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Difficultés de motivation : stratégies pour donner de l’élan au client dans sa recherche d’emploi

Les entrepreneurs qui entrent sur le marché du travail conventionnel ne savent pas toujours par où commencer

Michelle Schafer

author headshotLorsque Stephanie Hault a vendu ses magasins de vêtements situés à Ottawa pendant la pandémie et qu’elle s’est mise à la recherche d’un emploi stable et sans inquiétude après 15 ans en tant qu’entrepreneuse, elle pensait savoir à quoi ressemblerait cette expérience. « Je m’attendais à concentrer ma recherche en ligne principalement – en examinant les offres d’emploi et en préparant des curriculums vitæ et des lettres de présentation. »

Mme Hault se rend compte maintenant que la réalité est tout autre. Elle a découvert avec stupéfaction le rôle croissant que joue le réseautage pour accéder aux postes intéressants. En effet, je conseille à mes clients de consacrer plus de 80 % de leur temps de recherche d’emploi à des activités qui favorisent l’établissement de relations. Et elle fait partie d’un nombre croissant de personnes qui cherchent un emploi pendant la pandémie sans avoir d’expérience préalable de la recherche d’emploi, notamment des propriétaires de petites entreprises qui vendent leurs magasins de détail ou leurs restaurants en raison de la COVID-19. Pour certains, il s’agit de quitter le monde imprévisible de la petite entreprise pour un emploi qui leur offrira stabilité et sécurité. D’autres, comme Mme Hault, recherchent un mode de vie plus équilibré. Même si elle avait l’habitude de prendre des risques en tant qu’entrepreneuse, se lancer dans une recherche d’emploi après avoir passé toute sa carrière en tant que propriétaire d’entreprise est intimidant.

Noah Firestone, ancien propriétaire du populaire restaurant Luxe à Ottawa, est du même avis. Lorsque la COVID-19 lui a fait comprendre qu’il lui faudrait beaucoup de temps et d’énergie pour rétablir les recettes de son restaurant aux niveaux antérieurs à la pandémie, M. Firestone a décidé de le vendre pour chercher un poste qui lui offrirait un meilleur équilibre – notamment du temps à consacrer à sa famille pendant les fins de semaine. « J’aimais ce que je faisais. J’aimais aller travailler tous les jours, mais je devais prendre des décisions et effectuer des changements maintenant que j’aurais beaucoup plus de difficultés à prendre et à faire au fil des années. »

« Même si elle avait l’habitude de prendre des risques en tant qu’entrepreneuse, se lancer dans une recherche d’emploi après avoir passé toute sa carrière en tant que propriétaire d’entreprise est intimidant. »

J’ai travaillé avec M. Firestone et Mme Hault, et tous deux estiment que le recours à une accompagnatrice en gestion et transition de carrière leur a donné la motivation nécessaire pour poursuivre leur recherche d’emploi. Les clients qui sont dans cette situation doivent souvent remettre en question leurs attentes. Lorsque Mme Hault a commencé sa recherche d’emploi, elle s’attendait à ce que les choses aillent vite. Elle pensait qu’elle utiliserait un curriculum vitæ chronologique qu’elle enverrait à de nombreux employeurs et qu’elle participerait à des événements de réseautage. Mme Hault voit maintenant l’avantage d’utiliser un curriculum vitæ par compétences pour promouvoir ses compétences transférables. Elle a également participé à des rencontres individuelles sur une plateforme de réseautage virtuel et a adapté son curriculum vitæ en fonction des postes qui lui permettraient de faire un travail stimulant et des entreprises qui partagent ses valeurs. Et elle a fini par accepter que la patience – beaucoup de patience – soit nécessaire pour continuer à avancer.

« En tant que propriétaire d’entreprise, j’avais l’habitude de fonctionner à un rythme rapide et de prendre des décisions rapidement, et j’étais donc frustrée par le rythme plus lent de ma recherche d’emploi, explique Mme Hault. Il était difficile pour moi de rester motivée lorsque ma recherche avançait plus lentement que je ne l’espérais – comme lorsque j’avais l’impression d’avoir établi une bonne relation avec quelqu’un sans jamais recevoir de nouvelles par la suite, ou lorsqu’une personne ne répondait pas à ma demande d’avoir une discussion de réseautage avec elle. »

Donc, comment peut-on accompagner des clients dans une situation semblable afin qu’ils restent motivés dans la recherche de leur prochain emploi idéal, tout en les aidant à trouver l’entreprise qui répond le mieux à leurs critères? Mme Hault dit avoir tiré parti des stratégies d’accompagnement suivantes pour rester concentrée et aller de l’avant :

  • Encourager les clients à adopter un état d’esprit axé sur l’apprentissage : Mme Hault a réalisé qu’elle avait beaucoup à apprendre, notamment sur la façon de rédiger un curriculum vitæ, de créer un profil LinkedIn percutant et de découvrir des possibilités d’emploi. L’accompagnement l’a aidée à se concentrer sur les éléments de base, comme la façon d’écrire un courriel pour demander une conversation de réseautage.
  • Déterminer les compétences transférables et transformer le curriculum vitæ des clients : Mme Hault et M. Firestone ont tous deux modifié leur curriculum vitæ chronologique en un format par compétences afin de faire valoir leurs compétences transférables (telles que le service à la clientèle, le développement de partenariats, la direction de projets et la budgétisation) vers de nouveaux secteurs d’activité. M. Firestone a appris qu’un curriculum vitæ « n’est pas nécessairement une simple liste des réalisations d’une personne, mais une liste de ses compétences et des façons dont celles-ci peuvent se rapporter à ses réalisations antérieures. » Bien qu’il ait travaillé dans l’hôtellerie et la restauration depuis son adolescence, M. Firestone a commencé à voir que ses compétences étaient transférables – et nécessaires – dans d’autres secteurs d’activité.
  • Aider les clients à demander de l’aide : Les clients qui n’ont jamais eu à chercher du travail peuvent être réfractaires à cette idée. Mme Hault admet qu’elle n’aime pas demander de l’aide, car son approche entrepreneuriale lui a permis de faire les choses de manière indépendante. Pourtant, le fait de demander de l’aide – notamment pour établir un lien avec une entreprise qui l’intéressait et mettre son curriculum vitæ entre les mains des décideurs – a fait avancer sa recherche d’emploi. En tant qu’accompagnateurs, nous pouvons aider nos clients à comprendre la façon dont les conversations de réseautage font partie de la recherche d’emploi. Nous pouvons les aider à adopter une approche de ces conversations qui soit authentique vis-à-vis d’eux-mêmes tout en gardant un maximum de possibilités à explorer. Lorsque M. Firestone a commencé à joindre ses contacts pour explorer les possibilités, sa vision des postes potentiels s’est élargie et il a commencé à se dire : « Je pourrais vraiment faire ça, et je pourrais même être doué pour ça. »
  • Valoriser les petits pas: Chaque nouvelle relation que Mme Hault réussissait à établir lui donnait de l’espoir et revitalisait sa recherche. Encouragez vos clients à considérer chaque étape comme un progrès – ils se dirigent vers la bonne voie.
  • Établir une routine de recherche d’emploi: Mme Hault et M. Firestone se réservaient chaque jour du temps pour leur recherche d’emploi, mais aussi du temps pour faire des choses qu’ils aiment; ils avaient besoin de se détendre après avoir quitté l’emploi du temps trépidant de propriétaire de petites entreprises. Mme Hault a intentionnellement fait en sorte que sa recherche d’emploi ne devienne pas un travail à temps plein.

Firestone a effectué une transition réussie vers le secteur de la construction en acceptant un poste en développement commercial qui correspondait bien à ses compétences transférables. Mme Hault a appliqué ses nouvelles connaissances à sa recherche au quotidien, et s’est récemment jointe à l’équipe de Shopify – l’emploi de ses rêves dans l’entreprise de ses rêves. Elle souhaitait offrir les conseils suivants aux professionnels de la carrière qui travaillent avec des clients novices en matière de recherche d’emploi : « Encouragez vos clients à faire une pause – et à prendre du recul pour déterminer quelles sont leurs compétences et où ils peuvent les mettre en pratique. Aidez vos clients à transformer leur curriculum vitæ et à établir des approches de réseautage, afin qu’ils puissent nouer le dialogue avec leur réseau pour découvrir et explorer des possibilités d’emploi. Il est important pour vos clients de faire preuve de curiosité et de ne jamais refuser une occasion de prendre part à une conversation. On ne sait jamais où celle-ci va nous mener. »

Michelle Schafer est une accompagnatrice et une facilitatrice certifiée par l’International Coaching Federation (ICF) et qui se spécialise dans la transition de carrière et le leadership. Elle est propriétaire de Michelle Schafer Coaching, qui donne aux gens les moyens de s’épanouir dans leur carrière, et a été classée parmi les 20 meilleurs accompagnateurs en gestion et transition de carrière d’Ottawa en 2020. Mme Schafer travaille avec des clients de tous les échelons dans les secteurs de l’administration publique, de la technologie, des organismes sans but lucratif, des soins de santé et des services financiers. Elle propose un accompagnement individuel, en groupe ou en équipe.

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Reprendre la route des études : quand une pandémie mondiale déclenche la transition

L’incidence d’une pandémie et du confinement sur un projet de retour aux études

Lyne Rhéaume et Sara Savoie

author headshotsDepuis mars 2020, plusieurs personnes ont vu leur quotidien chamboulé par le déclin sévère de certains secteurs économiques, le manque de personnel dans certains milieux de travail et l’intégration du télétravail.

Pour certaines d’entre elles, cette transition implique un retour aux études (RAE). Celles qui prennent cette décision doivent donc bien cibler les points de repère et les ressources à leur disposition. L’approche du héros peut les accompagner (Rhéaume et Savoie, 2017). Initialement conçue pour les raccrocheurs scolaires, la démarche proposée aide à clarifier les atouts et les forces des personnes qui souhaitent planifier un RAE prometteur et satisfaisant à moyen et à long terme.

Comment opérationnaliser et structurer la démarche en peu de temps, afin d’accompagner la transition vers une nouvelle direction sans brusquer l’introspection? Nous vous proposons de suivre les 5 étapes suivantes.


Quelques mots sur l’analogie

Le parallèle avec le parcours d’un héros se veut un symbole révélateur de l’ampleur de ce défi. Il est toutefois possible de nommer les étapes de la démarche et les outils proposés de manière plus neutre et accessible!


1. La cape du héros : savoir ce qui s’y cache pour mieux se connaitre

La démarche du héros est un moyen d’intervention qui favorise la réflexion et la découverte de soi. Il est donc essentiel d’aborder directement le sujet du RAE et d’amorcer la phase d’introspection sur une base volontaire en lien avec le parcours scolaire de la personne et en s’appuyant sur des éléments à la base de la mission du héros, tels les rêves, les besoins, les compétences et les peurs.

