Améliorer l’efficacité au travail des employés ayant un problème de santé mentale ou un handicap

Par Sara Savoie

Vous savez lire et pourtant vous mettrez beaucoup plus de temps à le faire que d’autres personnes selon votre niveau de fatigue ou vos distractions du moment! Imaginez maintenant un individu ayant des problèmes d’humeur ou d’anxiété. Il sait lire, mais, si on lui enlève du temps et que l’on ne lui explique pas l’objectif de la lecture ou des échéanciers à respecter, l’efficacité ne sera pas au rendez-vous et la satisfaction de l’employeur se dégradera au fil du temps vers des remises en question quant aux compétences de l’employé. Comment peut-on contribuer à « l’efficacité » des personnes ayant un problème de santé mentale ou un handicap sur le marché du travail? Dans cet article, il sera question de l’importance de la compréhension des besoins de l’employé pour augmenter l’efficacité au travail, la visée des qualités recherchées par les employeurs et la valorisation de certaines stratégies pouvant y être rattachées pour améliorer les situations difficiles.

Certains employés ne « fonctionnent » pas comme les autres. Les collègues ou les employeurs ont presque toujours du mal à les comprendre et à se mettre à leur place pour pouvoir tolérer leurs comportements. Si certains milieux de travail sont plus enclins que d’autres à accorder des ressources et de l’aide pour les employés ayant des problèmes de santé mentale ou un handicap, d’autres ne se rendent pas compte de l’intensité du trouble ou de l’impact de celui- ci sur l’efficacité au travail. Par les diverses consultations que j’ai eues à faire depuis les 10 dernières années, j’ai fait quelques observations qui peuvent paraître très simples mais qui demeurent incontournables pour faire une différence dans l’efficacité au travail.

La notion d’efficacité est relative le plus souvent aux attentes de l’employeur et  à la capacité de l’employé à les atteindre. Un sentiment d’efficacité personnelle élevé peut contribuer à l’efficacité de l’individu au travail. Bandura (2003) fut parmi ceux qui ont travaillé le plus sur la notion du sentiment d’efficacité personnelle. Il existe des conditions qui peuvent construire ou modifier le sentiment d’efficacité. Plus un individu vivra un succès lors de l’expérimentation d’un comportement donné, plus il sera amené à croire en ses capacités personnelles pour accomplir le comportement exigé. L’état physiologique et les émotions jouent un rôle dans le sentiment d’efficacité, peu importe si nous avons ou non un problème de santé mentale ou un handicap. En fait, la personne atteinte d’un problème de santé mentale ou d’un handicap sera encore plus influencée par les conditions pouvant construire ou modifier le sentiment d’efficacité. Une émotion aversive, telle que l’anxiété, avec une faible performance du comportement désiré, peut l’amener à douter encore plus de ses compétences et ainsi conduire à une inefficacité plus grande.

L’employé qui a un trouble bipolaire dont la médication n’est pas régularisée sera plus vulnérable à des irrégularités d’humeur ou de concentration. Nous pourrions alors comparer la situation à un conducteur qui ne peut tolérer un endormissement au volant. S’il commence à ressentir de la fatigue alors qu’il conduit et qu’il ne fait pas de pause, il deviendra de plus en plus difficile de rester vigilant, même s’il est parfaitement motivé à ne pas sombrer dans le sommeil pour ne pas périr dans un accident. L’employé qui souffre d’un trouble bipolaire est dans cette même situation. Il est motivé à demeurer attentif et efficace, mais ses pensées peuvent l’envahir et les doutes qu’il a sur lui-même peuvent engendrer des comportements ou des réactions où l’efficacité au travail sera moindre. Il doit faire des efforts de plus en plus soutenus pour effectuer la tâche entreprise ou suivre les explications des collègues de travail et ne pas décrocher, mais ces efforts sont insuffisants. Ces efforts ne se voient pas et il leur est souvent reproché injustement de ne pas faire assez d’efforts pour se concentrer, alors même qu’ils en font beaucoup et qu’ils ne peuvent pas se concentrer davantage. Cette situation peut occasionner un manque d’organisation, des conflits avec les collègues ou l’employeur et un non-respect des échéanciers. Selon Grégoire (2018), la pression peut entraîner une perte de sens et d’énergie qui empêche de continuer à performer. Comprendre les difficultés vécues ou les besoins de l’employé concerné peut aider à rétablir la confiance de la personne envers son travail et éviter l’engrenage dans un cercle vicieux d’inefficacité.

