man doing yoga at homeAutomne 2020

Le potentiel de la mindfulness en développement de carrière

Un outil flexible permettant aux individus de se connecter à leurs intérêts et à leurs valeurs

Gabrielle Beaupré et Geneviève Taylor

author headshotsMaya vient d’entamer sa deuxième session comme étudiante au baccalauréat en comptabilité. Elle est déçue de ses résultats scolaires et elle commence à douter de son choix de carrière. Elle se demande si elle sera assez performante pour éventuellement obtenir le titre professionnel qu’elle visait initialement. Elle s’inquiète beaucoup et ressasse souvent des pensées négatives. Depuis peu, elle éprouve des difficultés de sommeil et de concentration et ne voit plus ses amis autant qu’avant. Finalement, elle manque d’énergie pour toutes ses activités, incluant ses études et son travail à temps partiel.

Cette situation illustre bien les enjeux de santé psychologique présents chez les étudiants universitaires, alors que la proportion d’étudiants vivant du stress, de l’anxiété et de la détresse émotionnelle ne cesse d’augmenter (UEQ, 2019). À cela s’ajoutent les questionnements liés à la carrière, au choix de programme ou au cheminement professionnel, fréquents chez la population étudiante. Les résultats d’une enquête pancanadienne récente avancent que près de 40% des étudiants postsecondaires ont de la difficulté à gérer leurs problèmes liés à la carrière (ACHA, 2019). Ils vivent également de l’anxiété causée par un marché du travail de plus en plus instable et incertain et par une multitude d’opportunités, ce qui peut induire un sentiment de « paralysie » et d’insatisfaction chronique (Schwartz, 2004). Malheureusement, les professionnels des services d’aide aux étudiants en milieu universitaire dénoncent le manque de temps et de ressources pour accompagner adéquatement les étudiants (ASEUCC, 2013). Ils doivent donc compter sur de nouvelles approches pour renforcer l’autodétermination des étudiants dans leur réflexion sur l’avenir.

La mindfulness comme super-pouvoir 

La mindfluness (présence attentive ou pleine conscience) apparaît comme un super-pouvoir pouvant aider les étudiants postsecondaires à faire face aux enjeux reliés à la carrière. La mindulness décrit généralement l’état de conscience d’une personne qui porte délibérément son attention sur son expérience (interne et externe), dans l’instant présent, sans jugement et avec acceptation (Kabat-Zin, 2003). Concrètement, une personne «mindful» a tendance à être plus attentive à ses pensées, ses émotions ou ses sensations, et ce avec acceptation et bienveillance. Comme un muscle que l’on exerce, la mindfulness peut être développée par le biais de diverses interventions prenant la forme de pratique personnelle ou de méditation guidées:

  • exercices d’attention dirigée sur différents objets (respiration, sensations corporelles, cinq sens) ;
  • exercices de l’attention dirigée sur les mouvements du corps ;
  • exercices de compassion pour soi et pour les autres.
L’impact de la mindfulness sur le bien-être

Plusieurs études scientifiques ont démontré les liens entre la mindfulness et différents aspects du bien-être. D’abord, la mindfulness aide à développer la souplesse psychologique, un facteur important pour la santé mentale, permettant à l’individu de s’adapter à un changement ou une situation difficile (Kashdan & Rottenberg, 2010). Avec la COVID-19, certains auteurs se sont intéressés aux facteurs de résilience en contexte de pandémie. Ils ont décrit la mindfulness comme un mécanisme d’adaptation aidant les gens à être plus résilients face à l’incertitude (Polizzi, Lynn et Perry, 2020). En effet, la mindfulness encourage l’individu à se concentrer sur l’instant présent, ce qui atténue les ruminations du passé et l’anticipation négative du futur.  De plus, les interventions basées sur la mindfulness permettraient de réduire le stress et les symptômes dépressifs des étudiants universitaires et les clients en orientation (Piot, 2020; Grégoire et al., 2016). Enfin, la mindfulness aiderait les étudiants à réguler leurs émotions lorsqu’ils traversent une impasse décisionnelle liée à leurs objectifs de carrière (Marion-Jetten, Taylor et Schattke, soumis).

« La mindfulness aide à développer la souplesse psychologique, un facteur important pour la santé mentale, permettant à l’individu de s’adapter à un changement ou une situation difficile. »

La mindfulness et la carrière

Au-delà des bienfaits sur le bien-être et sur la régulation des émotions, comment la mindfulness peut-elle agir comme super-pouvoir relié à la carrière?

Mieux se connaître

Premièrement, la mindfulness peut aider une personne à mieux distinguer ses valeurs fondamentales et les activités qui l’intéressent vraiment des attentes de la société ou de ses proches (Schattke, Taylor, & Marion-Jetten, 2020; Strick et Papies, 2017). Sachant qu’il existe plusieurs moyens de mieux se connaître, la mindfulness apparaît comme un outil supplémentaire. Elle améliore la capacité d’une personne à porter attention à tous les aspects de son expérience, tout en acceptant ce qui émerge au lieu d’essayer d’éviter (Carlson, 2013).

Par exemple, en portant attention à son corps, Maya pourrait réaliser qu’elle éprouve souvent des tensions dans les épaules lorsqu’elle pense aux examens pour devenir comptable. Elle pourrait aussi se rendre compte qu’elle a des pensées négatives  durant ces moments et les observer pour voir ce que ça peut lui indiquer. En même temps, elle remarquerait qu’elle se sent ouverte et légère lorsqu’elle donne une présentation orale. Ces informations s’avèreront très utiles pour choisir le contexte de travail dans lequel elle sera satisfaite en tant que comptable.