2. Le vouloir du héros : l’engagement authentique pour se préparer à l’action

Il est essentiel que la personne évalue tous les impacts qu’un RAE pourrait impliquer. Les enjeux y étant associés sont tels qu’ils doivent émerger de ses propres besoins et aspirations et reposer sur les acquis accumulés depuis la fin ou l’abandon de ses études.

3. Le pouvoir du héros : savoir prendre une décision et planifier l’assaut

Cette étape fait appel aux fondements du pouvoir d’agir (empowerment). Elle permet une prise de conscience profonde des conditions de réussite du projet : estime de soi, confiance en soi, initiative, contrôle, capacité d’analyse et capacité de faire des choix qui convergent vers l’engagement et la réussite du projet. La nécessité de faire des bilans et de tirer des leçons de vie n’étant pas un réflexe naturel chez les personnes qui effectuent un RAE, la présence de l’intervenant peut les aider grandement à consolider leur pouvoir d’agir.

4. La mission du héros : la poursuite des études et le goût de la réussite

Que ce soit à la suite de la perte d’un emploi, pour se perfectionner dans son emploi actuel ou par désir de se réorienter, le RAE peut être une option très intéressante à tout âge. Or, il représente aussi un grand défi. Cette décision dont donc prendre en considération les obstacles déjà traversés par la personne. À cette étape, les intervenants doivent tenter de faciliter l’analyse de la situation pour prévenir la réapparition de ces obstacles. En ce sens, énoncer clairement les facteurs de risque et de protection peut contribuer au développement du pouvoir d’agir.

5. À la croisée des chemins : de quêtes et de poursuites

Un des aspects importants de l’approche du héros est de respecter l’accomplissement possible par l’obtention d’un diplôme, mais aussi de toute autre éventuelle réalisation qui serait aussi satisfaisante. Les études, ce n’est pas fait pour tout le monde!

Le défi de Jean-Philippe

Pour illustrer comment s’articule cette approche, laissez-nous vous présenter l’histoire de Jean-Philippe, 42 ans, un bon exemple d’audace et de détermination.

En mars 2020, après plusieurs années à l’emploi d’une grosse compagnie qui a fait faillite, Jean-Philippe décide de retourner à l’école pour compléter un certificat en immigration et en relations interethniques. Captivé par ce sujet depuis toujours, il souhaite acquérir des connaissances théoriques sur les phénomènes migratoires et développer sa capacité à comprendre et évaluer l’impact de ces phénomènes. Il n’écarte pas l’idée de faire d’autres certificats pour se perfectionner davantage afin de travailler dans des milieux multiethniques. Plusieurs personnes lui disent que ce changement est trop important et qu’il risque de manquer d’argent, mais il est persuadé que c’est ce qu’il doit faire.

Group Of Mature Adult Students In Class Working At Computers In College Library
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Jean-Philippe s’inscrit d’abord à des ateliers d’informatique pour améliorer sa vitesse au clavier. Sa motivation lui permet de faire ce premier saut, et il s’améliore dès la première rencontre. Dès le début des cours universitaires, il trouve tout de même difficile de prendre des notes pendant que l’enseignant parle sans manquer d’informations importantes. Aussi, il manque de temps pour sa famille et ses amis. Il craint également d’avoir de la difficulté à boucler ses fins de mois. Il songe à abandonner son projet, mais il décide de consulter avant de quitter l’université.

Après réflexion, il reprend un emploi à temps partiel, tout en gardant son RAE en tête. Il ne veut pas revivre les mêmes sentiments ni refaire les mêmes erreurs, surtout dans un contexte d’incertitude imposé par la pandémie depuis plus d’un an. Ne sachant pas par où commencer, il demande de l’aide.

Supposons que vous êtes l’intervenant qui accueille Jean-Philippe. Vous avez déjà une bonne idée de sa trajectoire et vous souhaitez l’aider à dénouer son impasse. Il arrive avec une bonne connaissance de lui-même basée sur son vécu (étape 1), il sait ce qu’il veut et est motivé (étape 2) mais il se retrouve dans une impasse (étape 3). Les risques et les sacrifices sont-ils trop importants pour poursuivre ses études? Les facteurs de protection seront-ils suffisants pour surmonter les facteurs de risque auxquels il est confronté?

Comme vous l’aurez deviné, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse, il n’y a que des solutions axées sur les désirs réels de Jean-Philippe. Que lui conseillerez-vous? L’approche du héros suggère une foule d’outils pour bien évaluer chaque option, ses avantages et ses inconvénients (étape 4). Par exemple, certains facteurs de risque semblent présents, tels que la capacité à prendre des notes lors des cours, le manque de temps et les difficultés financières. Vous pourriez alors mettre en évidence les facteurs de protection présents dans la situation de Jean-Philippe (connaissance de soi, motivation) pour lui donner du courage et consolider sa volonté à l’égard de son projet de RAE. Vous pourriez ensuite revenir à la base de son projet et dresser avec lui un tableau représentant les deux côtés de la médaille. L’approche du héros suggère également d’aider Jean-Philippe à découvrir les ressources de son milieu (ressources humaines, matérielles, scolaires et communautaires). Selon la décision prise par Jean-Philippe, vous pourrez ensuite l’accompagner pour assumer ses choix, vivre avec les impacts de ceux-ci sur sa vie et réagir aux imprévus (étape 5).

En résumé, l’importance d’une démarche structurée est primordiale pour guider les personnes qui effectuent un RAE à prendre la bonne décision pour eux, tout en étant conscient de ce qui les attend.

Bachelière en relations industrielles, Lyne Rhéaume s’est toujours préoccupée des composantes du succès, de la motivation et de la persévérance scolaire. En 2006, elle a cofondé le service d’aide aux décrocheurs du Réseau de la formation professionnelle à la Commission scolaire de Montréal (CSDM). Auteure et formatrice, elle a eu l’occasion d’offrir de nombreux ateliers lors de colloques et congrès, en plus de l’aide individuelle à des personnes dans une démarche de réflexion de retour aux études. 

Sara Savoie, conseillère d’orientation et orthopédagogue, s’est toujours intéressée à la prévention et l’intervention auprès des élèves à risque. Familiarisée avec le milieu scolaire secondaire et post secondaire, elle partage ses connaissances et son expérience afin de contribuer à la réussite scolaire et l’intégration socio-professionnelle de ces élèves et au soutien disponible aux intervenants et aux parents.

Références

Rhéaume, L. et Savoie, S. (2017). C’est décidé, je retourne aux études! Une histoire dont vous êtes le héros. Québec : Septembre éditeur.

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Mot de l’éditrice

À cinq ans, si on m’avait demandé ce que je voulais faire quand je serais grand, j’aurais répondu que je rêvais d’être un artiste. Ensuite, à l’école secondaire, je me destinais à une carrière de vétérinaire. À l’époque – et tout au long de mes études universitaires –, j’envisageais mes choix de carrière en termes de titres de postes. Même si je ne m’attendais pas à faire la même chose toute ma vie, je pensais que mon choix initial aurait beaucoup de poids et déterminerait les portes qui me seraient ouvertes plus tard dans la vie.

Après plusieurs années passées dans l’univers du développement de carrière, je réalise que c’était une vision à court terme. Les gens pivotent constamment dans leur carrière, autant par choix que par nécessité. Les compétences comptent plus que les titres et, à cet égard, la capacité d’évoluer de manière constante est peut-être la plus importante. Un tel constat peut entraîner un certain tiraillement, car l’idée est à la fois libératrice et intimidante.

Le rapport 2021 du Brookfield Institute, intitulé Yesterday’s Gone (Oublions le passé) met en lumière les tendances qui devraient affecter l’emploi au Canada et rend compte de ce tiraillement. Le changement est source de défis à surmonter, mais aussi d’occasions à saisir. Selon les auteurs du rapport, « il est essentiel de comprendre l’ampleur des changements potentiels qui nous attendent afin de mieux préparer les travailleurs à l’avenir du marché du travail au Canada. »

Cette édition entièrement numérique de Careering, sur le thème des « Transitions de carrière », arrive à un moment où la main-d’œuvre connaît d’immenses changements. Les différents articles explorent l’incidence de la pandémie de COVID-19 sur les plans de carrière d’un élève de 12e année et sur la cohorte 2020 de l’Université polytechnique de Kwantlen, ainsi que les expériences d’entrepreneurs soudainement propulsés dans la recherche d’emploi.

La conclusion générale, cependant, est rassurante : avec le soutien des professionnels de l’éducation au choix de carrière et du développement de carrière, les Canadiens peuvent acquérir les compétences nécessaires pour s’épanouir dans le changement. Dans ce numéro du magazine Careering, les auteurs se penchent sur les théories qui soutiennent l’engagement des clients et le développement d’un état d’esprit prêt au changement. Ils proposent des stratégies pour mener des discussions sur la carrière avec les employés, pour faire face aux lacunes en matière d’emploi et pour soutenir l’apprentissage permanent. Ils présentent également des approches efficaces d’exploration de carrière de la maternelle à la 12e année, et bien plus encore.

Comment avez-vous aidé les étudiants, les employés et les clients à pivoter au cours de la dernière année? Prenez-vous des mesures pour assurer l’avenir de votre propre carrière? Nous voulons entendre vos histoires et vos stratégies en lien avec les pivots dans la gestion de votre carrière! Suivez-nous sur Twitter et sur LinkedIn, ou bien utilisez le mot-clic #Careering pour partager vos histoires.

Gardons notre calme, et continuons de pivoter!

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Le potentiel des images pour rejoindre les clientèles vulnérables

L’utilisation d’un outil visuel ou stratégies visuelles facilitent les interventions en développement de carrière auprès de tout type de clients 

 Émilie Robert  

Les modèles d’intervention traditionnels en développement de carrière reposent sur les mots. Les professionnels de ce domaine parlent à leurs clients, écoutent leurs propos, leur administrent des questionnaires et des tests psychométriquesles réfèrent à des sites Web et à des inventaires de métiers et professions. Ces façons de faire sont enseignées depuis longtemps dans les programmes de formation universitaire en counseling de carrière. Elles semblent incontournables et elles ont fait leurs preuves.  

Pourtant, de plus en plus de personnes qui consultent un professionnel de l’orientation semblent différents du client « typique » pour lesquels ces modèles d’intervention ont été validés. En effet, au Canada comme ailleurs, de plus en plus de personnes qui consultent en counseling de carrière sont psychologiquement ou neurologiquement atypiques. D’autres proviennent d’une autre culture que la culture dominante ou ont pour langue maternelle une autre langue que le français ou l’anglais.  

Eintervenant auprès de clients en situation de handicap ou dont le français n’est pas la langue maternelle, j’ai observé que mes stratégies d’intervention et mes outils traditionnels donnaient peu de résultats. Du moins, il me fallait beaucoup de temps pour arriver à répondre aux besoins de mes clientsLa communication orale et écrite, l’écoute active et l’établissement d’une relation de confiance impliquent tous l’échange de motsMalheureusement, mes outils traditionnels sont laborieux pour une large proportion de la clientèle qui consulte les conseillers d’orientation et les conseillers en emploi.  