En effet, les besoins de l’individu influencent significativement l’efficacité de celui-ci au travail. Un employé dyspraxique, donc un handicap réduisant la dextérité fine et les aptitudes motrices, doit sans cesse écrire avec une écriture qui ne s’automatise pas. Il doit fournir des efforts qui occasionnent des résultats irréguliers, car il n’est pas possible de fournir des efforts en permanence. Efforts qu’il fait aux dépens d’autres tâches. Si ce type d’employé n’a pas accès à des logiciels ou des outils informatiques pouvant l’aider au plan de l’écriture, il en verra son efficacité réduite malgré sa capacité à écouter, à réfléchir, àcomprendre et àapprendre. Chaque employé a des besoins qui lui sont propres, mais les personnes ayant un problème de santé mentale ou un handicap ont des caractéristiques qui peuvent les amener à avoir plus de défis que la moyenne des gens s’ils ne sont pas pris en considération.

Un moyen qui peut aider l’employeur ou les conseillers d’orientation dans leurs interventions et l’accompagnement est de considérer les attentes de l’employé et de l’employeur, la concordance entre celles-ci et ce que l’on recherche comme qualités en milieu de travail. Rodgers (2010) offre un portrait complet de ces qualités qui encore aujourd’hui peuvent correspondre à des points de repères pour accéder à un niveau élevé d’efficacité et de satisfaction professionnelles :

  • La capacité d’adaptation : L’employé est-il capable de se débrouiller lors d’un imprévu ou perd-il ses moyens?
  • La capacité d’apprendre : Fait-il preuve d’ouverture et d’un rythme adéquat d’apprentissage ou se sent-il inconfortable avec la nouveauté?
  • L‘initiative : A-t-il besoin de quelqu’un d’autre pour passer à l’action ou se sent-il en confiance pour entreprendre la tâche par lui-même?
  • La maturité : Est-il possible de se concentrer et de ne pas recommencer deux fois la même tâche ou est-ce que les difficultés personnelles prennent trop de place?
  • La polyvalence : L’accomplissement de plusieurs tâches se fait-il par l’utilisation d’un agenda ou d’un aide-mémoire?
  • La capacité à travailler en équipe : Établit-il ses objectifs de façon réaliste et réalisable et détermine-t-il les priorités en entente avec les autres employés?
  • L’intégrité : S’accorde-t-il des pauses de 10 minutes quand cela est nécessaire?
  • L’intelligence émotionnelle : A-t-il la capacité de reconnaître, de comprendre et de maîtriser ses propres émotions et de composer avec les émotions des autres personnes?
  • La capacité de communiquer : A-t-il l’habitude de transmettre ses opinions ou ses recommandations de manière précise et honnête?
  • Le leadership : Est-il possible de rester positif et détendu en exprimant ses pensées tout en encourageant la même attitude chez ses collègues?

 

Si une ou plusieurs de ces qualités ne semblent pas au rendez-vous il est possible de faire un bilan et un plan d’actions sur l’amélioration de celles-ci tout en tenant compte des besoins de l’individu. Pour améliorer et maintenir l’efficacité au travail, il est aussi primordial d’établir des conditions favorables et de promouvoir celles- ci : un espace de travail agréable et chaleureux, un bureau ou un poste de travail bien rangé, une organisation fonctionnelle et visuelle agréable, des relations interpersonnelles harmonieuses, des moyens de communication efficaces, etc.

En incitant et en encourageant les personnes ayant un problème de santé mentale ou un handicap à viser et à maintenir ces qualités et ces stratégies dans le cadre de leur emploi, les employeurs et les conseillers d’orientation ou en emploi peuvent contribuer à une plus grande efficacité au travail. Il est nécessaire de travailler les éléments un à la fois en ayant en tête les besoins, les forces et les défis de l’employé.