Se fixer des buts de carrières autoconcordants

Deuxièmement, la mindfulness aiderait l’individu à se fixer des buts de carrière en lien avec ses véritables valeurs et intérêts. C’est ce qu’on appelle l’« autoconcordance des buts ». Ceux-ci naissent d’une motivation autodéterminée  et sont essentiels pour le bien-être de l’individu (Deci, Ryan, Schultz et Niemiec, 2015). En effet, les résultats d’une série d’études longitudinales ont démontré que choisir un programme d’études en lien avec ses intérêts et ses valeurs peut diminuer la détresse psychologique, augmenter les résultats académiques et diminuer le risque de décrochage scolaire (Taylor et al., 2014).

En pratiquant la mindfulness, Maya pourrait réaliser qu’elle se préoccupe souvent de ce que les autres diraient si elle abandonnait son programme et si elle ne devenait pas comptable. Elle pourrait alors observer, sans jugement, que sa motivation envers son objectif de carrière n’est peut-être pas aussi autodéterminée qu’elle le croyait. Tel que mentionné précédemment, Maya pourrait aussi prendre conscience de ses véritables valeurs et de ce qui l’intéresse réellement. Cela pourrait l’amener à mieux préciser son objectif de carrière, et éventuellement s’engager dans un but de carrière plus autoconcordant.

Développer sa créativité

Finalement, la mindfulness favorise la créativité (Lebuda et al., 2016) sous toutes ses formes, ce qui permet à l’inidivu d’imaginer des possibilités nouvelles et innovantes lorsqu’il est confronté à des obstacles. Les études à ce sujet ont démontré que les gens trouvaient plus facilement des solutions à un problème lorsqu’ils avaient médité avant (Colzato et al. 2014 : Ding et al. 2015).

À ce titre, la mindfulness pourrait aider Maya à trouver des opportunités inédites pour surmonter les embuches liées à sa carrière.

Aider les étudiants universitaires grâce à la mindfulness

Comment les professionnels en développement de carrière peuvent-ils cultiver la mindfulness des étudiants universitaires ? D’abord, ils peuvent les encourager et les accompagner à observer et à reconnaître ce qu’ils vivent dans leur quotidien (pensées récurrentes, sensations physiques, émotions) et à accepter ces expériences avec bienveillance. Les étudiants universitaires pourraient capitaliser sur le développement de la mindfulness comme habileté, d’autant plus que sa pratique est adaptée et accessible malgré leur horaire chargé. Plus que jamais, l’orientation professionnelle apparaît comme un processus continu tout au long de la vie, et non comme une étape fixe temporellement. Ainsi, la mindfulness représente une habileté « évolutive », étant donné qu’elle se développe au fur et à mesure que l’étudiant évolue en interaction avec le marché du travail.

La mindfulness comme superpouvoir lié à la carrière est donc un outil supplémentaire permettant d’atténuer les émotions négatives généralement associées aux questionnements à ce niveau. Puisqu’elle favorise un meilleur accès à ses intérêts à ses valeurs, à ses pensées récurrentes, à ses sensations et à ses émotions, elle permet à l’étudiant de faire des choix cohérents et de mieux s’adapter aux obstacles, même après avoir gradué.

Gabrielle Beaupré, M.A., c.o, est étudiante au doctorat en éducation à l’UQAM. Elle s’intéresse à la présence attentive, à la motivation envers les buts de carrière et au bien-être auprès des étudiants universitaires. Son projet doctoral est financé par les Fonds de Recherche du Québec Société et Culture.

Geneviève Taylor, Ph.D., est professeure en counseling de carrière au département d’éducation et pédagogie à l’Université du Québec à Montréal, ainsi que chercheure au sein du Groupe de recherche et d’intervention sur la présence attentive (GRIPA). Ses recherches portent sur le rôle de la présence attentive et les processus motivationnels reliés à la carrière.

Références

American College Health Association. (2019). American College Health Association-National College Health Assessment II: Canadian Reference Group. Hanover : American College Health Association.

Association des services étudiants des universités et collèges du Canada (ASEUCC). (2013). Post-Secondary Student Mental Health: Guide to a Systemic Approach.

Carlson, E. N. (2013). Overcoming the Barriers to Self-Knowledge : Mindfulness as a Path to Seeing Yourself as You Really Are. Perspectives on Psychological Science, 8(2), 173‑186.

Colzato, L.S., Szapora, A., Lippelt, D. et Hommel, B. (2014). Prior meditation practice modulates performance and strategy use in convergent- and divergent-thinking problem. Mindfulness. http://dx.doi.org/10.1007/s12671-014-0352-9 (online publication ahead of print).

Deci, E. L., Ryan, R. M., Schultz, P. P. et Niemiec, C. P. (2015). Being aware and functioning fully. Handbook of mindfulness: Theory, research, and practice, 112-129.

Ding, X., Tang, Y., Deng, Y., Tang, R., et Posner, M.I. (2015). Mood and personality predict improvement in creativity due to meditation training. Learning and Individual Differences, 37, 217–221.

Grégoire, S., Lachance, L. et Richer, L. (2016). La présence attentive, mindfulness. État des connaissances empiriques et pratiques. Montréal : Presses de l’Université du Québec.

Kabat-Zinn, J. (2003). Mindfulness-based interventions in context : Past, present, and future. Clinical psychology: Science and practice, 10(2), 144–156.

Kashdan, T. B. et Rottenberg, J. (2010). Psychological flexibility as a fundamental aspect of health. Clinical Psychology Review30(7), 865-878.

Lebuda, I., Zabelina, D. L., & Karwowski, M. (2016). Mind full of ideas: A meta-analysis of the mindfulness–creativity link. Personality and Individual Differences93, 22-26.