Devant ce constat, j’ai dû revoir mon approche de façon à mieux comprendre ce groupe hétérogène. Qui sont-ils? Quels sont leurs besoins? En quoi les outils traditionnels ne leur conviennent pas? Comment mieux intervenir auprès d’eux? 

 Les multiples facettes d’un même problème 

Les personnes moins à l’aise avec les mots ont une caractéristique commune : elles doivent souvent déployer plus d’efforts pour retenir des informations qui leur sont communiquées verbalement. Voici les types de personnes les plus touchées par cette réalité. 

Personnes  Difficultés et risques liés à l’échange de mots  Besoins 
Malentendantes   Risque de distorsion du message lié à l’utilisation d’un appareil auditif ou des services d’un interprète   Avoir un appui visuel pour bien saisir les propos échangés 
Ayant un TDAH   Risque de perdre leur fil de pensée lorsqu’on leur donne beaucoup d’informations verbalement  Avoir un cadre clair et des informations concrètes pour demeurer concentrées 
Autistes   Difficulté à traiter les informations verbales, à exprimer leurs pensées et à se projeter dans l’avenir  Voir les concepts pour bien les comprendre 
Dysphasiques   Difficulté à comprendre le sens des mots et à formuler leur pensée et leurs besoins  Avoir un appui visuel pour bien comprendre l’information et s’exprimer 
Dyslexiques   Risque de se fatiguer à la lecture de monographies de professions, de sites Internet ou d’items d’un test psychométrique  
Dont le français ou l’anglais n’est pas la langue maternelle  Risque de mal interpréter les informations verbales 
Des images qui valent bien plus que mille mots
 

Qu’on soit conseiller d’orientation, conseiller en information scolaire ou conseiller en emploi, les interventions individuelles ou de groupe auprès des personnes moins à l’aise avec les mots peuvent être facilitées par le recours à des images, des dessins, des pictogrammes et des graphiques. L’utilisation d’un outil visuel ou de stratégies visuelles offre plusieurs avantages, dont celui de faciliter la compréhension de concepts abstraits, comme la connaissance de soi et la prise de décision.  Cela aide aussi le client à structurer sa pensée et à ouvrir sur des sujets qui émergent à la vue des images présentées. Cette approche permet d’éviter des malentendus sur le sens des mots et de dédramatiser la projection dans le futur (futur emploi, futurs projets d’études).  

Prenons l’exemple de Charles. Cet étudiant avait beaucoup de difficultés à réussir ses cours de sciences naturelles, comme la physique et la chimie, malgré son intérêt pour celles-ci. Ayant cumulé plusieurs échecs, il me rencontre pour choisir une profession scientifique, malgré ses inquiétudes quant à cette voieAyant remarqué que Charles excellait dans les disciplines liées à l’écriture et aux langues, je lui montre une affiche de Ma carrière en images où l’on voit un personnage dont les intérêts sont symbolisés par des outils de construction, une palette de peintre et des instruments de cuisine. Le personnage se demande s’il a les compétences associées à ces intérêts, représentés par les chapeaux que portent les travailleurs de ces domaines (casque de construction, béret de peintre et toque de cuisinier). En lui montrant cette image, puis en consultant son relevé de notes, il a soudainement compris que malgré son intérêt pour les sciences, il avait des forces associées à d’autres types d’activités. Cela lui a permis de s’ouvrir à explorer d’autres domaines professionnels.   

Un levier encore plus fort en contexte de pandémie 

Avec la pandémie et la distanciation socialeles personnes en situation de handicap sont encore plus vulnérables à vivre de l’anxiété provoquée par l’isolement. Elles peuvent aussi se sentir perdues dans un flot d’informations accessibles sur Internet, tout en étant laissées à elles-mêmes dans leur prise de décision. Bien sûr, l’intervention à distance (ou la télépratique) s’est imposée à tous les professionnels de la relation d’aide, mais plusieurs outils traditionnels n’y sont pas adaptés (ex. : tests psychométriques ou répertoires de programmes d’études), encore moins aux clientèles vulnérables  

Cela dit, les logiciels de téléconsultation offrent plusieurs possibilités pour accompagner visuellement les paroles du professionnelL’essentiel est de rendre concrètes les informations échangées durant une consultation ainsi que l’expérience vécue entre lui et son client. Par exemple, il peut partager des sites Web, des images et des graphiques à l’écran, ou encore annoter un tableau blanc pour garder des traces concrètes des échanges. Les affiches numériques de Ma carrière en images sont également un exemple de pratique adaptée, car les informations visuelles sur chaque thème permettent de réduire au minimum les explications requises pour assurer la compréhension du client.  

En somme, les stratégies visuelles facilitent les interventions auprès de tout type de client, particulièrement ceux qui ont des limites sur le plan de la lecture, de l’écriture ou de la paroleOn gagne toujours à communiquer efficacement.  Encore mieux, à réduire l’anxiété que vit un client quant à son choix professionnel. Avec le recours de plus en plus fréquent à la téléconsultation et aux technologies de l’information en contexte d’intervention, c’est par l’image qu’on pourra encore mieux se parler.  

Émilie Robert, c. o., travaille depuis 2011 auprès d’étudiants en situation de handicap au Collège Montmorency, tout particulièrement avec la clientèle ayant un trouble de spectre de l’autisme (TSA). Son livre, Les personnes autistes et le choix professionnel (Septembre éditeur, 2015), lui a valu le prix professionnel 2016 de l’Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec. Plus récemment, elle a publié la trousse Ma carrière en images (Septembre éditeur, 2020) pour faciliter l’intervention en orientation scolaire et professionnelle et en emploi. 

Références 

Robert, Émilie. (2015). Les personnes autistes et le choix professionnel : les défis de l’intervention en orientation, Septembre éditeur.  

Robert, Émilie. (2020). Ma carrière en images, Septembre éditeur.  

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Appliquer les principes de la conception universelle comme voie vers une éducation au choix de carrière inclusive

La stratégie d’apprentissage pour l’avenir des élèves de la maternelle à la 12e année du Nouveau-Brunswick vise à répondre aux besoins de tous les apprenants 

Tricia Berry 

Nous vivons un sentiment d’urgence alors que nous sommes confrontés à de l’incertitude sur le plan de l’éducation, de la société et des finances en raison de la pandémie mondiale. De plus, l’attention accordée aux questions de diversité, d’équité et d’inclusion a suscité des discussions importantes. En tant que spécialiste de l’apprentissage dans le domaine de la conception universelle en matière d’éducation aux choix de carrière œuvrant au sein du gouvernement du Nouveau-Brunswick, je crois qu’il est plus important que jamais de continuer à mettre en œuvre une stratégie de conception universelle relativement à l’éducation aux choix de carrière pour les élèves de la maternelle à la 12e année. La conception universelle est un moyen de répondre aux besoins de tous les apprenants. 

On a longtemps prédit que nos jeunes affronteraient un avenir différent de tout ce que nous avons connu. Cependant, nous n’étions pas préparés à ce que la perturbation du marché du travail se produise si rapidement, et à cause de la COVID-19. Néanmoins, de grands changements sont déjà en cours et ne feront que s’accélérer et prendre de l’ampleur. Si nous ne nous misons pas sur la conception universelle en matière d’éducation aux choix de carrière pour les élèves de la maternelle à la 12e année, de nombreux jeunes, en particulier ceux qui sont économiquement et socialement marginalisés, auront du mal à accéder aux avantages qui en découlent sur le plan de l’éducation, de la société et des finances. Par conséquent, nous devons tenir compte de la diversité, de l’équité et de l’inclusion dans la conception et la prestation de l’éducation au choix de carrière. 

La conception universelle en matière d’éducation aux choix de carrière 

La conception universelle de l’apprentissage (CUA) est un cadre fondé sur les neurosciences cognitives qui permet aux éducateurs de mettre en place des expériences d’apprentissage qui fonctionnent pour un large éventail d’apprenants. Pour ce faire, on offre simultanément de bons soutiens à l’apprentissage et une facilité d’accès au curriculum, tout en maintenant des normes élevées de réussite pour tous les élèves. La CUA permet aux éducateurs d’anticiper la variabilité des apprenants et d’offrir à chaque élève des chances égales d’apprendre (cast.org). 

La conception universelle en matière d’éducation aux choix de carrière consiste à mettre en place des expériences de développement de carrière qui répondent aux besoins de tous les apprenants. Grâce à l’outil UDL Guidelines du CAST, la stratégie d’apprentissage pour l’avenir des élèves de la maternelle à la 12e année du ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance du Nouveau-Brunswick a été conçue de façon à proposer de multiples moyens de participation, d’expression et de représentation. L’utilisation de la CUA nous permet de surmonter les barrières systémiques qui entraînent un accès inéquitable à l’éducation au choix de carrière. C’est un moyen de promouvoir la justice sociale. 

Wide Angle View Of High School Students Sitting At Desks In Classroom Using Laptops
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Élaborer une stratégie équitable d’éducation au choix de carrière 

La stratégie d’apprentissage pour l’avenir des élèves de la maternelle à la 12e année, qui repose sur les principes de la CUA, a été élaborée en concertation avec tous ceux qu’elle représente. Le gouvernement a donné la priorité à l’inclusion de diverses perspectives afin de déterminer les pratiques exemplaires qui préparent les jeunes à réussir aujourd’hui et à l’avenir. Nous avons organisé des groupes de discussion réunissant des étudiants et des éducateurs à l’échelle de la province pour leur demander ce qu’ils estimaient nécessaire pour préparer l’avenir. Nous avons également établi des partenariats consultatifs avec des organismes représentant les étudiants handicapés, les personnes de la communauté LGBTQ2 +, les nouveaux arrivants au Nouveau-Brunswick et les étudiants autochtones. Cette contribution a guidé l’élaboration de notre stratégie d’éducation au choix de carrière, y compris l’établissement de pratiques exemplaires d’apprentissage pour préparer l’avenir. Ces pratiques ne sont pas propres à une matière, leur permettant d’être intégrées de façon universelle et intentionnelle dans tout le curriculum. 

L’intégration du développement de carrière au curriculum, de la maternelle à la 12e année, crée un accès équitable à l’éducation au choix de carrière. Dans l’article « Making Career Development ‘Stick’ in K-12 » (2020), Adriano Magnifico accomplit un travail remarquable en décrivant les étapes nécessaires pour promouvoir, prioriser, planifier et faire évoluer les programmes de développement de carrière dans les écoles pour les élèves de la maternelle à la 12e année. Une éducation au choix de carrière inclusive et équitable nécessite l’utilisation de pratiques d’apprentissage exemplaires pour préparer l’avenir dès la maternelle et tout au long du parcours scolaire et dans toutes les matières. 

Traditionnellement, l’éducation au choix de carrière relevait de la responsabilité de quelques personnes et n’avait lieu que dans des classes désignées, ce qui limite l’accès. Nous travaillons assidûment à changer le discours entourant l’idée du développement de carrière. Nous aidons les éducateurs à considérer l’éducation au choix de carrière comme le développement des compétences, des stratégies, du soutien et de la capacité d’adaptation des élèves nécessaires pour réussir la transition et réaliser leur avenir préféré. C’est dans ce cadre que tous les éducateurs, quel que soit le niveau d’enseignement ou la matière, deviennent des influenceurs de carrière. 