Sara Savoie, conseillère en services adaptés – École nationale d’aérotechnique; conseillère d’orientation (M.Ed. 2003) & orthopédagogue (M.A. 2007) en pratique privée – Clinique Myriam Gagnon & Clinique Éducative Mon coffre à outils. Familiarisée avec le milieu scolaire et l’intégration sociale des étudiants en situation de handicap, Savoie désire mettre en application ses connaissances en participant à des projets concrets se rapportant à toute clientèle s’y apparentant. Elle est la co-auteure du livre « C’est décidé, je retourne aux études – Une histoire dont vous êtes le héros » lui ayant valu le Prix Orientation 2018 de l’Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec.

Références

Rodgers, Caroline (2010); « Dix qualités recherchées des employeurs » La Presse; Carrières et emplois, samedi, 16 janvier 2010, p. CARRIERES PROFESSIONS

Bandura, Albert (2003). Auto-efficacité. Le sentiment d’efficacité personnelle; Paris : Éditions De Boeck Université

Grégoire, Mélanie (2018) « Lésion psychologique : accompagner le travailleur lors de son retour ». Revue RH, volume 21, numéro 3, juillet/août/septembre 2018.

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Connaissez-vous les spécialistes?

Faire ressortir les compétences et les talents des clients atypiques en leur demandant de partager leur réalité

Par Nathalie Bertrand

Dans ma pratique de coaching, je rencontre des dizaines de personnes par années qui ont des parcours de vie différents des parcours classiques. C’est-à-dire les parcours de ceux qui n’ont pas réussit à traverser l’école facilement. Ceux qui n’ont pas obtenus un diplôme, ceux qui ont un « trou » difficile à expliquer dans leurs CV. Ceux qui n’arrivent pas à obtenir un emploi parce que leurs CV ne sont pas « beaux » selon le jargon du métier.

Chacune de ces personnes a une raison différente d’avoir fréquenté les chemins les plus longs, périlleux et souvent difficiles, plutôt que le chemin attendu par la société. Si on leur demandait pourquoi, elles vous diraient probablement qu’elles n’ont pas eu le choix. Elles auraient toutes préféré avoir réussi sans avoir traverser les écueils de la vie pour un laissez-passer simple vers l’employabilité. C’est ainsi que j’ai eu le plaisir de faire la connaissance d’une magnifique jeune femme, discrète, souriante, un peu timide, qui n’avait qu’un désir: trouver un emploi où elle pourrait rendre service, faire une différence et être appréciée.

L’histoire d’Elizabeth

Elizabeth* est venue me rencontrer un matin d’automne, incertaine de ce que le coaching pourrait faire pour elle. Récemment sortie de l’hôpital et continuant ses traitements en psychiatrie externe pour une schizophrénie. Fortement médicamentée, elle avait conscience que ses capacités intellectuelles n’étaient plus ce qu’elles avaient été. Mais elle avait besoin de se sentir utile à la société et cela faisait partie de son plan de remise en forme. En collaboration avec son médecin traitant, nous avons convenu d’explorer les scénarios d’emploi qui pourraient lui plaire et l’aider à briser l’isolement.

La première chose que je fais quand je rencontre une personne comme Elizabeth (ou toute personne par ailleurs), c’est de lui demander de me parler d’elle et de sa réalité. J’essaie de faire ressortir ses compétences et ses talents. Je m’efforce de mettre en lumière ce qui la rend unique et ce qui illumine ses yeux et modifie positivement son langage corporel quand elle me parle. Dans le cas d’Élisabeth, j’ai rapidement compris qu’elle tirait une grande fierté de son besoin d’avoir de l’ordre, de classer les choses et d’organiser l’espace de façon ergonomique, claire et simple.

Cela lui donnait l’impression d’avoir un certain contrôle sur son environnement et l’aidait à se sentir bien. Grâce, ou à cause de ce besoin fondamental, Elizabeth est devenue une spécialiste de la classification, du rangement, de l’accès rapide, simple et facile aux documents et aux articles de la vie de tous les jours. Elle l’applique partout et en tout temps. Elle ne peut pas s’en empêcher. Elle voit immédiatement comment améliorer les choses. C’est un réel talent.

