

Ce projet utilisera de nouvelles données pour examiner la mesure dans laquelle les interventions précoces en éducation mises à l’essai dans les programmes Advancement Via Individual Determination (BC AVID) en Colombie-Britannique et Un avenir à découvrir (UAD) influencent l’évolution des décisions en matière d’éducation au choix de carrière des élèves du secondaire. Dans le cadre de ce projet, deux sources abondantes de données longitudinales créées grâce à la mise en relation de dossiers scolaires et de sondages menés auprès de jeunes et de parents ont été utilisées pour examiner les aspirations professionnelles d’étudiants et leurs décisions relatives à leur carrière pendant une période de cinq ans à compter de leur 10e année.

À partir de la revue documentaire, les chercheurs de la SRSA ont conclu que la recherche sur la démarche du choix de carrière chez les jeunes en est à ses débuts. Il existe peu de données probantes concernant les effets de l’éducation au choix de carrière dans l’évolution à long terme des décisions des jeunes relativement à leur carrière. Les données probantes ne permettent pas non plus d’évaluer dans quelle mesure l’éducation au choix de carrière aide tout particulièrement les jeunes qui sont vulnérables et qui sont confrontés à de multiples obstacles lorsqu’ils entrent sur le marché du travail.

Le rapport résume les répercussions de cet examen pour le projet :

  • La théorie sociale cognitive de l’orientation est un important paradigme à partir duquel il est possible d’examiner le développement de carrière parce qu’elle fait la lumière sur l’importance des facteurs contextuels et environnementaux. Par exemple, les parents, les conseillers d’orientation, les professeurs et les pairs constituent tous des groupes qui peuvent influencer les décisions des jeunes relativement à leur carrière.
  • En raison des tendances et des préjugés comportementaux, les décisions relatives à la carrière ne sont pas toujours rationnelles, même si des outils et des renseignements en éducation au choix de carrière appropriés sont disponibles. L’analyse empirique devrait tenir compte des effets de ce qui précède dans l’interprétation des résultats.
  • L’âge ou les étapes du développement de carrière sont importants en ce qu’ils permettent de déterminer la maturité du cerveau, qui joue sur la prise de décisions.
  • Des facteurs institutionnels et sociaux influencent aussi le processus décisionnel.
  • Des modèles à variables multiples et des modèles longitudinaux pourraient être utiles à l’analyse. Par contre, l’objectif devrait être de tirer avantage, autant que possible, des essais de contrôle aléatoires intégrés dans les ensembles de données lors de l’évaluation des effets à long terme de l’éducation au choix de carrière sur l’élaboration d’un plan de carrière.

La SRSA est un organisme de recherche sans but lucratif, créé dans le but précis d’élaborer, de mettre à l’essai sur le terrain et d’évaluer rigoureusement de nouveaux programmes. Sa mission, qui comporte deux volets, consiste à aider les décideurs et les intervenants à déterminer les politiques et programmes qui améliorent le bien-être de tous les Canadiens

Le rapport final devrait être prêt dans les prochains mois.