Des exemples de la conception universelle en matière d’éducation aux choix de carrière au Nouveau-Brunswick 

Le Nouveau-Brunswick a lancé de nombreuses initiatives dans les écoles intermédiaires afin de faire en sorte que le développement de carrière atteigne tous les apprenants, de l’apprentissage professionnel pour les éducateurs à l’apprentissage par l’expérience. Voici quelques exemples de la conception universelle en matière d’éducation aux choix de carrière : 

Former les formateurs : Les éducateurs ont besoin d’une formation en développement de carrière pour pouvoir offrir une éducation au choix de carrière à tous les élèves (Conseil des ministres de l’Éducation, Canada). Le ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance du Nouveau-Brunswick a produit une série de modules de formation professionnelle à l’intention des éducateurs qui comprennent diverses stratégies et idées pédagogiques pour favoriser la participation, l’expression et la représentation en matière d’éducation aux choix de carrière. Les éducateurs créent une « boîte à outils » qui fournit les ressources et les idées pour offrir une éducation au choix de carrière universelle. De plus, les éducateurs suivent un cours en ligne intitulé Des salles de classe diversifiées linguistiquement et culturellement, qui améliorera leur compétence à travailler avec les nouveaux arrivants et les apprenants de langue anglaise. 

Les premières années : Dans les écoles primaires, les enseignants ont eu la possibilité de choisir parmi une sélection de livres de classe gratuits pour faciliter l’exploration des professions par les enfants tout en tenant compte des compétences socioémotionnelles nécessaires pour préparer l’avenir. Selon le chapitre « Children’s Reasoning about Career Development: The Conceptions of Career Choice and Attainment Model » (K. Howard et S. Dinius) de la publication 2019 du CERIC, Career Theories and Models at Work: Ideas for Practice (ceric.ca/theories), les éducateurs ont été encouragés à intégrer la CUA et les livres d’histoires pour aider les élèves à comprendre les professions et les carrières. Chaque éducateur a appliqué les principes de la CUA pour répondre aux besoins de ses apprenants. Les moyens d’expression variés comprenaient la lecture à voix haute de manière indépendante, la lecture entre amis ou l’utilisation d’enregistrements audio. Les éducateurs ont organisé des tâches indépendantes, des expériences en petits groupes et en grand groupe, et utilisé des technologies d’assistance pour faire participer les élèves. Plus important encore, les élèves pouvaient utiliser la manière de leur choix pour représenter leurs connaissances. Pour encourager l’utilisation de la CUA, les éducateurs ont reçu une liste de vérification et un modèle de plan de leçons pour s’assurer que tous les apprenants étaient pris en compte dans le développement de l’apprentissage de l’éducation aux choix de carrière associé aux livres ou aux leçons. 

L’apprentissage par l’expérience dans les écoles intermédiaires : Le Nouveau-Brunswick investigue, invente et innove! (I3) Le projet-pilote sur l’éducation au choix de carrière, conçu avec Partenariat en Éducation, a été utilisé dans tout le curriculum dans les écoles intermédiaires, et des classes entières ont pu y participer. Selon ce modèle d’apprentissage par l’expérience, les élèves cernent un problème concret et inventent une solution, puis procèdent à reculons pour en apprendre davantage sur les carrières et les compétences liées à leurs domaines d’intérêt, plutôt que sur les titres de poste. Les principes de la CUA ont guidé les éducateurs pour fournir de multiples moyens de représentation tels que de la recherche en ligne, des entretiens d’information avec des membres de la communauté et des conférenciers invités. De plus, les élèves ont utilisé de nombreux moyens de participation comme l’apprentissage coopératif, les exercices pratiques en autonomie, les tâches indépendantes ou l’utilisation de la technologie. Enfin, l’expression de l’apprentissage comprenait l’utilisation de portfolios numériques ou d’affiches de présentation. 

Considérer la culture : Nous reconnaissons que nous avons des élèves et des familles qui peuvent éprouver de la difficulté à accéder à l’information en raison de barrières linguistiques, nous travaillons donc avec des organismes locaux d’aide aux immigrants pour faire traduire le matériel provincial des services de soutien à l’éducation dans les 14 langues les plus parlées au Nouveau-Brunswick (y compris deux langues autochtones et la langue des signes américaine). Cela comprend un récent document sur le développement de carrière intitulé « Espoir pour l’avenir. Avantages de planifier l’avenir à l’aide de myBlueprint ». MyBlueprint est un planificateur en ligne d’études, de carrière et de vie qui est offert à tous les éducateurs, les étudiants et les familles au Nouveau-Brunswick. Il fournit des outils de développement de carrière accessibles en tout temps et peut facilement être utilisé dans plusieurs langues. 

Conclusion 

Alors que nous faisons le bilan de notre situation actuelle et considérons les défis posés par la COVID-19, on nous rappelle qu’il est maintenant temps de faire progresser la conception universelle de l’éducation au choix de carrière de façon systématique. Alors que nous nous efforçons de combler l’écart en matière d’éducation au choix de carrière, n’oublions pas les principes de base de la conception universelle de l’apprentissage. Chaque jeune doit bénéficier de l’égalité des chances selon la stratégie d’apprentissage pour l’avenir des élèves. 

Tricia BerryB.A., B.Éd., M.Éd., est une spécialiste de l’apprentissage dans le domaine de la conception universelle en matière d’éducation au choix de carrière au sein du ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance du Nouveau-Brunswick. Elle possède 16 ans d’expérience en enseignement lié à l’orientation professionnelle et une formation en tant que conseillère en emploi. De plus, Tricia Berry travaille à temps partiel à la School of Education de l’Université Saint-Thomas.

Références  

Arthur, N. (2019). Career Theories and Models at Work: Ideas for Practice. CERIC  

CMEC Reference Framework for Successful Student Transitions. cmec.ca/Publications/Lists/Publications/Attachments/372/CMEC-Reference-Framework-for-Successful-Student-Transitions-EN.pdf   

Council of Atlantic Ministers of Education and Training (CAMET). (n.d.). camet-camef.ca/   

Magnifico, A. (2020). Making Career Development Stick K-12. Careering. /ceric.ca/2020/10/making-career-development-stick-in-k-12/  

Novak, K., & Thibodeau, T. (2016). UDL in the cloud: How to design and deliver online education using universal design for learning. Wakefield, MA: Cast Professional Publishing. 

Paniagua, A. and D. Istance (2018), Teachers as Designers of Learning Environments: The Importance of Innovative Pedagogies, Educational Research and Innovation, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264085374-en   

Stewart, J., & Martin, L. (2018). Bridging two worlds: Supporting newcomer and refugee youth: A guide to curriculum implementation and integration. Toronto: CERIC. 

Thoma, C. A., Bartholomew, C. C., & Scott, L. A. (2009). Universal design for transition: A roadmap for planning and instruction. Baltimore: Paul H. Brookes. 

Universal Design for Learning. cast.org   

EN SAVOIR PLUS
two men talking across table in officeCareering

Le développement de carrière comme impératif de justice sociale 

Ces questions à l’intention des professionnels de la carrière appellent à une action intentionnelle pour lutter contre le racisme envers les Noirs 

Tracey Lloyd 

Nous vivons une période troublante. Près d’un an après le début de la pandémie et en raison d’incidents inquiétants causés par les conflits raciaux et l’injustice, nous sommes nombreux à mener une réflexion approfondie sur ce que tout cela signifie dans notre vie personnelle et professionnelle. Le nouveau coronavirus et le mouvement Black Lives Matter ont convergé pour exercer une influence considérable sur notre bien-être, ce qui nous a confrontés à l’incertitude. 

Les professionnels du développement de carrière ont traditionnellement aidé leurs clients à traverser les périodes d’ambiguïté et d’anxiété, qu’il s’agisse d’une transition de l’école au marché du travail, d’une perte d’emploi, d’un changement de carrière ou d’une amélioration des compétences. Certains travaillent avec des personnes issues de groupes sous-représentés qui sont déjà désavantagées et évincées du marché du travail. La pandémie aggrave la fracture sociale et économique, amenant les professionnels de la carrière à se sentir interpellés dans leur capacité à insuffler l’espoir et à être au service de leurs clients.  

De nombreuses organisations ont répondu aux pressions du public pour lutter contre le racisme envers les Noirs. Alors que les institutions ont la responsabilité d’élaborer des politiques et des pratiques inclusives pour améliorer la vie des personnes appartenant à un groupe économiquement et socialement marginalisé, les professionnels du développement de carrière ont également un rôle important à jouer pour faciliter l’accès à des possibilités de carrière et d’emploi intéressantes pour leurs clients. Quel que soit le poste que vous occupez dans ce domaine, je vous invite à réfléchir à certaines questions qui nécessitent une plus grande prise de conscience, une action intentionnelle et une responsabilité personnelle. Je vous ferai part de quelques réflexions sur les causes profondes et les facteurs systémiques qui limitent la réussite professionnelle des personnes noires, des répercussions des récents événements mondiaux et des mouvements de justice sociale sur les discussions sur la carrière, ainsi que du rôle essentiel de sensibilisation et d’engagement envers les employeurs. 

Comprendre le contexte 

Hirschi (2012) décrit quatre capacités essentielles à la réussite professionnelle : 

  • Ressources identitaires : les aspirations personnelles et la perception de soi par rapport au travail; 
  • Capital humain : les connaissances et les compétences acquises; 
  • Ressources sociales : les relations personnelles et professionnelles; 
  • Ressources psychologiques : le niveau d’optimisme, d’espoir et de résilience. 

Le racisme envers les Noirs affecte le développement des capacités pour bon nombre de nos clients. De nombreuses études ont documenté les effets du racisme et la disparité des résultats en matière d’éducation, d’emploi et de santé pour les membres de diverses communautés noires au Canada (Environics Institute, 2017, 2019; Maynard, 2018; gouvernement du Canada, 2020). L’expérience des personnes noires continue de pâtir des systèmes d’oppression enracinés dans le colonialisme et la suprématie blanche. 

En adoptant les quatre capacités de Hirschi dans mon propre travail, je prends en considération l’expérience des personnes noires dans le système éducatif, qui est façonné par les faibles attentes des enseignants, le groupement par aptitudes, ainsi que des taux de suspension, d’expulsion et de décrochage disproportionnés. Le manque de représentation dans le curriculum et dans la classe affecte l’identité professionnelle. Je suis également consciente de l’effet du climat sociopolitique et des images médiatiques de la communauté noire sur la perception de soi, le sentiment d’appartenance, l’espoir et le bien-être psychologique global. Comme l’affirme Hooley (2020), « Nos carrières ne sont pas seulement l’expression de notre psychologie ou de notre volonté; elles sont ancrées dans les structures sociales. » [Traduction libre] 

Les discussions sur la carrière avec vos clients noirs doivent être fondées sur une compréhension de l’histoire et du contexte qui influencent leur trajectoire professionnelle. Cela nécessite également une compréhension de la positionnalité, en d’autres termes, leur identité, leur situation sociale et leur vision du monde. Comment votre propre positionnalité et privilège influencent-ils votre travail en tant que professionnel du développement de carrière? Comment cette compréhension de l’histoire et de l’expérience des personnes noires se révèle-t-elle dans votre pratique? Dans quelle mesure êtes-vous à l’aise de discuter des craintes de discrimination avec vos clients?  