Ensemble nous nous sommes attardées aux milieux qui collaient à ses valeurs et à son interprétation de la réussite professionnelle de même qu’a son tempérament. Ses modèles de références étaient une célèbre série télévisée, qui mettait en vedette un milieu d’avocats.

Elizabeth aime son feutré des tapis dans le bureau et le calme qui règne dans les environnements professionnels, tels que les cabinets de juristes.

Après avoir travaillé sur ses habitudes d’autosabotage, Elizabeth fut prête à faire des demandes d’emploi. Il ne fallut que quelques semaines pour voir arriver dans mon bureau une jeune femme radieuse qui m’annonça avoir décroché un poste dans un cabinet de notaire.

Un emploi 3 jours par semaine lui fait été offert. L’entrée progressive fut nécessaire pour lui permettre d’assimiler les différents aspects liés au transport, à l’horaire, et aux tâches qui lui ont été assignées. Le sujet de sa santé mentale avait été abordé en entrevue et comme nous avions beaucoup discuté et pratiqué les différents scénarios, elle avait été en mesure de rassurer l’employeur qui n’a pas hésité à lui confier un poste créer sur mesure pour elle, au soutien administratif. Profitant de différents types de subventions et soutien à l’employeur, Elizabeth s’est épanouie, elle s’est bien intégrée et à développé de belles amitiés. Son psychiatre et elle ont espacé les visites, la médication a été doucement réduite et c’est avec éloge que son employeur parle d’elle. Les employés l’adorent et la côtoient même en dehors des heures de bureau. Sa santé mentale n’est, semble-t-il, un problème pour personne.

Des histoires comme celle d’Élisabeth j’en ai plusieurs. Que le client soit atteint d’un handicap mental ou physique, il est important de se rappeler que nous avons affaire à un humain. Et que cet humain a les mêmes besoins fondamentaux que tous les autres.

Reconnaître le potentiel des clients

Le cerveau humain à cette capacité incroyable de pouvoir déverser le potentiel non utilisé d’une partie handicapée, manquante ou déficiente de lui-même, pour le mettre à la disposition d’une autre partie de lui-même, afin de lui permettre de survivre et même de se développer de façon incroyablement innovatrice et de faire naître des talents insoupçonnés.

On regarde trop souvent la personne vivant avec un handicap, en considérant le manque d’une partie habituellement fonctionnelle. Si nous nous attardions à ce que cette personne a dû développer pour survivre et voir le potentiel incroyable que lui accorde la pratique assidue de ces nouvelles compétences, on y verrait tellement plus d’avantages que de désavantages.

Dans le monde végétal et même animal, nous utilisons, encourageons et même provoquons les anomalies de certaines espèces afin de créer de nouveaux spécimens, plus fort, plus résistants, plus colorés, plus riches (ou pauvre) en ceci ou cela. C’est avec un minimum de ce dont elles ont besoin que certaines plantes s’adaptent et croissent malgré les conditions arides auxquelles elles sont soumises. Elles développent une quantité d’énergie incroyable pour survivre algré tout. Nous les étudions, les multiplions, les reproduisons et les vendons à fort prix.

La Fondation Mira a développé le caractère avenant, loyal et patient de certains chiens pour en faire des chiens d’assistance particulièrement recherchés.

Chez l’humain, la nature a forcé les choses, parce que personne ne souhaite devoir vivre avec un handicap, un manque ou une déficience. Notre besoin d’uniformité nous empêche souvent de voir et d’apprécier l’énorme potentiel des personnes vivant avec un handicap. Telle une plante ou un animal, l’humain s’adapte, utilise son environnement, pour vivre et croître dans des conditions inhabituelles et développer des talents et compétences que les autres n’ont pas « besoin » de développer.

Prendre le temps d’écouter, de mettre en lumière, de valoriser sont les seules compétences requises pour aider une personne qui doit conjuguer avec un handicap, à trouver sa voie et développer son potentiel. Si on part du concept que tous les vivants sont sur Terre pour accomplir quelque chose et qu’il n’y a pas d’humains surnuméraires, il devient possible de garantir à chaque personne une façon de combler ses besoins fondamentaux et d’être utile à la société.