Piot, F. (2020). Projet Oreka : essai randomisé contrôlé destiné à évaluer l’impact d’ateliers issus de l’approche d’acceptation et d’engagement sur la souplesse psychologique, le bien-être psychologique et l’espoir chez des individus confrontés à une impasse professionnelle [The Oreka Project : Randomised controlled trial to evaluate the impact of workshops based on Acceptance-Commitment Therapy on psychological flexibility, psychological well-being, and hope among people experiencing a professional impasse]. [Unpublished doctoral dissertation]. Université du Québec à Montréal.

Polizzi, C., Lynn, S. J., & Perry, A. (2020). Stress and Coping in the Time of COVID-19: Pathways to Resilience and Recovery. Clinical Neuropsychiatry17(2).

Schwartz, B. (2004). The paradox of choice : Why more is less (Vol. xi). HarperCollins Publishers.

Strick, M. et Papies, E. K. (2017). A Brief Mindfulness Exercise Promotes the Correspondence Between the Implicit Affiliation Motive and Goal Setting. Personality and Social Psychology Bulletin, 43(5), 623‑637.

Taylor, G., Jungert, T., Mageau, G. A., Schattke, K., Dedic, H., Rosenfield, S. et Koestner, R. (2014). A self-determination theory approach to predicting school achievement over time : The unique role of intrinsic motivation. Contemporary Educational Psychology, 39(4), 342‑358. https://doi.org/10.1016/j.cedpsych.2014.08.002

Union étudiante du Québec. (2019). Enquête « sous ta façade » : enquête panquébécoise sur la santé psychologique étudiante.

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colleagues brainstorming at whiteboard in officeAutomne 2020

Soutenir le développement de carrière des personnes autochtones, noires et de couleur

Il est essentiel que les professionnels de la carrière comprennent les répercussions du racisme systémique sur les parcours professionnels et scolaires de leurs clients afin de les aider à réussir

Jodi Tingling

Au Canada, le racisme systémique a touché les personnes autochtones, noires et de couleur (PANDC) et a eu une incidence négative sur le parcours professionnel d’un grand nombre d’entre elles. Les intervenants en développement de carrière doivent bien comprendre les effets négatifs du racisme systémique sur leurs clients et bien évaluer comment ils peuvent contribuer au démantèlement d’un système parfois oppressif afin de s’assurer que chacun a la possibilité de réussir sa vie professionnelle.

Lutter contre l’inégalité et ses conséquences

Le concept de l’équité repose sur la justice, l’impartialité et l’égalité des chances pour tous et non seulement pour un groupe en particulier. Il est important de bien comprendre les défis que les PANDC doivent relever pour déterminer leur véritable parcours professionnel et ses répercussions. La discrimination dans le système d’éducation, les méthodes de recrutement partiales, les micro-agressions sur le lieu de travail et l’absence de nominations à des postes de direction font partie de ces défis qui peuvent avoir une incidence négative sur le parcours professionnel des PANDC.

En tant que professionnel de la carrière, sachez que les PANDC peuvent devoir composer avec des blessures du racisme qui peuvent avoir un impact sur leur carrière et sur de nombreux autres aspects de leur vie. Les blessures du racisme entraînent une détresse psychologique et physique et peuvent être attribuées à différentes expériences associées à la race.

Pour lutter contre l’inégalité et éliminer ses conséquences, il faut comprendre le contexte dans lequel les PANDC mènent leur carrière. Il est important d’être conscient que les normes de professionnalisme sont ancrées dans la culture de la suprématie blanche et servent à opprimer les personnes autochtones, noires et de couleur. Selon deux organisateurs de terrain et universitaires, Tema Okun et Keith Jones, le suprématisme blanc existe dans de nombreuses organisations et a des ramifications sur le lieu de travail. Ainsi, les attentes en matière de comportements et d’attitudes sont codifiées selon les conventions des Blancs. Il est ici notamment question du perfectionnisme, des normes en matière de coiffure, de vêtements et de modèles de communication et des attentes générales telles que l’adhésion à la « culture d’entreprise ». Ces attentes amplifient les environnements de travail toxiques et nuisent à la carrière des PANDC.

« En tant que professionnel de la carrière, sachez que les PANDC peuvent devoir composer avec des blessures du racisme qui peuvent avoir un impact sur leur carrière et sur de nombreux autres aspects de leur vie. »

Pour assurer la réussite de votre stratégie visant à améliorer le parcours de carrière des PANDC, vous devez d’abord devenir l’allié de vos clients pour les appuyer et contribuer au démantèlement d’un système qui les désavantage. Pour ce faire, vous devez remettre en question le système et offrir aux PANDC un espace où elles pourront s’épanouir sur le plan professionnel.

Formation et parcours professionnels

Les obstacles à la réussite professionnelle peuvent prendre racine dans le système d’éducation, où les préjugés raciaux des éducateurs peuvent faire dévier le parcours scolaire des étudiants racialisés. Ce n’est que récemment que le gouvernement de l’Ontario a annoncé qu’il mettrait fin à la pratique controversée qui consiste à orienter les étudiants vers les filières des études appliquées et universitaires. Une pratique largement connue pour être discriminatoire à l’égard des étudiants racialisés. Un rapport de 2017 de l’Université de York, Towards Race Equity in Education, a conclu que 53 % des étudiants noirs suivaient un programme d’études universitaires, contre 81 % des étudiants blancs et 80 % des autres étudiants racialisés. Ces pratiques discriminatoires du système d’éducation peuvent au bout du compte limiter le parcours professionnel et modifier les perspectives scolaires et professionnelles des PANDC en plus de créer une perception négative.