Remettre en question le système 

McMahon, Arthur et Collins (2008) nous rappellent la relation historique entre le développement de carrière et la réforme de la justice sociale. Les auteurs demandent aux professionnels d’examiner les contextes sociaux, économiques et politiques de leur travail. Ils nous encouragent à équilibrer l’attention que nous portons à l’individu et à faire une évaluation plus critique des systèmes qui déterminent l’accès, le statut et la trajectoire professionnelle. Hooley (2020) avance que parfois les clients tirent avantage d’une aide individuelle, d’autres fois d’un changement systémique, mais plus souvent des deux à la fois. Comment votre approche de l’orientation professionnelle pourrait-elle être en accord avec les normes de la culture dominante et quel est le message transmis à vos clients?  

Afin d’assurer la représentation des clients noirs et de favoriser un sentiment d’appartenance, pensez à la composition de votre équipe, aux événements sur les carrières, ainsi qu’aux images et au langage utilisés dans votre matériel promotionnel et documentation d’apprentissage. Quels noms utilisez-vous habituellement sur les exemples de curriculum vitæ? Quels visages illustrent les brochures du programme et les présentations PowerPoint? Si des clients font partie de votre modèle de prestation de services, des leaders étudiants noirs ou des personnes noires chargées d’aider les pairs sont-ils engagés? Faites-vous participer des professionnels, des spécialistes de l’industrie et d’anciens élèves noirs à des événements sur les carrières? J’encourage les animateurs de ces séances à poser des questions liées à l’équité aux conférenciers invités, car certains de vos clients noirs peuvent être mal à l’aise d’exprimer leurs préoccupations. 

L’engagement envers les employeurs est également un élément essentiel de notre travail et nous permet de remédier aux préjugés systémiques en matière de recrutement et de maintien en emploi. Les services d’orientation professionnelle doivent repenser leur approche des relations avec les employeurs en posant des questions telles que : Comment évaluez-vous l’engagement d’un employeur envers les pratiques anti-oppressives? Comment réagissez-vous aux employeurs qui font de la discrimination? Quelles ressources pouvons-nous élaborer pour aider les clients à évaluer l’engagement d’un employeur potentiel à lutter contre le racisme envers les Noirs? 

Les services d’orientation professionnelle devraient également recueillir des données fondées sur la race et procéder à l’évaluation régulière de l’efficacité des programmes. Les données d’évaluation révéleront qui sont les participants, la qualité de l’expérience et les résultats pour les clients noirs. Les critères importants pour guider la collecte de données sont : 

  • Le taux auquel les clients noirs obtiennent des emplois et des stages par rapport à d’autres groupes 
  • Les types de possibilités d’emploi qui débouchent sur un emploi et leur expérience de stage 
  • La qualité de la supervision 

Le refus de recueillir des données fondées sur la race et d’y réfléchir de manière critique confirme le racisme systémique. Remettre en cause le système signifie que nous questionnons continuellement les structures dans lesquelles nous travaillons, interagissons et que nous favorisons à titre de professionnels du développement de carrière.  

Miser sur les forces 

Les discussions sur la carrière sont intrinsèquement relationnelles et visent à déceler les forces du client. La confiance en soi est gage de succès. En faisant preuve d’un regard positif à l’égard du client, le professionnel du développement de carrière contribue à renforcer cette confiance et transmet ce qu’Amundson (2018) qualifie de « sentiment d’importance » au client. 

Remettre en question nos idées préconçues et être conscient de notre positionnalité et de nos préjugés inconscients nous permettra de mettre en place des interventions en développement de carrière plus significatives, autant du point de vue individuel que systémique. En conséquence, les aspirations professionnelles et le champ des possibles du client s’élargiront naturellement. La poursuite de la justice sociale dans notre travail nous pousse à favoriser les relations professionnelles, les expériences de travail de qualité, un mentorat utile et à engager des superviseurs à titre de champions pour garantir que les membres des groupes économiquement et socialement marginalisés puissent réussir. Ceci est particulièrement important pour les clients noirs, qui sont souvent minoritaires dans de nombreux milieux de travail. 

Poursuivre la conversation 

Le développement de carrière est un impératif de justice sociale. Je termine par les cinq balises de Hooley (2020) : développer la conscience critique, nommer l’oppression, remettre en question ce qui est normal, encourager les gens à travailler ensemble et travailler à différents niveaux. En ce qui me concerne, compte tenu de mon travail et de mon leadership dans le domaine, cet exercice de réflexion et ce parcours d’apprentissage doivent être poursuivis. 

Bien que ce que j’avance soit également pertinent pour d’autres groupes économiquement et socialement marginalisés, j’ai choisi de me concentrer sur l’expérience des personnes noires pour veiller à ce qu’elle ne soit pas noyée dans la conversation plus large sur l’équité, la diversité et l’inclusion. Selon le cadre actuel, les clients et étudiants noirs restent désavantagés. J’espère que les questions que j’ai soulevées incitent à poser un regard critique sur notre pratique et mettent en lumière notre rôle en tant que professionnels de la carrière pour élever la discussion sur la carrière et améliorer la trajectoire professionnelle des membres des communautés noires. 

Tracey Lloyd est directrice des services d’orientation professionnelle et de l’enseignement coopératif au Centennial College, situé à Toronto. Avant de se joindre à l’équipe du Centennial College, Tracey Lloyd était directrice des programmes d’emploi à Tropicana Community Services. Elle a également enseigné dans le cadre du programme de formation des conseillers d’orientation et de développement de carrière au George Brown College. Madame Lloyd est titulaire d’un doctorat en éducation des adultes de l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario de l’Université de Toronto. 

Références 

Amundson, N.E. (2018). Active Engagement: The being and doing of career counselling, anniversary edition. Richmond, B.C: Ergon Communications. 

Environics Institute (2017). The Black Experience Project in the GTA. Toronto, Ontario. environicsinstitute.org/docs/default-source/project-documents/black-experience-project-gta/black-experience-project-gta—1-overview-report.pdf?sfvrsn=553ba3_2 

Environics Institute and Canadian Race Relations Foundation. (2019). Race Relations in Canada: A survey of Canadian public opinion and experience. Toronto, Ontario. crrf-fcrr.ca/images/Race_Relations_in_Canada_2019_Survey_-_FINAL_REPORT_ENGLISH.pdf 

Government of Canada. (2020). Social Determinants and Inequities in Health for Black Canadians: A snapshot. Ottawa, Ontario. canada.ca/content/dam/phac-aspc/documents/services/health-promotion/population-health/what-determines-health/social-determinants-inequities-black-canadians-snapshot/health-inequities-black-canadians.pdf 

Hirschi, A. (2012). The Career Resources Model: An integrative framework for career counsellors. British Journal of Guidance & Counselling, Vol. 40(4), 369-383. http://dx.doi.org/10.1080/03069885.2012.700506 

Hooley, T. (2020, January 26th). Career Development and Social Justice: Developing emancipatory practice. Cannexus 2020 Conference, Ottawa, Ontario. cannexus.ceric.ca/?page_id=1770&limit=&q=tristram+hooley&catid=23 

Maynard, R. (2018). Policing Black Lives: State violence in Canada from slavery to present. Black Point, Nova Scotia: Fernwood Publishing. 

McMahon, M., Arthur, N., & Collins, S. (2008). Social Justice and Career Development: Views and experiences of Australian career development practitioners. Australian Journal of Career Development, 17(3), 15-25. 

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diverse group of people having meeting in industrial-style officeCareering

L’antiracisme initié de l’intérieur : remise en cause de la suprématie blanche sur le lieu de travail

Comment la Kootenay Career Development Society s’efforce de combattre le racisme institutionnalisé dans ses propres murs

Malorie Moore

author headshotDans son livre paru en 2017 et intitulé Why I’m No Longer Talking to White People about Race, Reni Eddo-Lodge déclare : « La chose perverse dans notre structure raciale actuelle, c’est qu’il a toujours incombé à ceux qui sont au bas de l’échelle de faire des efforts pour la changer. Pourtant, le racisme est un problème de Blancs. Il met en relief les angoisses, l’hypocrisie et les doubles normes liées au fait d’être Blanc. C’est un problème ancré dans la psyché de la blancheur et que les Blancs sont responsables de résoudre. On ne peut pas tout faire de l’extérieur. »

Reni Eddo-Lodge a raison : la responsabilité de remettre en question la suprématie blanche au sein des structures organisationnelles incombe aux personnes qui ont le pouvoir d’effectuer de tels changements, c’est-à-dire les gestionnaires et les dirigeants, particulièrement s’ils sont Blancs. C’est dans cet esprit que j’ai écrit cet article qui, je l’espère, pourra inspirer d’autres organisations dont la direction et le conseil d’administration sont majoritairement composés de Blancs, afin de les inciter à prendre des mesures concrètes. Veuillez noter que je ne parle pas à titre d’experte, et qu’en ce qui concerne notre organisme, nous n’en sommes qu’au tout début de notre processus vers une approche antiraciste. Cet article n’est en aucun cas un guide pratique, mais plutôt un compte rendu transparent de la manière dont notre organisme a commencé à lutter contre le racisme institutionnalisé sur le lieu de travail.


Une note sur la suprématie blanche

Veuillez noter que pour les besoins de cet article, toute référence à l’expression suprématie blanche renvoie à un ensemble complexe de structures, de systèmes et d’attitudes sociétales. Dans son livre Me and White Supremacy publié en 2020, Layla F. Saad décrit la suprématie blanche de la manière suivante : « La suprématie blanche est une idéologie raciste qui repose sur la croyance que les Blancs sont supérieurs à bien des égards aux personnes d’autres races et que, par conséquent, ils devraient être dominants par rapport aux autres races. La suprématie blanche n’est pas seulement une attitude ou une façon de penser. Elle s’étend également à la manière dont les systèmes et les institutions sont structurés pour maintenir cette domination blanche… En fait, la suprématie blanche est loin d’être marginale. Dans les sociétés et les communautés centrées sur les Blancs, c’est le paradigme dominant qui constitue le fondement à partir duquel les normes, les règles et les lois sont créées. »


Qui sommes-nous?

La Kootenay Career Development Society (KCDS) est un organisme à but non lucratif qui œuvre dans de nombreuses communautés rurales de la région East Kootenays, en Colombie-Britannique. Nous comptons 60 employés, et notre personnel, notre conseil d’administration et nos équipes de direction sont majoritairement formés de Blancs. Bien que nous ayons mis en œuvre depuis plusieurs années un certain nombre de pratiques qui mettent l’accent sur un engagement à l’égard de la diversité et de l’inclusion, tant dans notre prestation de services que dans le recrutement, ce n’est qu’au printemps 2020 que nous avons pris du recul pour évaluer de manière critique notre position organisationnelle en matière de lutte contre le racisme.