Il est souvent curieux de constater que rares sont les ingénieurs en fauteuil roulant qui créent les environnements destinés aux personnes à mobilité réduite. Les meilleures personnes pour perfectionner ou inventer plusieurs choses du quotidien sont celles qui n’ont pas l’usage « complet » ou habituel de leurs membres ou de leurs fonctions cognitives. Demandez à une personne handicapée ce qu’elle ferait pour améliorer les choses, vous aurez une mine d’or d’idées novatrices et révolutionnaires. Comme en toute chose, un généraliste fait une partie du travail, mais un spécialiste peut aller encore plus loin.

*Le nom a été changé pour préserver l’anonymat de la cliente.

IMPORTANT: Avant d’accompagner une personne atteinte d’un handicap quelconque, il est IMPÉRATIF de communiquer avec son médecin traitant et de bien comprendre les limitations du client de même que l’objectif attendu. L’accompagnement de client mentalement instable doit TOUJOURS être fait avec l’accord et la collaboration de son spécialiste en santé mentale.

Nathalie Bertrand est coach de vie certifiée Martha Beck. Sa spécialité est d’accompagner les personnes au parcours atypique vers la meilleure expression d’elles-êmes. Atypique ellemême ( Nathalie est dyslexique sévère), elle sait pertinemment ce que signifie se sentir différent et ne pas trouver l’aide et l’accompagnement nécessaire à ses besoins particuliers. Ayant travaillé comme conseillère à l’emploi, puis dans un cabinet de conseillers d’orientation afin d’accompagner les accidentés de toutes sortes, vers le retour à l’emploi, Nathalie a constaté les limites actuelles du système de réintégration en emploi offert par les différentes instances gouvernementales et privées. Elle a également travaillé comme orthésiste-prothésiste ce qui lui a permis de constater le manque de ressources offertes aux personnes vivant avec des limitations physiques importantes. C’est donc tout naturellement qu’elle a choisi de se spécialiser en coaching des personnes ayant des parcours de vies atypiques.

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Accroître sa résilience peut avoir une incidence positive sur la transition de carrière

Comment les clients peuvent apprendre à reconnaître les facteurs de stress et à développer des stratégies afin de mieux les gérer lors d’un changement de carrière

Par Mary Ann Baynton

Toute transition dans la vie peut être source de stress. La transition de carrière en particulier survient souvent au même moment que d’autres sources de stress, comme les problèmes personnels, familiaux, financiers ou de santé. Accroître notre résilience consiste à connaître nos réactions actuelles au stress et à choisir des façons plus saines et plus efficaces d’y réagir.

La résilience est la capacité de s’adapter à une situation de stress ou d’en récupérer, comme l’entrée sur le marché du travail ou la transition d’un emploi à l’autre. Accroître sa résilience ne veut pas dire éviter le stress. La résilience permet simplement de mieux composer avec le stress et de mieux en récupérer.

La recherche nous a permis de connaître des stratégies pratiques pour accroître la résilience.

Déterminez vos réactions au stress

Le stress fait partie du quotidien de la plupart des gens et nous y réagissons de façon automatique. Ainsi, notre réaction au stress n’est ni choisie ni planifiée. Cela étant dit, en déterminant certaines de nos réactions immédiates au stress, nous serons plus en mesure de les reconnaître et de nous y attaquer avant qu’elles ne deviennent une source de problèmes de santé ou autres.

Certaines réactions automatiques sont physiques – feux sauvages, urticaire, transpiration ou problèmes d’estomac. D’autres sont comportementales : consommation de substances, changements aux habitudes de sommeil, maladresse, oublis, impatience, surcharge d’horaire ou excès de travail. Des réactions émotives peuvent aussi se manifester : irritabilité, colère, frustration ou excès émotifs.

Il faut se rappeler que ses réactions sont involontaires et peuvent survenir quand même. Cependant, plus vite on détermine qu’elles sont causées par le stress, plus vite on peut cerner le facteur de stress et apporter des changements.

L’importance de donner et de recevoir du soutien social

Pour changer les choses, on peut notamment donner ou recevoir du soutien social. Ironiquement, il est possible de vivre moins stressé en aidant les autres et en demandant de l’aide.