Revenus et sécurité d’emploi

Les PANDC sont désavantagées sur les plans du chômage, des revenus et des possibilités de carrière. Selon le Centre canadien de politiques alternatives (CCPA), les travailleurs racialisés étaient plus susceptibles d’être sans emploi en 2016, avec un taux de chômage de 9,2 %, que les travailleurs non racialisés, avec un taux de chômage de 7,3 %. En outre, l’écart de rémunération est resté pratiquement le même depuis 2006. Pour chaque dollar que gagnent les hommes non racialisés, les femmes racialisées gagnent 59 cents et les hommes racialisés 78 cents. Dans le rapport intitulé By the numbers: Race, Gender and the Canadian Labour Market, le CCPA a également conclu qu’il y a eu peu de progrès pour combler les différences raciales en matière de chômage. L’une des principales constatations émanant de ce rapport est que la discrimination sur le marché du travail à l’égard des travailleurs racialisés est toujours présente, tant pour l’écart salarial que le taux de chômage.

De même, le Conference Board du Canada conclut qu’il existe des pratiques discriminatoires qui contribuent aux écarts en matière d’emploi et de salaires. « Avoir un nom à la consonance étrangère » a fait partie des facteurs évalués dans le cadre du processus de recrutement. En comparant des curriculums vitæ dont le contenu était similaire, on a constaté que ceux qui appartenaient à des personnes dont le nom n’avait pas de consonance étrangère avaient 35 % plus de chances d’être rappelées. L’appartenance à un groupe racialisé réduisait également la sécurité d’emploi : 20,9 % des personnes appartenant à des minorités visibles ont déclaré que le fait d’avoir été victimes de discrimination a été une entrave au maintien de leurs possibilités d’emploi.

Mobilité professionnelle

La mobilité professionnelle au sein de la communauté des PANDC est aussi une question importante qui doit être abordée. Les PANDC sont constamment sous-représentées dans les postes de direction. Un rapport du Diversity Institute de l’Université Ryerson a révélé que bien que la population du Grand Montréal soit composée à 22,6 % de personnes racialisées, seulement 5,3 % d’entre elles occupent des postes de haute direction. En outre, dans le cadre du projet Black Experience, on a demandé aux personnes noires vivant dans la région du Grand Toronto de décrire comment la couleur de leur peau a modifié leur expérience professionnelle. Les participants ont évoqué certains obstacles qu’ils ont dû affronter au cours de leur carrière, notamment la remise en question de leur niveau de compétences, le racisme et les stéréotypes. Ils ont aussi affirmé que leurs qualifications avaient parfois été mises de côté ou non reconnues. L’expertise des PANDC est souvent non reconnue, ce qui peut être très décourageant pour ceux et celles qui souhaitent occuper des postes de haute direction.

Évaluation des préjugés

L’évaluation de vos préjugés devrait constituer la première étape de votre processus de réflexion sur la manière dont vous, en tant que professionnel de la carrière, pouvez aider vos clients issus du groupe des PANDC. L’Université Harvard propose un test d’association implicite (IAT) basé sur la race qui peut vous aider à comprendre vos idées reçues en ce qui concerne les préjugés raciaux. Passez ce test pour comprendre vos préjugés et établir une stratégie pour les combattre activement. Assurez-vous de bien comprendre que le racisme systémique existe au Canada et que des professionnels de la communauté des PANDC ont historiquement été victimes de discrimination, tant durant le processus de recrutement que sur le marché du travail. Ensuite, si vous constatez que vous avez des idées reçues, prenez les mesures nécessaires pour écouter les PANDC, apprendre de leurs expériences et y être réceptif.

Renforcer la résilience

N’hésitez pas à remettre en question les systèmes qui profitent à certaines populations au détriment des autres. Demandez-vous comment vous pouvez vous y prendre pour proposer de nouveaux processus qui appuient les PANDC et leur offrent des occasions équitables.

Voici quelques-unes des stratégies que vous pouvez adopter pour défendre le droit au perfectionnement professionnel des PANDC :

  • Devenez un allié. Utilisez votre expertise et vos privilèges pour contribuer au démantèlement des systèmes oppressifs qui servent à promouvoir la suprématie blanche et qui nuisent au parcours professionnel des PANDC.
  • Établissez des partenariats avec des organisations qui font un travail de sensibilisation pour répondre aux besoins particuliers des PANDC.
  • Évaluez si les domaines d’études vers lesquels vos clients issus du groupe des PANDC sont dirigés sont limitatifs et proposez des options pour élargir leurs perspectives professionnelles.
  • Offrez de nouvelles possibilités à vos clients issus du groupe des PANDC et aidez-les bâtir leur carrière en les mettant en contact avec des mentors, des réseaux et des dirigeants.
  • Parlez aux employeurs des préjugés et des idées reçues possibles, faites la promotion des possibilités et amplifiez la voix des PANDC.
  • Dressez-vous contre le racisme et l’oppression lorsque vous en êtes témoin, engagez des conversations cruciales et cherchez des renforts pour vous aider à poursuivre votre travail.
  • Créez un réseau qui pourra être une référence pour obtenir des ressources bien adaptées aux réalités culturelles et qui peuvent soutenir la santé mentale, établir des liens et améliorer la croissance.

En gardant ces stratégies à l’esprit, continuez à aider vos clients issus du groupe des PANDC à obtenir du succès et à surmonter les obstacles qu’ils pourraient trouver sur leur parcours professionnel.

Jodi Tingling est une intervenante en mieux-être et en développement de carrière qui travaille avec des dirigeants, des professionnels et des organisations pour s’assurer qu’ils réalisent leur plein potentiel. Sa véritable passion est de faire entendre la voix et les expériences des femmes autochtones, noires et de couleur du Canada. À titre de fondatrice de Creating New Steps, elle accompagne les organisations et les professionnels afin qu’ils atteignent leurs objectifs professionnels uniques.