Comment avons-nous initié notre processus?

Ce processus a été lancé à l’initiative d’un gestionnaire qui est une personne de couleur. Bien que j’applaudisse mon équipe pour son ouverture d’esprit, sa capacité d’écoute et son passage à l’action, il faut néanmoins noter que, si nous concevons le racisme comme un problème de Blancs, un tel processus aurait pu, et aurait dû être entrepris plus tôt par un gestionnaire blanc. Je mentionne ceci pour souligner le fait que les efforts de lutte contre le racisme sont souvent pris en charge par les personnes autochtones, noires et de couleur (PANDC), ainsi que pour encourager les autres Blancs qui lisent ceci à agir plus tôt. L’un des plus grands défis dans le démantèlement du racisme sur le lieu de travail est peut-être de faire ce premier pas. Toutefois, en tant que Blancs bien intentionnés, nous ne pouvons pas nous permettre d’hésiter à prendre des mesures de peur de ne pas avoir toutes les réponses.

Nos premiers pas

En premier lieu, nous avons commencé par créer un groupe de travail sur l’antiracisme, dont le but était de déterminer et de prendre des mesures en lien avec un certain nombre de stratégies de lutte contre le racisme, et ce, dans les meilleurs délais. Pour atteindre cet objectif, nous devions nous réunir souvent (deux à quatre fois par mois) et, dans le cadre de ces rencontres, convier des membres du personnel de gestion ayant une capacité de prise de décision. Dès le début, des membres de notre équipe de direction, notamment notre directeur général, ont participé activement à ce groupe de travail. Ces rencontres nous ont amenés à entreprendre plusieurs projets.

Avec la contribution de tous nos membres du personnel, nous avons créé une déclaration de solidarité visant à exprimer notre soutien au mouvement Black Lives Matter. Nous avons également élaboré un énoncé de reconnaissance territoriale à l’égard des peuples autochtones, afin de l’inclure dans nos communications par courriel et d’en faire mention au début des réunions du personnel et autres rencontres. La déclaration de solidarité et l’énoncé de reconnaissance des territoires autochtones se trouvent tous deux sur notre page Web et ont été diffusés sur les médias sociaux. Anticipant une certaine résistance de la part du personnel ou des membres de la communauté, nous avons réfléchi à des moyens de répondre à d’éventuels commentaires négatifs ou racistes. Cependant, la réaction a été beaucoup moins négative que ce que nous appréhendions au départ, et même que la plupart des commentaires que nous avons reçus étaient extrêmement positifs.

« … nous ne pouvons pas nous permettre d’hésiter à prendre des mesures de peur de ne pas avoir toutes les réponses. »

En ce qui concerne la prestation de services, nous avons reconnu la nécessité de faire appel à la participation du personnel de première ligne dans la formation continue sur des sujets liés au racisme et à la suprématie blanche. Nous avons fourni des ressources pertinentes au personnel et encouragé le développement professionnel par l’entremise de différents cours, comme Indigenous Canada (Autochtones du Canada), ainsi que des formations internes sur les compétences culturelles et les pratiques culturellement sécuritaires. Nous avons également alloué du temps de travail à un club de lecture pour les employés, dans le cadre duquel des membres du personnel ont lu ou écouté la série de conférences de Thomas King Massey intitulée The Truth about Stories: A Native Narrative (La vérité sur les histoires : le point de vue autochtone). De plus, les membres du club se réunissaient deux fois par semaine pour discuter de ce qu’ils avaient appris.

Soulignons que nous avons aussi organisé une formation sur l’antiracisme par l’entremise du groupe Future Ancestors, basé en Alberta. Chaque année, la KCDS offre à son personnel une formation sur la diversité et l’inclusion. Toutefois, cette formation sur l’antiracisme était bien différente, car on y encourageait explicitement les Blancs à assumer activement leur complicité individuelle au sein d’une société reposant sur des bases de racisme et de colonialisme anti-Noirs. Chaque mois, nous prenons le temps, en équipe, de passer en revue le contenu de cette formation et d’examiner comment nous pouvons intégrer cet apprentissage dans nos rôles de fournisseurs de services. Certaines conversations récentes ont mis l’accent sur l’importance de réfléchir à nos propres préjugés tout au long du processus de prestation de services, et de faire un effort conscient pour éviter le langage oppressif et choisir nos mots avec soin.

En tant que gestionnaires et dirigeants, nous avons eu droit à une formation spécifique sur l’antiracisme, ce qui nous a donné l’occasion d’examiner en détail notre déclaration de solidarité. Nous avons été encouragés à déterminer de manière précise ce que nous avions l’intention de faire pour démontrer notre engagement à l’égard des idées exprimées dans cette déclaration. C’est pourquoi, dans cette perspective, nous avons veillé à ce que notre plan stratégique comporte un objectif d’embauche plus diversifié, ainsi que de meilleurs services aux clients qui sont sous-représentés dans notre région. Nous sommes toujours en train d’affiner notre plan stratégique, et je reconnais que nous avons encore du travail à faire pour définir plus précisément nos objectifs et nous assurer d’éviter les formulations vagues ou cryptiques.

Enfin, nous avons reconnu qu’en tant que membres d’une équipe de direction à prédominance blanche, nous n’avons pas les outils et les ressources nécessaires pour effectuer tous les « bons » changements. Nous avons reconnu le fait que pour être efficaces, nous avions besoin d’aide. À cette fin, nous avons pris la décision d’engager un consultant externe, afin de nous aider à déterminer les changements que nous devons effectuer pour évoluer vers un modèle d’organisation davantage axé sur l’antiracisme.

Voilà donc les premières étapes que nous entreprenons en tant qu’organisation pour lutter contre la suprématie blanche sur notre lieu de travail. Nous avons fait des erreurs, et nous continuerons à en faire. Cependant, je peux dire avec gratitude que la peur de faire des erreurs ne nous a pas empêchés d’essayer d’essayer de nous améliorer.

Malorie Moore est une travailleuse sociale autorisée à l’emploi de la Kootenay Career Development Society. Elle s’appuie sur son expérience en santé mentale et son travail avec les populations marginalisées pour soutenir le développement clinique de l’organisme et du personnel de première ligne. Madame Moore adore vivre dans la région des Kootenays, où elle passe son temps libre à faire du canot, de l’escalade et diverses activités dans les montagnes.

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fountain pen on notebookCareering

Mot de l’éditrice

Je m’appelle Lindsay Purchase. Je suis une femme blanche, cisgenre et non handicapée. J’ai une formation universitaire et j’ai la chance de pouvoir faire un travail que je trouve valorisant. J’habite à Toronto, un territoire avec lequel les Hurons-Wendat, les Pétuns, les Haundenosaunee, les Anichinabés et les Mississaugas Anichinabés of New Credit ont établi un lien particulier. Aujourd’hui, elle accueille des peuples autochtones de toute l’île de la Tortue et de nombreux peuples venus d’ailleurs.    

Pourquoi vous dis-je cela? En suivant l’exemple de deux des collaboratrices de ce numéro, Natasha Caverley et Kathy Offet-Gartner, je révèle ma position sociale pour reconnaître les pouvoirs et les privilèges que je détiens. Ceux-ci ont façonné ma vision du monde et les possibilités qui m’ont été offertes.   

Ce numéro de Careering, sur le thème de la justice sociale, souligne l’importance de comprendre le contexte dans lequel les gens poursuivent leurs études et travaillent, ou qui les empêche de réaliser pleinement leur potentiel. Cela nous rappelle également que le développement de carrière constitue un outil puissant pour lutter contre les inégalités et faire progresser le bien public.  

Les collaborateurs de ce numéro examinent la justice sociale sous divers angles. Ils luttent contre le racisme envers les personnes noires en milieu de travail et nous mettent au défi de faire de même. Ils proposent des ressources et des stratégies pour soutenir les étudiants transgenres, les nouveaux arrivants au Canada, les clients du système de justice pénale et les demandeurs d’emploi neurologiquement atypiques. Les auteurs examinent le potentiel de l’éducation aux choix de carrière pour les élèves de la maternelle à la 12e année afin de répondre aux besoins de tous les apprenants. Ils analysent les répercussions de la COVID-19 sur le marché du travail et réfléchissent à la manière de reconstruire dans de meilleures conditions.  

En nous faisant part de leurs expériences et de leurs idées, les collaborateurs lancent un appel aux professionnels de la carrière à rejeter la complaisance. Il y a beaucoup de travail à faire, et ce numéro de Careering nous rappelle la grande promesse du développement de carrière : aider à bâtir une société plus juste.  

Nous espérons que vous vous joindrez à nous pour poursuivre ces discussions au congrès Cannexus21 virtuel du CERIC, ayant pour thème « Le développement de carrière : un domaine d’intérêt public », qui commence le 25 janvier. Entre-temps, faites-nous savoir sur les médias sociaux, au moyen du mot-clic #Careering, comment votre travail s’inscrit dans une perspective de justice sociale et ce que vous pensez de cette question. 

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man doing yoga at homeAutomne 2020

Le potentiel de la mindfulness en développement de carrière

Un outil flexible permettant aux individus de se connecter à leurs intérêts et à leurs valeurs

Gabrielle Beaupré et Geneviève Taylor

author headshotsMaya vient d’entamer sa deuxième session comme étudiante au baccalauréat en comptabilité. Elle est déçue de ses résultats scolaires et elle commence à douter de son choix de carrière. Elle se demande si elle sera assez performante pour éventuellement obtenir le titre professionnel qu’elle visait initialement. Elle s’inquiète beaucoup et ressasse souvent des pensées négatives. Depuis peu, elle éprouve des difficultés de sommeil et de concentration et ne voit plus ses amis autant qu’avant. Finalement, elle manque d’énergie pour toutes ses activités, incluant ses études et son travail à temps partiel.

Cette situation illustre bien les enjeux de santé psychologique présents chez les étudiants universitaires, alors que la proportion d’étudiants vivant du stress, de l’anxiété et de la détresse émotionnelle ne cesse d’augmenter (UEQ, 2019). À cela s’ajoutent les questionnements liés à la carrière, au choix de programme ou au cheminement professionnel, fréquents chez la population étudiante. Les résultats d’une enquête pancanadienne récente avancent que près de 40% des étudiants postsecondaires ont de la difficulté à gérer leurs problèmes liés à la carrière (ACHA, 2019). Ils vivent également de l’anxiété causée par un marché du travail de plus en plus instable et incertain et par une multitude d’opportunités, ce qui peut induire un sentiment de « paralysie » et d’insatisfaction chronique (Schwartz, 2004). Malheureusement, les professionnels des services d’aide aux étudiants en milieu universitaire dénoncent le manque de temps et de ressources pour accompagner adéquatement les étudiants (ASEUCC, 2013). Ils doivent donc compter sur de nouvelles approches pour renforcer l’autodétermination des étudiants dans leur réflexion sur l’avenir.