Si vous n’avez personne sur qui compter, d’autres solutions s’offrent à vous. Vous pouvez faire du bénévolat, devenir membre d’un club ou aider une personne dans le besoin. Il peut s’agir d’un proche, d’un collègue ou d’un voisin. Plus vous aidez un grand nombre de personnes, plus le nombre de personnes qui pourraient vous aider en retour sera élevé.

Il existe aussi de nombreux organismes et groupes partout au pays dont la mission est de venir en aide aux gens dans le besoin. Il suffit de tendre la main! N’attendez pas que le stress soit devenu impossible à gérer avant de chercher de l’aide. Vous ne savez pas où commencer? Consultez le bureau du représentant de votre administration locale pour connaître les services offerts dans votre collectivité.

Adoptez des stratégies de gestion du stress plus saines

Une autre façon d’accroître votre résilience consiste à explorer de nouveaux moyens de prévention et de gestion du stress. Chaque personne est unique. Ce qui réduit le stress chez une personne peut l’accroître chez une autre. Certaines personnes, par exemple, utilisent les animaux pour réduire leur stress, tandis que d’autres les craignent ou sont allergiques.

La pleine conscience, l’expression de la reconnaissance et la respiration profonde sont des approches à adopter pour gérer le stress de façon plus saine. Pour certaines personnes, l’art, la musique ou le temps passé dans la nature sont efficaces. Prenez le temps de découvrir ce qui fonctionne pour vous, puis engagez-vous à le faire régulièrement.

Étudiez vos options et prenez de bonnes décisions

Même en étant conscient de nos réactions automatiques au stress et en utilisant des stratégies saines pour gérer ce stress, il est quand même possible d’être dépassé par les événements à divers moments. Lorsque cela se produit, il faut prendre du recul pour trouver d’autres moyens de gérer le stress.

Une stratégie consiste en ces quatre techniques :

  • Accepter les choses et les gens que vous ne pouvez pas changer. Même si c’est difficile, accepter ce que vous ne pouvez pas changer (plutôt que de souhaiter désespérément que la situation soit différente) peut vous aider à mieux gérer votre stress.
  • Éviter tout stress inutile. Le stress ne peut pas toujours être évité. Il est même malsain d’éviter une situation stressante qui doit être résolue. Cependant, si c’est possible, évitez tout stress inutile en apprenant à dire non, en limitant le temps passé avec des personnes qui vous causent du stress et en éliminant les tâches ou activités inutiles.
  • Modifier vos façons de communiquer et d’agir au quotidien pour réduire les facteurs de stress. Pour ce faire, confiez-vous aux personnes que vous considérez comme dignes de confiance, soyez ouverts aux compromis qui réduisent le stress et parlez ouvertement et honnêtement de vos besoins pour que les autres puissent vous comprendre et vous aider.
  • S’adapter au facteur de stress en changeant vos attitudes et vos comportements. Repensez les problèmes en adoptant une perspective positive et axée sur les solutions, envisagez les conséquences d’actions précises et fixez des attentes claires et raisonnables pour vous et les autres.

 

Utilisez chacune de ces quatre techniques afin de voir le facteur de stress de plusieurs façons. Ensuite, choisissez la réaction qui vous convient le mieux.

Si on prend ces stratégies dans le contexte d’un processus de transition de carrière, il faut comprendre qu’il pourrait y avoir des facteurs de stress au travail. Au nombre de ces facteurs, il y a une nouvelle courbe d’apprentissage, la peur de l’échec ou du succès, une nouvelle culture organisationnelle, les diverses façons d’interagir avec les gens et le milieu, et la création de nouvelles relations.

Il peut paraître contreproductif de penser à tout ce qui pourrait mal tourner, mais envisager les facteurs de stress potentiels et trouver de meilleures façons d’y réagir permet de réduire le fardeau si ces facteurs surviennent une fois que vous avez commencé votre nouvel emploi.