Références

Block, S., Galabuzi, G., & Tranjan, R. (2019) Canada’s colour coded income inequality. Canadian Centre for Policy Alternatives. policyalternatives.ca/sites/default/files/uploads/publications/National%20Office/2019/12/Canada%27s%20Colour%20Coded%20Income%20Inequality.pdf

Comas-Díaz, L., Hall, G. N., & Neville, H. A. (2019). Racial trauma: Theory, research, and healing: Introduction to the special issue. American Psychologist, 74(1), 1-5. http://dx.doi.org/10.1037/amp0000442

Okun, Tema. (n.d.) White supremacy culture. collectiveliberation.org/wp-content/uploads/2013/01/White_Supremacy_Culture_Okun.pdf

Ryerson Diversity Institute. (2017). The Black experience project in the GTA: Overview report. ryerson.ca/content/dam/diversity/reports/black-experience-project-gta—1-overview-report.pdf

Ryerson Diversity Institute. (2019). Diversity leads women & racialized people in senior leadership positions. ryerson.ca/diversity/reports/DiversityLeads_Montreal_EN.pdf

The Conference Board of Canada. (2017). Racial wage gap. conferenceboard.ca/hcp/provincial/society/racial-gap.aspx?AspxAutoDetectCookieSupport=1#top

York University. (2017). Towards race equity in education: The schooling of Black students in the Greater Toronto Area. edu.yorku.ca/files/2017/04/Towards-Race-Equity-in-Education-April-2017.pdf?x60002

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fountain pen on notebookAutomne 2020

Mot de l’éditrice

Un professeur m’a dit un jour que les personnes qui ont une vie simple et calme font preuve d’héroïsme. Voilà qui contraste avec ce que nous associons généralement à l’héroïsme : des actes de bravoure dramatiques réels ou des super-héros Marvel qui se battent pour sauver l’humanité. Je crois que mon professeur essayait de me dire, pour m’aider à gérer l’anxiété causée par ma planification de carrière, qu’il faut de la force pour vivre selon nos valeurs.  

À l’heure actuelle, cette déclaration prend pour moi un nouveau sens. Je vois de l’héroïsme partout autour de moi : chez les parents qui tentent de concilier le travail et le soin des enfants; chez ceux qui continuent à aller de l’avant malgré la maladie ou la perte d’un emploi; chez les demandeurs d’emploi qui prennent le temps de réfléchir et d’acquérir de nouvelles compétences; et chez les militants qui réclament non pas un retour à la normale, mais un avenir meilleur et plus équitable. 

Ce numéro de Careering, sur le thème des « super pouvoirs des intervenants en développement de carrière » nous rappelle que de nombreuses compétences et de nombreux attributs peuvent être de puissants outils dans le secteur du développement de carrière. De la résilience à la pleine conscience, des récits à la sensibilisation aux compétences, les sujets traités dans ce numéro nous rappellent les nombreuses voies que les professionnels de la carrière peuvent emprunter pour aider leurs clients et les étudiants à devenir les héros de leur propre parcours professionnel. Les auteurs proposent des outils pour vous aider, ainsi que vos clients, à traverser les périodes tumultueuses ainsi que des conseils pour surmonter les obstacles à la réussite professionnelle, comme la discrimination. (Pour ajouter une touche de magie bien réelle à votre lecture, ne manquez pas nos 10 questions à l’astronaute David Saint-Jacques.) 

Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, il est facile de se concentrer sur les défis. On ne peut pas leurs échapper. Toutefois, la lecture de ce numéro me remplit d’optimisme et j’espère qu’il en sera de même pour vous. Le développement de carrière est un super-pouvoir et nous en avons besoin maintenant, plus que jamais.  

En lisant ce numéro, je vous invite à réfléchir en vous posant les questions suivantes : Quels sont vos propres super-pouvoirs en matière de développement de carrière? Comment aidez-vous vos clients à cultiver les leurs? Rejoignez-nous sur Twitter (@ceric_ca) ou Instagram (@careerwise_ca) pour partager vos réflexions et poursuivre la conversation.  

Si vous cherchez d’autres occasions de cultiver vos super-pouvoirs professionnels, ne manquez pas le prochain congrès virtuel Cannexus21 du CERIC. Vous profiterez de quatre jours de contenu en direct et de l’accès aux enregistrements des séances pendant toute une année. Pour en savoir plus sur le congrès, notamment sur la façon dont les conférenciers exploreront le thème « Le développement de carrière : un domaine d’intérêt public », qui est tout à fait d’actualité, consultez le site cannexus.ceric.ca. 

Bonne lecture et prenez soin de vous.

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chilko river british columbia/river raftingAutomne 2020

Saisir les opportunités en temps de crise

En temps de crise, nous avons le choix : accepter de naviguer dans l’incertitude ou ramer à contre-courant pour tenter de reprendre le contrôle

Andréanne Leduc, CPA, CA

Lorsqu’on prend quelques minutes pour y réfléchir, les crises sont d’excellentes opportunités pour notre développement personnel et professionnel. Mais comment les organisations peuvent-elles aussi saisir ces opportunités?

Sortir de sa zone de confort

Qu’il s’agisse d’une crise financière, sanitaire ou toute autre situation pouvant mettre en péril la survie d’une organisation, ce type de situation exige, à la majorité des gens impliqués, à sortir de leur zone de confort, d’être créatif et innovant pour réussir, avec succès, à passer la crise.

Les organisations ont beau avoir mis en place des plans de gestion de crise pour être prêtes à rebondir, mais les employés qui seront impliqués ne sont généralement pas conscients de l’implication du changement qu’ils auront à gérer, le moment venu.

Sans s’en rendre compte, les personnes ayant toujours eu les mêmes responsabilités, les mêmes fonctions ou le même rôle dans une ou plusieurs organisations, sont soudainement impliquées dans un nouveau processus lié à la crise, qu’ils n’ont généralement jamais rencontré auparavant.