La mindfulness comme super-pouvoir 

La mindfluness (présence attentive ou pleine conscience) apparaît comme un super-pouvoir pouvant aider les étudiants postsecondaires à faire face aux enjeux reliés à la carrière. La mindulness décrit généralement l’état de conscience d’une personne qui porte délibérément son attention sur son expérience (interne et externe), dans l’instant présent, sans jugement et avec acceptation (Kabat-Zin, 2003). Concrètement, une personne «mindful» a tendance à être plus attentive à ses pensées, ses émotions ou ses sensations, et ce avec acceptation et bienveillance. Comme un muscle que l’on exerce, la mindfulness peut être développée par le biais de diverses interventions prenant la forme de pratique personnelle ou de méditation guidées:

  • exercices d’attention dirigée sur différents objets (respiration, sensations corporelles, cinq sens) ;
  • exercices de l’attention dirigée sur les mouvements du corps ;
  • exercices de compassion pour soi et pour les autres.
L’impact de la mindfulness sur le bien-être

Plusieurs études scientifiques ont démontré les liens entre la mindfulness et différents aspects du bien-être. D’abord, la mindfulness aide à développer la souplesse psychologique, un facteur important pour la santé mentale, permettant à l’individu de s’adapter à un changement ou une situation difficile (Kashdan & Rottenberg, 2010). Avec la COVID-19, certains auteurs se sont intéressés aux facteurs de résilience en contexte de pandémie. Ils ont décrit la mindfulness comme un mécanisme d’adaptation aidant les gens à être plus résilients face à l’incertitude (Polizzi, Lynn et Perry, 2020). En effet, la mindfulness encourage l’individu à se concentrer sur l’instant présent, ce qui atténue les ruminations du passé et l’anticipation négative du futur.  De plus, les interventions basées sur la mindfulness permettraient de réduire le stress et les symptômes dépressifs des étudiants universitaires et les clients en orientation (Piot, 2020; Grégoire et al., 2016). Enfin, la mindfulness aiderait les étudiants à réguler leurs émotions lorsqu’ils traversent une impasse décisionnelle liée à leurs objectifs de carrière (Marion-Jetten, Taylor et Schattke, soumis).

« La mindfulness aide à développer la souplesse psychologique, un facteur important pour la santé mentale, permettant à l’individu de s’adapter à un changement ou une situation difficile. »

La mindfulness et la carrière

Au-delà des bienfaits sur le bien-être et sur la régulation des émotions, comment la mindfulness peut-elle agir comme super-pouvoir relié à la carrière?

Mieux se connaître

Premièrement, la mindfulness peut aider une personne à mieux distinguer ses valeurs fondamentales et les activités qui l’intéressent vraiment des attentes de la société ou de ses proches (Schattke, Taylor, & Marion-Jetten, 2020; Strick et Papies, 2017). Sachant qu’il existe plusieurs moyens de mieux se connaître, la mindfulness apparaît comme un outil supplémentaire. Elle améliore la capacité d’une personne à porter attention à tous les aspects de son expérience, tout en acceptant ce qui émerge au lieu d’essayer d’éviter (Carlson, 2013).

Par exemple, en portant attention à son corps, Maya pourrait réaliser qu’elle éprouve souvent des tensions dans les épaules lorsqu’elle pense aux examens pour devenir comptable. Elle pourrait aussi se rendre compte qu’elle a des pensées négatives  durant ces moments et les observer pour voir ce que ça peut lui indiquer. En même temps, elle remarquerait qu’elle se sent ouverte et légère lorsqu’elle donne une présentation orale. Ces informations s’avèreront très utiles pour choisir le contexte de travail dans lequel elle sera satisfaite en tant que comptable.

Se fixer des buts de carrières autoconcordants

Deuxièmement, la mindfulness aiderait l’individu à se fixer des buts de carrière en lien avec ses véritables valeurs et intérêts. C’est ce qu’on appelle l’« autoconcordance des buts ». Ceux-ci naissent d’une motivation autodéterminée  et sont essentiels pour le bien-être de l’individu (Deci, Ryan, Schultz et Niemiec, 2015). En effet, les résultats d’une série d’études longitudinales ont démontré que choisir un programme d’études en lien avec ses intérêts et ses valeurs peut diminuer la détresse psychologique, augmenter les résultats académiques et diminuer le risque de décrochage scolaire (Taylor et al., 2014).

En pratiquant la mindfulness, Maya pourrait réaliser qu’elle se préoccupe souvent de ce que les autres diraient si elle abandonnait son programme et si elle ne devenait pas comptable. Elle pourrait alors observer, sans jugement, que sa motivation envers son objectif de carrière n’est peut-être pas aussi autodéterminée qu’elle le croyait. Tel que mentionné précédemment, Maya pourrait aussi prendre conscience de ses véritables valeurs et de ce qui l’intéresse réellement. Cela pourrait l’amener à mieux préciser son objectif de carrière, et éventuellement s’engager dans un but de carrière plus autoconcordant.

Développer sa créativité

Finalement, la mindfulness favorise la créativité (Lebuda et al., 2016) sous toutes ses formes, ce qui permet à l’inidivu d’imaginer des possibilités nouvelles et innovantes lorsqu’il est confronté à des obstacles. Les études à ce sujet ont démontré que les gens trouvaient plus facilement des solutions à un problème lorsqu’ils avaient médité avant (Colzato et al. 2014 : Ding et al. 2015).

À ce titre, la mindfulness pourrait aider Maya à trouver des opportunités inédites pour surmonter les embuches liées à sa carrière.

Aider les étudiants universitaires grâce à la mindfulness

Comment les professionnels en développement de carrière peuvent-ils cultiver la mindfulness des étudiants universitaires ? D’abord, ils peuvent les encourager et les accompagner à observer et à reconnaître ce qu’ils vivent dans leur quotidien (pensées récurrentes, sensations physiques, émotions) et à accepter ces expériences avec bienveillance. Les étudiants universitaires pourraient capitaliser sur le développement de la mindfulness comme habileté, d’autant plus que sa pratique est adaptée et accessible malgré leur horaire chargé. Plus que jamais, l’orientation professionnelle apparaît comme un processus continu tout au long de la vie, et non comme une étape fixe temporellement. Ainsi, la mindfulness représente une habileté « évolutive », étant donné qu’elle se développe au fur et à mesure que l’étudiant évolue en interaction avec le marché du travail.

La mindfulness comme superpouvoir lié à la carrière est donc un outil supplémentaire permettant d’atténuer les émotions négatives généralement associées aux questionnements à ce niveau. Puisqu’elle favorise un meilleur accès à ses intérêts à ses valeurs, à ses pensées récurrentes, à ses sensations et à ses émotions, elle permet à l’étudiant de faire des choix cohérents et de mieux s’adapter aux obstacles, même après avoir gradué.

Gabrielle Beaupré, M.A., c.o, est étudiante au doctorat en éducation à l’UQAM. Elle s’intéresse à la présence attentive, à la motivation envers les buts de carrière et au bien-être auprès des étudiants universitaires. Son projet doctoral est financé par les Fonds de Recherche du Québec Société et Culture.

Geneviève Taylor, Ph.D., est professeure en counseling de carrière au département d’éducation et pédagogie à l’Université du Québec à Montréal, ainsi que chercheure au sein du Groupe de recherche et d’intervention sur la présence attentive (GRIPA). Ses recherches portent sur le rôle de la présence attentive et les processus motivationnels reliés à la carrière.

Références

American College Health Association. (2019). American College Health Association-National College Health Assessment II: Canadian Reference Group. Hanover : American College Health Association.

Association des services étudiants des universités et collèges du Canada (ASEUCC). (2013). Post-Secondary Student Mental Health: Guide to a Systemic Approach.

Carlson, E. N. (2013). Overcoming the Barriers to Self-Knowledge : Mindfulness as a Path to Seeing Yourself as You Really Are. Perspectives on Psychological Science, 8(2), 173‑186.

Colzato, L.S., Szapora, A., Lippelt, D. et Hommel, B. (2014). Prior meditation practice modulates performance and strategy use in convergent- and divergent-thinking problem. Mindfulness. http://dx.doi.org/10.1007/s12671-014-0352-9 (online publication ahead of print).

Deci, E. L., Ryan, R. M., Schultz, P. P. et Niemiec, C. P. (2015). Being aware and functioning fully. Handbook of mindfulness: Theory, research, and practice, 112-129.

Ding, X., Tang, Y., Deng, Y., Tang, R., et Posner, M.I. (2015). Mood and personality predict improvement in creativity due to meditation training. Learning and Individual Differences, 37, 217–221.

Grégoire, S., Lachance, L. et Richer, L. (2016). La présence attentive, mindfulness. État des connaissances empiriques et pratiques. Montréal : Presses de l’Université du Québec.

Kabat-Zinn, J. (2003). Mindfulness-based interventions in context : Past, present, and future. Clinical psychology: Science and practice, 10(2), 144–156.

Kashdan, T. B. et Rottenberg, J. (2010). Psychological flexibility as a fundamental aspect of health. Clinical Psychology Review30(7), 865-878.

Lebuda, I., Zabelina, D. L., & Karwowski, M. (2016). Mind full of ideas: A meta-analysis of the mindfulness–creativity link. Personality and Individual Differences93, 22-26.

Piot, F. (2020). Projet Oreka : essai randomisé contrôlé destiné à évaluer l’impact d’ateliers issus de l’approche d’acceptation et d’engagement sur la souplesse psychologique, le bien-être psychologique et l’espoir chez des individus confrontés à une impasse professionnelle [The Oreka Project : Randomised controlled trial to evaluate the impact of workshops based on Acceptance-Commitment Therapy on psychological flexibility, psychological well-being, and hope among people experiencing a professional impasse]. [Unpublished doctoral dissertation]. Université du Québec à Montréal.

Polizzi, C., Lynn, S. J., & Perry, A. (2020). Stress and Coping in the Time of COVID-19: Pathways to Resilience and Recovery. Clinical Neuropsychiatry17(2).

Schwartz, B. (2004). The paradox of choice : Why more is less (Vol. xi). HarperCollins Publishers.

Strick, M. et Papies, E. K. (2017). A Brief Mindfulness Exercise Promotes the Correspondence Between the Implicit Affiliation Motive and Goal Setting. Personality and Social Psychology Bulletin, 43(5), 623‑637.

Taylor, G., Jungert, T., Mageau, G. A., Schattke, K., Dedic, H., Rosenfield, S. et Koestner, R. (2014). A self-determination theory approach to predicting school achievement over time : The unique role of intrinsic motivation. Contemporary Educational Psychology, 39(4), 342‑358. https://doi.org/10.1016/j.cedpsych.2014.08.002

Union étudiante du Québec. (2019). Enquête « sous ta façade » : enquête panquébécoise sur la santé psychologique étudiante.