Ne cessez jamais d’accroître votre résilience

Comme nous avons pu le voir, un grand nombre de stratégies pratiques peuvent servir à accroître la résilience. Pour accroître notre résilience, il faut prendre conscience de nos réactions automatiques au stress, améliorer notre capacité de donner et de recevoir du soutien social, adopter de bonnes stratégies de gestion du stress et un mode de vie plus sain, prendre du recul de manière à voir objectivement les possibilités qui s’offrent à nous pour composer avec le stress et être conscients des facteurs de stress possibles et des moyens d’y remédier.

Certains d’entre nous sont déjà mieux outillés que d’autres, mais tout le monde peut faire l’acquisition de ces compétences. On ne devrait jamais cesser d’accroître sa résilience, car nos vies évoluent constamment.

Sidebar, french: Des ressources gratuites pouvant vous aider à élaborer un plan personnel de résilience et à gérer des facteurs de stress spécifiques sont disponibles à l’adresse suivante: strategiesdesantementale.com

Mary Ann Baynton est directrice de programme pour le Centre pour la santé mentale en milieu de travail de la Great-West qui crée et fournit des ressources et outils gratuits à toute personne désirant gérer ou améliorer la santé et la sécurité psychologiques au travail ou prévenir les problèmes. Elle est l’auteure de plusieurs ouvrages, dont Mindful Manager, Keeping Well at Work, Preventing Workplace Meltdown, Resolving Workplace Issues et The Evolution of Workplace Mental Health in Canada.

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Surmonter les obstacles au retour au travail après une absence due à un problème de santé mentale

Les professionnels du développement de carrière peuvent travailler en collaboration avec des professionnels de la santé pour aider les clients à envisager, au cours de leur rétablissement, toutes les options de retour au travail possibles

Par Dre Marie-Helene Pelletier

Les faits sont clairs : les problèmes de santé mentale représentent en moyenne plus de 30 % des réclamations pour invalidité de longue durée (Commission de la santé mentale du Canada). Près de la moitié de ces réclamations touchent la dépression (Financière Sun Life). Il n’est donc pas étonnant que les professionnels en développement de carrière et en santé soient appelés à travailler à un moment ou un autre avec des employés en absence de travail due à un problème de santé mentale.

Que je m’entretienne avec des professionnels qui fournissent du soutien aux employés en absence de travail ou à des employés en absence en raison d’un problème de santé mentale, trois obstacles au retour au travail reviennent sans cesse. Voici un aperçu de chacun de ces obstacles et de la façon de les surmonter.

Obstacle no 1 – Je ne m’imagine absolument pas retourner au travail

Cette phrase, je l’entends souvent à mon cabinet. Ce n’est pas étonnant, compte tenu de l’influence qu’exerce le « nuage » de la dépression sur les pensées. Ma réponse est simple : rappelez à votre client de se concentrer tout d’abord sur son retour à une bonne santé mentale. Le professionnel de la santé de votre client a à l’esprit le retour au travail de celui-ci et l’aidera à cheminer dans cette direction. Une des responsabilités premières de l’employé en absence de travail est d’avoir les bonnes resources et de participer activement au traitement. Donc, en consultant un psychologue et un médecin et en accédant à d’autres ressources au besoin, il est sur la bonne voie. Les détails de son retour au travail se clarifieront lorsqu’il aura récupéré.

Obstacle no 2 – Je ne suis pas persuadé(e) de pouvoir retrouver une santé optimale

La santé optimale n’est souvent pas l’objectif le plus utile : concentrez-vous sur le retour à un fonctionnement au quotidien qui permet le retour au travail dans une certaine capacité. Les compagnies d’assurances travaillent fort avec les professionnels de la santé pour garder les employés concentrés sur leur retour au travail (au lieu de travailler sur tous les aspects pouvant être optimisés). Les petits pas finissent souvent par entraîner de grands gains et un retour au rendement d’avant le problème de santé mentale.

Obstacle no 3 – Je ne suis pas persuadé(e) de pouvoir occuper mes anciennes fonctions

En vérité, de nombreux chemins s’offrent aux employés. Un seul de ces chemins est un retour à leur emploi à temps plein, généralement de façon progressive. L’employé reçoit le feu vert de son médecin et de son psychologue pour reprendre le travail. Il en informe son employeur et un horaire de retour progressif est établi. L’employé reprend le travail deux semaines plus tard. Il assume graduellement de plus en plus de responsabilités, tout en consultant son psychologue à quelques reprises.