Un changement d’emploi ou d’employeur exige bien souvent une réflexion préalable sur nos responsabilités, notre rôle, nos intérêts et nos aspirations. Une crise ne nous donne pas le temps d’y réfléchir et bouleverse tout, d’un seul coup.

À ce moment, notre réussite à sortir gagnant d’une telle situation débutera par un premier choix essentiel : accepter de naviguer dans l’incertitude sans appréhension ou ramer à contre-courant pour retrouver notre vie, notre rôle et nos responsabilités d’avant?

En ces temps particulièrement difficiles, il faut se rattacher à ce que nous contrôlons, c’est-à-dire ce sur quoi nous aurons toujours des choix possibles : notre attitude et nos actions.

S’adapter pour se transformer

Relativement à la gestion de crise, la chaire de relations publiques et communications de l’UQAM propose une approche en quatre temps :

  • La prévention est la première étape de la gestion de crise et consiste essentiellement en une vigie des potentiels de risques.
  • La préparation est la seconde étape. C’est à ce moment qu’est formée la cellule de crise, et le guide de gestion de crise est conçu.
  • La réaction est la troisième étape qui est délimitée par l’entrée en crise et la sortie de celle-ci.
  • L’adaptation est la quatrième étape et celle qui doit retenir le plus notre attention, car il s’agit d’un point culminant où l’organisation peut saisir les opportunités présentées par la crise afin de se transformer.

Accepter une nouvelle situation et s’adapter rapidement à celle-ci ne sont pas des comportements innés à l’être humain qui préfère rester dans un milieu connu, qu’il perçoit comme étant plus sécuritaire.

En temps de crise, cette capacité d’adaptation peut faire toute la différence. Peu importe les actions prises par les directions responsables de la gestion de crise, elles doivent toutes être orientées pour faciliter l’acceptation de ce changement.

La communication et la collaboration comme facteurs clés de succès

Au sein d’une organisation, il est possible d’augmenter la résilience des personnes en leur permettant de s’exprimer. La démonstration d’ouverture, c’est-à-dire d’être à l’écoute des préoccupations de ses employés, de ses équipes, de ses collaborateurs, de ses clients et de ses partenaires, peut aider à la survie d’une organisation. Si ce moyen est envisagé, la direction doit cependant s’assurer de prendre action pour répondre aux principales inquiétudes évoquées, sans quoi il peut être risqué d’ouvrir ce dialogue à sens unique.

Pour maintenir le cap et réussir à passer la crise, la meilleure stratégie à utiliser demeure la communication. À tous les niveaux, la communication est essentielle à la survie des organisations. Elle permet de réduire les appréhensions des gens et favorise leur engagement. Pour les employés, ce peut être de les rassurer quant au risque de perdre leur emploi, de les informer sur les changements potentiels au niveau de leur rôle et responsabilité ou pour tout autre élément potentiel de stress lié à l’incertitude d’une situation ou d’un événement. Lorsque l’employeur arrive à capter rapidement ces préoccupations, il a le pouvoir de les transformer en opportunités, en proposant des actions favorisant l’engagement de ces gens.

Cependant, la responsabilité de capter toutes ces informations ne revient pas exclusivement qu’à l’employeur. De son côté, l’employé, voyant son organisation mettre en place un plan de gestion de crise, doit aussi, en plus de partager ses préoccupations, démontrer qu’il est disponible pour prêter main-forte. Il peut le faire en tenant compte de ses intérêts, de ses motivations et de ses aspirations. Pour passer à travers une crise, ce peut être le moment idéal de mettre en commun les forces de chacun, mais encore faut-il les avoir identifiées préalablement. Tout être humain a le besoin de sentir qu’il est utile. En temps de crise, l’employeur qui arrivera à utiliser les forces et les talents des personnes de son organisation sortira, à coup sûr, plus fort et mobilisant.

De plus, il ne faut pas s’arrêter à l’établissement de telles stratégies uniquement à l’interne de l’organisation. Un bon nombre d’opportunités se trouveront à l’externe de celle-ci. Elles se dévoileront lorsque les dirigeants, et les personnes responsables de la gestion de crise, prendront le temps d’échanger avec leurs partenaires, leurs collaborateurs et même leurs concurrents. En temps de crise, l’union des forces de chacun et la mise en commun de stratégies avec toutes les parties prenantes à l’organisation, incluant ses concurrents, sont bien souvent les seules issues pour survivre.

Plusieurs moyens existent pour passer une crise avec succès. Les exemples précédents sont tous d’excellents moyens de favoriser l’acceptation du changement par toutes les parties prenantes internes et externes. L’organisation qui réussira sera celle qui aura pu gérer ce changement et qui aura osé sortir de sa zone de confort.

Vers de nouveaux horizons

Bien que les personnes responsables de la gestion de crise n’aient pas le contrôle sur tous les éléments externes à leur organisation, elles doivent se rappeler qu’elles ont toujours le contrôle sur leur façon d’agir et de réagir face à la situation, ce qui aura un impact direct sur l’environnement interne de l’organisation.

Le meilleur exemple pour démontrer cette capacité à saisir les opportunités pendant la pandémie sanitaire vécue depuis le mois de mars 2020 est celui des organisations qui produisaient de l’alcool et qui ont rapidement modifié leur production pour développer des produits antiseptiques, pour lesquels la demande était plus grande que l’offre disponible. Un autre exemple est celui des entreprises manufacturières de textile qui se sont adaptées pour produire des masques. De nombreux exemples comme ceux-ci existent. Pour plusieurs organisations, ces changements de cap ont demandé beaucoup d’agilité, de nombreuses communications avec toutes les parties prenantes internes et externes ainsi qu’une grande capacité d’adaptation.