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colleagues brainstorming at whiteboard in officeAutomne 2020

Soutenir le développement de carrière des personnes autochtones, noires et de couleur

Il est essentiel que les professionnels de la carrière comprennent les répercussions du racisme systémique sur les parcours professionnels et scolaires de leurs clients afin de les aider à réussir

Jodi Tingling

Au Canada, le racisme systémique a touché les personnes autochtones, noires et de couleur (PANDC) et a eu une incidence négative sur le parcours professionnel d’un grand nombre d’entre elles. Les intervenants en développement de carrière doivent bien comprendre les effets négatifs du racisme systémique sur leurs clients et bien évaluer comment ils peuvent contribuer au démantèlement d’un système parfois oppressif afin de s’assurer que chacun a la possibilité de réussir sa vie professionnelle.

Lutter contre l’inégalité et ses conséquences

Le concept de l’équité repose sur la justice, l’impartialité et l’égalité des chances pour tous et non seulement pour un groupe en particulier. Il est important de bien comprendre les défis que les PANDC doivent relever pour déterminer leur véritable parcours professionnel et ses répercussions. La discrimination dans le système d’éducation, les méthodes de recrutement partiales, les micro-agressions sur le lieu de travail et l’absence de nominations à des postes de direction font partie de ces défis qui peuvent avoir une incidence négative sur le parcours professionnel des PANDC.

En tant que professionnel de la carrière, sachez que les PANDC peuvent devoir composer avec des blessures du racisme qui peuvent avoir un impact sur leur carrière et sur de nombreux autres aspects de leur vie. Les blessures du racisme entraînent une détresse psychologique et physique et peuvent être attribuées à différentes expériences associées à la race.

Pour lutter contre l’inégalité et éliminer ses conséquences, il faut comprendre le contexte dans lequel les PANDC mènent leur carrière. Il est important d’être conscient que les normes de professionnalisme sont ancrées dans la culture de la suprématie blanche et servent à opprimer les personnes autochtones, noires et de couleur. Selon deux organisateurs de terrain et universitaires, Tema Okun et Keith Jones, le suprématisme blanc existe dans de nombreuses organisations et a des ramifications sur le lieu de travail. Ainsi, les attentes en matière de comportements et d’attitudes sont codifiées selon les conventions des Blancs. Il est ici notamment question du perfectionnisme, des normes en matière de coiffure, de vêtements et de modèles de communication et des attentes générales telles que l’adhésion à la « culture d’entreprise ». Ces attentes amplifient les environnements de travail toxiques et nuisent à la carrière des PANDC.

« En tant que professionnel de la carrière, sachez que les PANDC peuvent devoir composer avec des blessures du racisme qui peuvent avoir un impact sur leur carrière et sur de nombreux autres aspects de leur vie. »

Pour assurer la réussite de votre stratégie visant à améliorer le parcours de carrière des PANDC, vous devez d’abord devenir l’allié de vos clients pour les appuyer et contribuer au démantèlement d’un système qui les désavantage. Pour ce faire, vous devez remettre en question le système et offrir aux PANDC un espace où elles pourront s’épanouir sur le plan professionnel.

Formation et parcours professionnels

Les obstacles à la réussite professionnelle peuvent prendre racine dans le système d’éducation, où les préjugés raciaux des éducateurs peuvent faire dévier le parcours scolaire des étudiants racialisés. Ce n’est que récemment que le gouvernement de l’Ontario a annoncé qu’il mettrait fin à la pratique controversée qui consiste à orienter les étudiants vers les filières des études appliquées et universitaires. Une pratique largement connue pour être discriminatoire à l’égard des étudiants racialisés. Un rapport de 2017 de l’Université de York, Towards Race Equity in Education, a conclu que 53 % des étudiants noirs suivaient un programme d’études universitaires, contre 81 % des étudiants blancs et 80 % des autres étudiants racialisés. Ces pratiques discriminatoires du système d’éducation peuvent au bout du compte limiter le parcours professionnel et modifier les perspectives scolaires et professionnelles des PANDC en plus de créer une perception négative.

Revenus et sécurité d’emploi

Les PANDC sont désavantagées sur les plans du chômage, des revenus et des possibilités de carrière. Selon le Centre canadien de politiques alternatives (CCPA), les travailleurs racialisés étaient plus susceptibles d’être sans emploi en 2016, avec un taux de chômage de 9,2 %, que les travailleurs non racialisés, avec un taux de chômage de 7,3 %. En outre, l’écart de rémunération est resté pratiquement le même depuis 2006. Pour chaque dollar que gagnent les hommes non racialisés, les femmes racialisées gagnent 59 cents et les hommes racialisés 78 cents. Dans le rapport intitulé By the numbers: Race, Gender and the Canadian Labour Market, le CCPA a également conclu qu’il y a eu peu de progrès pour combler les différences raciales en matière de chômage. L’une des principales constatations émanant de ce rapport est que la discrimination sur le marché du travail à l’égard des travailleurs racialisés est toujours présente, tant pour l’écart salarial que le taux de chômage.

De même, le Conference Board du Canada conclut qu’il existe des pratiques discriminatoires qui contribuent aux écarts en matière d’emploi et de salaires. « Avoir un nom à la consonance étrangère » a fait partie des facteurs évalués dans le cadre du processus de recrutement. En comparant des curriculums vitæ dont le contenu était similaire, on a constaté que ceux qui appartenaient à des personnes dont le nom n’avait pas de consonance étrangère avaient 35 % plus de chances d’être rappelées. L’appartenance à un groupe racialisé réduisait également la sécurité d’emploi : 20,9 % des personnes appartenant à des minorités visibles ont déclaré que le fait d’avoir été victimes de discrimination a été une entrave au maintien de leurs possibilités d’emploi.

Mobilité professionnelle

La mobilité professionnelle au sein de la communauté des PANDC est aussi une question importante qui doit être abordée. Les PANDC sont constamment sous-représentées dans les postes de direction. Un rapport du Diversity Institute de l’Université Ryerson a révélé que bien que la population du Grand Montréal soit composée à 22,6 % de personnes racialisées, seulement 5,3 % d’entre elles occupent des postes de haute direction. En outre, dans le cadre du projet Black Experience, on a demandé aux personnes noires vivant dans la région du Grand Toronto de décrire comment la couleur de leur peau a modifié leur expérience professionnelle. Les participants ont évoqué certains obstacles qu’ils ont dû affronter au cours de leur carrière, notamment la remise en question de leur niveau de compétences, le racisme et les stéréotypes. Ils ont aussi affirmé que leurs qualifications avaient parfois été mises de côté ou non reconnues. L’expertise des PANDC est souvent non reconnue, ce qui peut être très décourageant pour ceux et celles qui souhaitent occuper des postes de haute direction.

Évaluation des préjugés

L’évaluation de vos préjugés devrait constituer la première étape de votre processus de réflexion sur la manière dont vous, en tant que professionnel de la carrière, pouvez aider vos clients issus du groupe des PANDC. L’Université Harvard propose un test d’association implicite (IAT) basé sur la race qui peut vous aider à comprendre vos idées reçues en ce qui concerne les préjugés raciaux. Passez ce test pour comprendre vos préjugés et établir une stratégie pour les combattre activement. Assurez-vous de bien comprendre que le racisme systémique existe au Canada et que des professionnels de la communauté des PANDC ont historiquement été victimes de discrimination, tant durant le processus de recrutement que sur le marché du travail. Ensuite, si vous constatez que vous avez des idées reçues, prenez les mesures nécessaires pour écouter les PANDC, apprendre de leurs expériences et y être réceptif.

Renforcer la résilience

N’hésitez pas à remettre en question les systèmes qui profitent à certaines populations au détriment des autres. Demandez-vous comment vous pouvez vous y prendre pour proposer de nouveaux processus qui appuient les PANDC et leur offrent des occasions équitables.

Voici quelques-unes des stratégies que vous pouvez adopter pour défendre le droit au perfectionnement professionnel des PANDC :

  • Devenez un allié. Utilisez votre expertise et vos privilèges pour contribuer au démantèlement des systèmes oppressifs qui servent à promouvoir la suprématie blanche et qui nuisent au parcours professionnel des PANDC.
  • Établissez des partenariats avec des organisations qui font un travail de sensibilisation pour répondre aux besoins particuliers des PANDC.
  • Évaluez si les domaines d’études vers lesquels vos clients issus du groupe des PANDC sont dirigés sont limitatifs et proposez des options pour élargir leurs perspectives professionnelles.
  • Offrez de nouvelles possibilités à vos clients issus du groupe des PANDC et aidez-les bâtir leur carrière en les mettant en contact avec des mentors, des réseaux et des dirigeants.
  • Parlez aux employeurs des préjugés et des idées reçues possibles, faites la promotion des possibilités et amplifiez la voix des PANDC.
  • Dressez-vous contre le racisme et l’oppression lorsque vous en êtes témoin, engagez des conversations cruciales et cherchez des renforts pour vous aider à poursuivre votre travail.
  • Créez un réseau qui pourra être une référence pour obtenir des ressources bien adaptées aux réalités culturelles et qui peuvent soutenir la santé mentale, établir des liens et améliorer la croissance.

En gardant ces stratégies à l’esprit, continuez à aider vos clients issus du groupe des PANDC à obtenir du succès et à surmonter les obstacles qu’ils pourraient trouver sur leur parcours professionnel.

Jodi Tingling est une intervenante en mieux-être et en développement de carrière qui travaille avec des dirigeants, des professionnels et des organisations pour s’assurer qu’ils réalisent leur plein potentiel. Sa véritable passion est de faire entendre la voix et les expériences des femmes autochtones, noires et de couleur du Canada. À titre de fondatrice de Creating New Steps, elle accompagne les organisations et les professionnels afin qu’ils atteignent leurs objectifs professionnels uniques.

Références

Block, S., Galabuzi, G., & Tranjan, R. (2019) Canada’s colour coded income inequality. Canadian Centre for Policy Alternatives. policyalternatives.ca/sites/default/files/uploads/publications/National%20Office/2019/12/Canada%27s%20Colour%20Coded%20Income%20Inequality.pdf

Comas-Díaz, L., Hall, G. N., & Neville, H. A. (2019). Racial trauma: Theory, research, and healing: Introduction to the special issue. American Psychologist, 74(1), 1-5. http://dx.doi.org/10.1037/amp0000442

Okun, Tema. (n.d.) White supremacy culture. collectiveliberation.org/wp-content/uploads/2013/01/White_Supremacy_Culture_Okun.pdf

Ryerson Diversity Institute. (2017). The Black experience project in the GTA: Overview report. ryerson.ca/content/dam/diversity/reports/black-experience-project-gta—1-overview-report.pdf

Ryerson Diversity Institute. (2019). Diversity leads women & racialized people in senior leadership positions. ryerson.ca/diversity/reports/DiversityLeads_Montreal_EN.pdf

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York University. (2017). Towards race equity in education: The schooling of Black students in the Greater Toronto Area. edu.yorku.ca/files/2017/04/Towards-Race-Equity-in-Education-April-2017.pdf?x60002

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