Il y a beaucoup d’autres scénarios, comme l’employé qui assume de nouvelles fonctions auprès du même employeur ou qui quitte pour une autre entreprise. Le congé pour récupérer est aussi un congé pour réfléchir – c’est une excellente occasion pour l’employé de réfléchir à son rôle au travail, à ses forces et à son cheminement de carrière.

En tant que professionnels, notre rôle consiste entre autres à favoriser le retour à la santé de l’employé et à l’inviter à étudier toutes les possibilités qui s’offrent à lui lors de son retour sur le marché du travail.

La Dre Marie-Helene Pelletier est psychologue praticienne et haute dirigeante d’expérience. Elle est bilingue et possède la combinaison rare d’un doctorat et d’une maîtrise en administration des affaires. Par sa pratique individuelle, ses conseils en matière de santé mentale au travail et ses conférences sur la résilience, elle aide les particuliers et les entreprises à améliorer leur santé et leur rendement. Entrez en contact avec Marie-Hélène à l’adresse drmhpelletier.com, sur LinkedIn et sur Twitter.

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Mot de l’éditrice

Bonjour chers lecteurs! Je m’appelle Lindsay Purchase. Je suis heureuse de vous présenter mon premier numéro du magazine Careering à titre de nouvelle rédactrice en chef, Contenu et communications. Vous continuerez de trouver dans Careering les articles informatifs et stimulants qui font de notre magazine une lecture essentielle. Vous y remarquerez aussi cependant quelques nouveautés (consultez le document infographique) et des changements à la présentation, car nous continuons de chercher des façons de mieux vous servir. Les thèmes de ce numéro, qui traite de handicaps et de troubles de santé mentale, sont la résilience, l’évolution des mentalités et les réseaux de soutien. Ces thèmes m’ont touchée, car je les reconnais dans ma propre transition de carrière. J’espère qu’ils vous toucheront aussi.

Notre société est de plus en plus consciente des problèmes de santé mentale. Nous acceptons de mieux en mieux les différences physiques et intellectuelles au travail. Et pourtant, il reste beaucoup de chemin à faire dans l’élimination des obstacles au travail pour les personnes ayant un handicap ou une maladie mentale.

Parce que le tiers des Canadiens auront une maladie mentale au cours de leur vie (Agence de la santé publique du Canada) et qu’on estime que 3,6 millions de Canadiens auront un handicap physique d’ici 2030 (Conference Board du Canada), les professionnels du développement de carrière ont un rôle important à jouer. Quelle est l’incidence de la résilience et du bien-être sur le développement de carrière? Comment les milieux professionnels, les écoles et les intervenants en développement de carrière peuvent-ils mieux soutenir les personnes ayant un handicap? Le présent numéro explore ces questions et bien d’autres.

Tout d’abord, la psychologue Marie-Hélène Pelletier discute des obstacles auxquels font face les employés en congé pour un problème de santé mentale à leur retour au travail. Ensuite, Mary Ann Baynton explique comment les chercheurs d’emploi peuvent accroître leur résilience afin de mieux composer avec les défis de la transition de carrière.

Nous lançons aussi une nouvelle chronique où un chercheur ou une chercheuse d’emploi témoigne de ses réussites et de ses difficultés dans le développement de sa carrière. Dans le présent numéro, Rebecca McMurrer se confie sur sa quête d’un emploi gratifiant en soins infirmiers à la suite d’un diagnostic d’affection progressive causant une détérioration de sa mobilité.

Dans la rubrique des études de cas, Teresa Francis nous raconte comment elle a aidé un célèbre comédien à faire confiance à ses forces pour entreprendre une nouvelle étape de sa carrière.

N’hésitez pas à me communiquer vos commentaires sur les articles de notre magazine papier ou nos exclusivités Web, ainsi que vos idées d’amélioration du magazine Careering. Vous avez une idée d’article pour notre prochain numéro? Voyez notre prochain thème et prenez connaissance de nos directives de soumission à contactpoint.ca/careering. Bonne lecture!

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