En période de crise, toutes nos habitudes et nos standards sont mis à l’épreuve. Dès qu’on accepte le changement et qu’on est conscient qu’il y a des opportunités qui se créent, de nouveaux horizons s’ouvrent à nous. Les organisations qui sauront capter ces opportunités d’apprentissage et de développement personnel, professionnel et organisationnel en sortiront les grandes gagnantes.

Et vous, comment réagissez-vous en temps de crise?

Andréanne Leduc, CPA, CA (Signé D)

Fière d’être CPA, professionnelle, maman de deux fillettes et entrepreneure à temps partiel, Andréanne accompagne les entrepreneurs depuis une dizaine d’années pour les aider à valider leur idée, leur démarche et leurs stratégies d’affaires. Avec Signé D, elle motive les gens à vaincre leurs barrières et à passer à l’action avec leur projet de vie. Depuis 2018, elle est également conseillère, pratique professionnelle, management et comptabilité de management à l’Ordre des CPA du Québec et offre des conférences pour partager les défis de son parcours.

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woman on zoom call on couchAutomne 2020

Favoriser une culture de travail positive dans un contexte de changement

L’entretien des relations au sein de l’équipe est resté une priorité absolue alors que le Centre de carrières de l’Université de l’Alberta a dû faire face à des changements rapides du contexte de travail pendant le confinement

Blessie Mathew et Amy Roy Gratton

author headshotsComme c’était le cas partout dans le monde, le mois de mars 2020 a marqué le début d’un grand chamboulement du milieu de travail à l’Université de l’Alberta. Blessie Mathew, la directrice du Centre de carrières, a dû relever le défi de transférer en quelques jours plus de 50 employés à plusieurs endroits différents afin qu’ils puissent travailler à distance. Tous les employés étaient déstabilisés, car on les a subitement arrachés à leur routine, et ils devaient trouver une façon de réorganiser l’équilibre entre le travail (qui a augmenté de façon spectaculaire pendant quelques mois), les soins, la scolarité, la vie de famille et d’autres responsabilités dans un contexte de confinement.

Le point de vue d’une directrice

Au milieu des innombrables demandes qui accompagnent une telle situation marquée par des changements opérationnels rapides, il aurait été plus facile de fournir à notre personnel une liste de ressources en santé mentale et d’espérer que ceux qui en ont besoin cherchent eux-mêmes à obtenir de l’aide. Cependant, essayer de nous soutenir les uns les autres de manière passive n’a jamais été notre façon de faire; nos employés s’investissent dans leurs relations de travail et sont fiers de savoir que notre souci du bien-être des autres va bien au-delà de la productivité et du rendement. Face aux changements rapides que représentait le passage au travail à distance, j’ai ressenti le besoin de protéger et d’entretenir notre culture de travail unique. Il était clairement impératif de se concentrer sur le bien-être mental, la consolidation d’équipe authentique et le maintien d’un lien étroit avec notre lieu de travail.

J’ai demandé aux employés du Centre de carrières de se porter volontaire et de former des paires afin de tenir le rôle de chefs du moral des troupes pendant deux semaines. En gros, les chefs du moral des troupes seraient chargés de trouver des moyens de maintenir le lien au sein de notre équipe et de veiller à ce que nous ayons des occasions de rester en contact les uns avec les autres tandis que nous passions au travail à distance. C’étaient les seuls paramètres fournis; le reste dépendait des chefs du moral des troupes.

Le point de vue d’une chef du moral des troupes

Ce qui n’était au départ qu’une simple requête – « Quelqu’un aimerait-il être chef du moral des troupes afin de voir si cette idée fonctionne? » – s’est transformé en un engagement de plus de 12 semaines qui a contribué à revitaliser la dynamique de notre équipe. Nos premiers chefs du moral des troupes ont pris soin de commencer les choses en douceur, ce qui a permis à tout le monde de s’habituer à l’idée avant de décider combien de temps on voulait consacrer à cette initiative. Pour les employés, il était facile de participer aux activités, car elles demandaient peu de temps et d’efforts. On s’échangeait des messages comme « Envoyez-nous une photo de votre nouveau lieu de travail » ou « Quels restaurants soutenez-vous localement? » ou « Échangez une photo qui illustre ce que vous faites en dehors du travail ». Ces simples requêtes ont évolué pour se transformer en légers aperçus de la vie de nos collègues à la maison, en plaisanteries amusantes, en discussions sérieuses et en un désir commun de soutenir les entreprises locales. Le deuxième duo de chefs du moral des troupes s’est concentré sur le bien-être mental, en demandant aux employés d’échanger leurs diverses stratégies de soin de soi, ce qui s’est finalement traduit par la création d’une liste de ressources utiles.

Pour moi, deux activités se sont distinguées des autres, car elles reposaient sur un effort d’équipe : la création des armoiries du Centre de carrières et les « Pand-Emmys ».

Armoiries du Centre de carrières

Les chefs du moral des troupes nous ont demandé de suggérer un symbole ou une image qui, selon nous, devrait faire partie des armoiries représentant notre équipe. Certaines personnes ont proposé des symboles comme un loup protégeant sa meute et des éléphants protégeant les membres les plus vulnérables de leur troupe. D’autres symboles faisaient également allusion au mentorat et à la croissance, aux relations, à la communauté, à l’amitié, au multiculturalisme et, bien sûr, au café et à la nourriture. Notre mission a été traduite en latin : donner aux personnes talentueuses les moyens de développer leurs compétences, leurs connaissances, leurs expériences et leurs relations. Nous avons demandé à un étudiant du secondaire cherchant à élargir son portfolio d’intégrer les diverses propositions dans un dessin. Le résultat final, dévoilé lors d’une réunion du personnel, consistait en une œuvre reflétant nos valeurs collectives.

Les Pand-Emmys

Les prix Emmys de la pandémie (les « Pand-Emmys ») étaient des prix décernés par les pairs et qui visaient à récompenser nos collègues en télétravail. Au total, 46 candidatures ont été soumises pour ces prix dans des catégories telles que « Meilleur travail en coulisses », « Meilleur acteur de soutien » et « Meilleure émission de télé-réalité ». Alors que certaines candidatures étaient plutôt amusantes, d’autres, plus senties, étaient le fruit d’une appréciation sincère. Lors d’une réunion du personnel, des membres de l’équipe ont annoncé les catégories de prix et les gagnants. Certains employés se sont pleinement investis dans cette activité, en faisant jouer de la musique et en déchirant avec enthousiasme les enveloppes pour révéler les noms des gagnants.

Chacun des membres de l’équipe a gagné au moins un prix Pand-Emmy, et les chefs du moral des troupes ont envoyé aux gagnants des certificats sur lesquels figuraient nos armoiries. Pour ajouter à la surprise, une catégorie a été créée pour nos enfants et nos animaux de compagnie, qui sont un peu comme des acteurs de soutien, puisqu’ils ont souvent fait des apparitions lors de nos réunions virtuelles. Cette activité nous a permis d’avoir l’impression d’être soutenus et compris, chacun ayant sa propre façon de trouver l’équilibre entre le travail et la vie personnelle, qui sont devenus intimement liés.

Voici quelques conseils pour réussir votre activité visant à stimuler le moral des troupes :

1. Faites de la consolidation d’équipe une priorité. Les activités de consolidation d’équipe peuvent sembler superflues par rapport aux défis opérationnels qui se posent dans l’immédiat. Cependant, le fait d’accorder la priorité aux liens qu’entretiennent les membres de votre équipe les uns avec les autres et avec lieu de travail peut avoir une influence positive sur la santé mentale, l’engagement et la productivité du personnel.

2. Demandez aux employés de se porter volontaires par paires. Les membres de l’équipe peuvent ainsi se soutenir les uns les autres lorsque la charge de travail fluctue. Les employés étaient plus susceptibles de se porter volontaires lorsqu’ils avaient quelqu’un avec qui réfléchir et planifier. De plus, les chefs du moral des troupes tâchaient de scénariser les activités relativement à l’engagement recherché, et ils pouvaient faire un compte rendu ensemble si les activités ne se déroulaient pas comme prévu.

3. Encouragez les employés à s’approprier les initiatives. Il faut permettre aux chefs du moral des troupes de faire preuve de créativité et leur donner la liberté de concevoir des activités qui suscitent un sentiment positif et d’authenticité.

4. Essayez de nouvelles choses, même si ça ne fonctionne pas toujours. Il ne faut pas s’en faire si certaines idées ne fonctionnent pas comme prévu ou donnent un résultat complètement inattendu. Au début, certaines activités peuvent sembler étranges, mais si les membres de votre équipe font preuve d’ouverture d’esprit et de soutien, cela peut donner lieu à des discussions ou à des plaisanteries sans lien avec le sujet, mais qui seront tout aussi bénéfiques pour l’équipe.

5. Rendez la participation facultative. La participation est naturelle et amusante lorsqu’il n’y a pas de pression et qu’on se montre compréhensif envers la situation de chaque collègue, dont la charge de travail et les obligations personnelles peuvent fluctuer. Si les employés font face à une charge de travail croissante et qu’on les oblige à participer aux activités, cela suscitera du ressentiment. Il y a eu des semaines où personne ne s’est porté volontaire pour tenir le rôle de chef du moral des troupes, et nous avons simplement laissé faire, en attendant que quelqu’un en ait le temps et l’envie.

6. Choisissez judicieusement vos canaux de communication. Au départ, nous avons essayé de communiquer par différents canaux, mais nous avons constaté qu’il était difficile de distinguer les messages amusants des messages urgents. Choisissez des outils de communication cohérents et distincts qui donnent aux membres de votre équipe les fonctionnalités dont ils ont besoin (par exemple, la vidéoconférence, les sondages ou la possibilité d’échanger des photos et des vidéos).

7. Misez sur la coopération. Encouragez l’instauration d’une dynamique d’équipe positive plutôt que d’entretenir un esprit de compétition. Certains membres du personnel hésitaient à se porter volontaires parce qu’ils étaient intimidés par la grande créativité des activités précédentes. Pour apporter son soutien, l’équipe précédente de chefs du moral des troupes a envoyé un courriel à l’équipe suivante, en indiquant ce qu’elle avait appris et en donnant des conseils sur la façon de mobiliser les employés.

Aussi bien du point de vue du personnel que de celui de la direction, nous sommes fiers de ce que notre équipe a accompli. Nous avons trouvé un moyen original d’entretenir un sentiment de communauté même si nous ne pouvons pas être ensemble, et une façon d’ajouter quelques moments d’humour et de réconfort dans une situation éprouvante.

En tant que directrice, Centre de carrières et d’apprentissage par l’expérience, Blessie Mathew supervise les activités du Centre de carrières de l’Université de l’Alberta, l’Initiative de recherche de premier cycle (URI) et le programme Les femmes et les bourses, le génie, les sciences et la technologie (Women in Scholarship, Engineering, Science, and Technology).

 Amy Roy Gratton est coordonnatrice de l’éducation aux choix de carrière au Centre de carrières de l’Université de l’Alberta. Elle travaille avec les étudiants, les anciens élèves et les boursiers postdoctoraux sur des possibilités d’apprentissage par l’expérience, telles que l’observation au poste de travail, le mentorat professionnel et les programmes d’engagement communautaire.

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